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La lipoprotéine Lp(a) : son intérêt dans l’interprétation du bilan lipidique

GUIMONT Marie-Christine Thèse pour l'obtention du Diplôme d'État de Docteur en Pharmacie

Service de Biochimie, Hôpital Universitaire Beaujon, Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) - France

Guimont MC. Lipoprotein(a) Lp(a): its interest in the interpretation of the lipid profile. Pharm Thesis, Paris V University, 1998

 

Thèse de 293 pages, 425 références.   Mention : Très Honorable

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Extraits du Plan de la Thèse

Table des Matières

Introduction

1. Rappels sur les maladies cardiovasculaires

    1.7. L'athérosclérose et ses complications

2. La lipoprotéine Lp(a)

    2.5.1. Concentration plasmatique Lipoprotéine Lp(a)

    2.5.5. Régulation de la concentration de Lp(a)

       2.5.5.3. Influence de certaine états physiopathologiques
                    Influence des hormones sexuelles
                    Influence de l'inflammation

    2.8. Lp(a) et pathologie

    2.8.1. Les pathologies par athérosclérose primitive

      2.8.1.1. Maladies coronariennes

      2.8.1.2. Maladies cérébrovasculaires

      2.8.1.3. Artériopathies des membres inférieurs

    2.8.2. Les pathologies avec athérosclérose secondaire

       2.8.2.1. Diabète

       2.8.2.2. Maladies rénales

3. Résultats personnels

4. Place de la Lp(a) dans l'interprétation du bilan lipidique

conclusion

bibliographie

 

 

UNIVERSITÉ  PARIS V  (RENE  DESCARTES)

FACULTÉ  DES  SCIENCES  PHARMACEUTIQUES  ET  BIOLOGIQUES

            Année 1998                                                                                     Thèse N°

THÈSE

pour l’obtention du diplôme d’État de

DOCTEUR  EN  PHARMACIE

présentée et soutenue publiquement le 23 juin 1998 par

GUIMONT  Marie-Christine

La  lipoprotéine Lp(a) :

son intérêt dans l'inteprétation du bilan lipidique

JURY

Mr le Professeur Jean-Marie LAUNAY                      Président

Me le Docteur Thérèse GOUSSON                           Rapporteur

Me le Docteur Jacqueline PEYNET                           Membre

A Monsieur le Professeur Jean-Marie LAUNAY
Chef du Service de Biochimie, Hôpital Lariboisière, AP-HP
Praticien Hospitalier, Biologiste des Hôpitaux

qui m'a fait l'honneur d'accepter la présidence de cette thèse.

Avec le témoignage de mon profond respect.

A Madame le Docteur Thérèse GOUSSON
Praticien Hospitalier, Biologiste des Hôpitaux
Service de Biochimie, Hôpital Beaujon, AP-HP

qui m'a confié ce travail et aidé avec bienveillance durant sa réalisation.

A Madame le Docteur Jacqueline PEYNET
Praticien Hospitalier, Biologiste des Hôpitaux
Service de Biochimie, Hôpital Lariboisière, AP-HP

qui a bien voulu s’intéresser à ce travail et m’a fait l’honneur de participer au jury.

A Monsieur le Professeur Edouard DELACOUX
Ancien Chef du Service de Biochimie, Hôpital Beaujon, AP-HP
Praticien Hospitalier, Biologiste des Hôpitaux

qui m'a prodigué ses conseils et ses encouragements lors de la conception de ce travail.

Avec le témoignage de mon profond respect.

A mes Parents.

A ma Famille

TABLE des MATIÈRES

Introduction ........................................................................................1

1. Rappels sur les maladies cardiovasculaires .........................3

1.1. Définition...................................................................................................................3

1.2. Les données de l'épidémiologie...........................................................................3

     1.2.1. Mortalité............................................................................................................3

     1.2.2. Morbidité...........................................................................................................5

     1.2.3. Détermination des facteurs de risque...........................................................5

     1.2.4. Rôle des dyslipoprotéinémies.......................................................................6

1.3. Importance biologique des lipides.................................................................... 10

     1.3.1. Définition..........................................................................................................10

     1.3.2. Importance nutritionnelle...............................................................................10

     1.3.3. Importance physiologique............................................................................ 10

          1.3.3.1. Lipides de réserve................................................................................. 11

          1.3.3.2. Lipides de structure................................................................................ 11

          1.3.3.3. Lipides à activité métabolique.............................................................. 11

          1.3.3.4. Lipides circulants.................................................................................... 11

1.4. Les lipides circulants et le concept de lipoprotéine.................................... 11

     1.4.1. Les lipides circulants...................................................................................... 11

          1.4.1.1. Le cholestérol............................................................................... ........... 12

          1.4.1.2. Les triglycérides....................................................................................... 12

          1.4.1.3. Les phospholipides.................................................................................. 13

          1.4.1.4. Les acides gras non estérifiés............................................................... 14

     1.4.2. Le concept de lipoprotéine............................................................................. 14

1.5. Structure et classification des lipoprotéines circulantes..........................16

     1.5.1. Structure générale des lipoprotéines.............................................................16

     1.5.2. Classification et nomenclature des lipoprotéines.........................................17

          1.5.2.1. Classification selon la mobilité électrophorétique.................................. 18

          1.5.2.2. Classification selon la densité hydratée.................................................. 18

          1.5.2.3. Classification selon la taille....................................................................... 20

          1.5.2.4. Classification selon la composition en apoprotéines........................... . 21

1.6. Rappels du métabolisme normal des lipoprotéines.........................................  23

     1.6.1. Absorption, transport et métabolisme des lipides alimentaire.................... 24

          1.6.1.1. Lipides alimentaires................................................................................... 24

          1.6.1.2. Métabolisme des chylomicrons................................................................. 24

     1.6.2. Métabolisme des triglycérides endogènes et des VLDL.............................. 27

          1.6.2.1. Synthèse hépatique des VLDL.................................................................. 27

          1.6.2.2. Catabolisme des VLDL.............................................................................. 28

          1.6.2.3. Régulation..................................................................................................... 29

     1.6.3. Métabolisme du cholestérol et des lipoprotéines qui le transportent.......... 30

          1.6.3.1. Importance biologique du cholestérol........................................................ 30

          1.6.3.2. Biosynthèse et sécrétion du cholestérol.................................................... 30

          1.6.3.3. Transport et apport de cholestérol aux tissus: le rôle des LDL............... 33

          1.6.3.4. Catabolisme des LDL et du cholestérol.................................................... 33

     1.6.4. Métabolisme et rôle des HDL........................................................ ................... 39

          1.6.4.1. Synthèse........................................................................................................ 40

          1.6.4.2. Transformation intravasculaire.................................................................... 40

          1.6.4.3. Catabolisme.................................................................................................. 41

     1.6.5. Conclusion............................................................................................................ 43

1.7. L'athérosclérose et ses complications................................................................. 43

     1.7.1. Définition................................................................................................................ 43

     1.7.2. Structure et composition cellulaire d'une artère saine.................................... 44

          1.7.2.1. Structure......................................................................................................... 44

          1.7.2.2. Composition cellulaire et métabolisme de la paroi artérielle................... 45

     1.7.3. L'artère athéroscléreuse...................................................................................... 49

          1.7.3.1. Topographie des lésions athéroscléreuses............................................... 49

          1.7.3.2. Anatomie pathologique des lésions athéroscléreuses............................. 51

     1.7.4. Pathogénie de l'athérosclérose......................................................................... 53

          1.7.4.1. Théorie ancienne de la réponse plaquettaire.............................................. 54

          1.7.4.2. Hypothèse de l'infiltration lipidique.............................................................. 54

          1.7.4.3. Hypothèse de la réaction à un traumatisme............................................... 55

          1.7.4.4. Autres hypothèses......................................................................................... 58

          1.7.4.5. Consensus actuel sur l'athérogenèse................................................. ........ 62

2. La lipoprotéine Lp(a) ........................................................................65

2.1. Découverte de la lipoprotéine (a) par Kare BERG................................................65

     2.1.1. Circonstances.......................................................................................................65

     2.1.2. Stratégie de recherche utilisée...........................................................................66

     2.1.3. Résultats: mise en évidence d'un nouvel allotype..........................................67

     2.1.4. Nomenclature et nature du nouvel antigène....................................................67

          2.1.4.1. Nomenclature.................................................................................................67

          2.1.4.2. Nature du nouvel antigène............................................................................67

     2.1.5. Fréquence du caractère.......................................................................................68

     2.1.6. Étude génétique préliminaire............................................................................ .68

2.2. Composition chimique et propriétés physico-chimiques de la Lp(a).................. 68

     2.2.1. Caractéristiques................................................................................................... 68

     2.2.2. Isolement de la Lp(a)........................................................................................... 69

          2.2.2.1. Isolement et purification.................................................................................69

          2.2.2.2. Contrôle de la pureté des préparations...................................................... 70

          2.2.2.3. Séparation de l'apo(a) et de la particule "LDL like" [Lp(a-)].................... 70

     2.2.3. Constantes et propriétés physiques...................................................................71

          2.2.3.1. Densité hydratée............................................................................................71

          2.2.3.2. Mobilité électrophorétique............................................................................ 71

          2.2.3.3. Masse moléculaire et taille........................................................................... 72

          2.2.3.4. Viscosité......................................................................................................... 72

          2.2.3.5. Comportement au froid de la Lp(a) purifiée................................................73

     2.2.4. Composition chimique......................................................................................... 74

          2.2.4.1. Les hydrates de carbone.............................................................................. 74

          2.2.4.2. Les lipides...................................................................................................... 75

          2.2.4.3. Les protéines................................................................................................. 75

2.3. Composition chimique, structure, propriétés et génétique de l'apo(a)........... 77

     2.3.1. Composition chimique..........................................................................................77

          2.3.1.1. Isolement et purification de l'apoprotéine(a)...............................................77

          2.3.1.2. Composition chimique de l'apo(a).............................................................. 77

     2.3.2. Structure................................................................................................................. 78

          2.3.2.1. Structure primaire et homologie avec le plasminogène............................ 78

          2.3.2.2. Structure secondaire..................................................................................... 84

          2.3.2.3. Structure tertiaire................................................................................ ...........85

     2.3.3. Propriétés de l'apoprotéine (a)............................................................... ............ 86

          2.3.3.1. Hydrophile...................................................................................... ................ 86

          2.3.3.2. Propriétés liées à la présence des kringles............................................... 86

          2.3.3.3. Propriétés des régions inter-kringles.......................................................... 88

          2.3.3.4. Propriétés du domaine protéase................................................................. 88

          2.3.3.5. Propriétés immunologiques......................................................................... 89

     2.3.4. Génétique de l'apoprotéine (a)........................................................................... 90

          2.3.4.1. Le gène de l'apoprotéine(a)......................................................................... 90

          2.3.4.2. Un locus polyallélique.................................................................................... 91

          2.3.4.3. Évolution du gène de l'apoprotéine (a)....................................................... 92

          2.3.4.4. Ségrégation des différents allèles d'apo(a)............................................... 94

          2.3.4.5. Expression du gène de l'apoprotéine(a).................................................... 95

2.4.Structure de la Lp(a)....   ......................... ..............................................................95

2.5. Métabolisme.....................  ........................ .............................................................97

     2.5.1. Concentration plasmatique................ ..........................................................97

          2.5.1.1. Constance intra-individuelle...................................................................97

          2.5.1.2. Variabilité inter-individuelle....................................................................97

     2.5.2. Paramètres métaboliques...........................................................................102

     2.5.3. Synthèse........................................................................................................103

          2.5.3.1. Nécessité de la présence d'apoB100................................................103

          2.5.3.2. Indépendance des autres lipoprotéines à apoB................................104

          2.5.3.3. Lieu de synthèse....................................................................................105

          2.5.3.4. Mécanisme.............................................................................................106

     2.5.4. Catabolisme...................................................................................................108

          2.5.4.1. Place du récepteur des LDL.................................................................108

          2.5.4.2. Place des macrophages........................................................................111

          2.5.4.3. Interaction avec les protéines de la matrice extra-cellulaire...............112

     2.5.5. Régulation de la concentration de Lp(a).....................................................112

          2.5.5.1. Par des facteurs génétiques..................................................................112

          2.5.5.2. Influence des facteurs d'environnement................................................116

          2.5.5.3. Influence de certains états physiopathologiques.................................118

2.6. Rôle physiologique et mécanisme pathogénique............................................120

     2.6.1. Rôle physiologique.........................................................................................120

          2.6.1.1. Régulation de la fibrinolyse physiologique............................................121

          2.6.1.2. Cicatrisation des lésions vasculaires.....................................................126

     2.6.2. Mécanismes pathogéniques......................................................................... 128

          2.6.2.1. Action proathérogène...............................................................................128

          2.6.2.2. Action prothrombogène............................................................................129

2.7. Détection et dosage de la Lp(a) .............................................................................130

     2.7.1. Méthodes d'analyse qualitative......................................................................130

          2.7.1.1. Appliquées à la détection de la Lp(a) plasmatique...............................130

          2.7.1.2. Appliquées à la séparation des isoformes d'apo(a).............................134

     2.7.2. Méthodes d'analyse quantitative....................................................................137

          2.7.2.1. Remarques.................................................................................................137

          2.7.2.2. Méthodes immunologiques.......................................................................138

          2.7.2.3. Détermination du cholestérol de la Lp(a).................................................146

2.8. Lp(a) et pathologie....................................................................................................148

     2.8.1. Les pathologies par athérosclérose primitive................................................148

          2.8.1.1. Maladies coronariennes............................................................................150

          2.8.1.2. Maladies cérébrovasculaires....................................................................161

          2.8.1.3. Artériopathies des membres inférieurs....................................................164

     2.8.2. Les pathologies avec athérosclérose secondaire................................ ........165

          2.8.2.1. Le diabète......................................................................................... ..........165

          2.8.2.2. Les maladies rénales..................................................................................171

          2.8.2.3. L'hypothyroïdie............................................................................................. 178

          2.8.2.4. La goutte.......................................................................................................180

     2.8.3. Autres maladies ..................................................................................................181

          2.8.3.1. Les maladies hépatiques............................................................................181

          2.8.3.2. Les maladies rhumatismales, connectivites............................................. 184

          2.8.3.3. Les thromboses veineuses .........................................................................185

3. Résultats personnels......................................................................186

3.1. Matériel et méthodes................................................................................................186

     3.1.1. Séparation des lipoprotéines par électrophorèse..........................................186

     3.1.2. Dosage de la Lp(a).............................................................................................187

     3.1.3. Population étudiée.............................................................................................188

     3.1.4. Outils statistiques............................................................................................... 190

3.2. Résultats...................................................................................................................... 191

     3.2.1. Comparaison de techniques analytiques....................................................... 191

          3.2.1.1. Séparation des lipoprotéines par électrophorèse................................... 191

          3.2.1.2. Dosage de la Lp(a)..................................................................................... 195

     3.2.2. Résultats des 1504 individus étudiés.............................................................. 199

          3.2.2.1. Recherche de la Lp(a) par électrophorèse avec l'Hydragel LIPO + Lp(a)..............199

          3.2.2.2. Dosages des Lp(a) positives..................................................................... 205

4. Place de la Lp(a) dans l'interprétation du bilan lipidique........211

4.1.Notion de bilan lipidique............................................................................................ 211

     4.1.1. Buts et contexte du bilan lipidique...................................................................211

          4.1.1.1. Buts du bilan lipidique.................................................................................211

          4.1.1.2. Stratégie de prévention primaire et secondaire......................................212

     4.1.2. Le bilan lipidique.................................................................................................213

          4.1.2.1. Paramètres du bilan lipidique....................................................................213

          4.1.2.2. Variabilité des paramètres du bilan lipidique...........................................214

          4.1.2.3. Valeurs "normales"......................................................................................215

4.2. Rappels succinCts des différentes dyslipoprotéinémies................... ........... 216

     4.2.1. Définitions............................................................................................................ 216

     4.2.2. Classification....................................................................................................... 217

     4.2.3. Hyperlipoprotéinémie de type I (hyperchylomicronémie familiale)............ 218

     4.2.4. Hyperlipoprotéinémie de type II a (hypercholestérolémie pure)................. 218

     4.2.5. Hyperlipoprotéinémie de type IIb (hyperlipidémie mixte)............................. 219

     4.2.6. Hyperlipoprotéinémie de type III (dysbêtalipoprotéinémie)......................... 221

     4.2.7. Hyperlipoprotéinémie de type IV (hypertriglycéridémie endogène)........... 222

     4.2.8. Hyperlipoprotéinémie de type IV(hypertriglycéridémie majeure, exogène
                 et endogène)....................................................................................................... 223

     4.2.9. Hyperlipoprotéinémie n'appartenant pas à la classification de Fredrickson 224

          4.2.9.1. Hyperalphalipoprotéinémie familiale......................................................... 224

          4.2.9.2. Hypoalphalipoprotéinémies........................................................................ 224

          4.2.9.3. Hypobêtalipoprotéinémies......................................................................... 224

          4.2.9.4. Concentration élevée de Lp(a)................................................................... 225

4.3. Place de la Lp(a) dans les différentes dyslipoprotéinémies........................... 225

     4.3.1. Comparaison des concentrations de Lp(a) des sujets dyslipidémiques
                 avec celles des sujets normolipidémiques....................................................225

     4.3.2. Comparaison des concentrations de Lp(a) dans divers groupes
                 de dyslipidémies............................................................................................... 225

     4.3.3. Répartition des isoformes d'apo(a) dans les dyslipidémies........................ 229

     4.3.4. Lp(a) et risque vasculaire.................................................................................. 229

4.4. Problèmes gênant l'interprétation des taux élevés de Lp(a)......................... 230

     4.4.1. Variabilité biologique des concentrations....................................................... 230

     4.4.2. Variabilité analytique.......................................................................................... 231

          4.4.2.1. Nature de l'échantillon................................................................................. 231

          4.4.2.2. Effet des conditions de conservation avant dosage................................ 232

          4.4.2.3. Absence de standardisation des méthodes de dosage......................... 233

     4.4.3. A propos du seuil pathologique........................................................................ 233

     4.4.4. Absence de traitement efficace et bien toléré................................................. 234

     4.4.5. Y a t-il un bénéfice à abaisser le taux de la Lp(a) ?....................................... 238

4.5. Attitude pratique......................................................................................................... 238

4.5.1. Doit-on chercher et doser la Lp(a) lors de tout bilan lipidique complet ? .238

4.5.1.1. Arguments en défaveur de l’inclusion de la Lp(a) dans le bilan lipidique
               complet
..................................................................................................................238

4.5.1.2. Arguments en faveur de l’inclusion de la Lp(a) dans le bilan lipidique
               complet.................................................................................................................239

4.5.2. Dans quelles circonstances faut-il rechercher et doser la Lp(a) ?...........239

conclusion........................................................................................................................ 240

bibliographie ................................................................................................................... 241

Tableaux

     ............................................................................................................................................................... Page

 

Tableau I :       Mortalité par maladies de l'appareil circulatoire, France 1990..............................4

Tableau II :          Résultats d'études d'intervention sur la cholestérolémie (Diététique et/ou médicaments).....9

Tableau III :      Composition chimique des lipoprotéines plasmatiques............................................15

Tableau IV :     Composition en apoprotéines des principales lipoprotéines plasmatiques.....  15

Tableau V :      Composition et densité hydratée des lipoprotéines plasmatiques.......................19

Tableau VI :     Propriétés physiques des lipoprotéines...................................................................   20

Tableau VII :    Exemples de lipoprotéines simples et complexes.................................................... ..21

Tableau VIII :   Propriétés et fonction métaboliques des apoprotéines plasmatiques................22

Tableau IX :     Propriétés physiques de la Lp(a) et des LDL............................................................. 72

Tableau X :      Composition chimique de la Lp(a) et des LDL...............................................................74

Tableau XI :     Composition en hydrates de carbone de la Lp(a) et des LDL..................................74

Tableau XII :    Composition en acides aminés de l'apo(a), de l'apo B et de la moyenne des protéines....77

Tableau XIII :   Poids moléculaires et nombres de kringles des isoformes d'apoprotéine(a)....83

Tableau XIV :   Structures secondaires comparées des LDL, de l'apo(a) et de la Lp(a),
                         dÉterminÉs par dichroisme circulaire.......................................................................................
85

Tableau XV :    Paramètres métaboliques comparés de la Lp(a) et des LDL.............102

Tableau XVI :   Lp(a) et maladies coronariennes, études rétrospectives................152

Tableau XVII :  Lp(a) et maladies coronariennes, études prospectives.................... 158

Tableau XVIII : Lp(a) et maladies cérébrovasculaires....................................................163

Tableau XIX :   Lp(a) et diabète...............................................................................................170

Tableau XX :    Lp(a) et maladies rénales............................................................................175

Tableau XXI :   Lp(a) dans les différentes dyslipoprotéinémies....................................228

Tableau XXII :  Effet des médicaments hypolipidémiants sur la concentration de Lp(a)....235

Figures

                                                                                                                                                         Page

Figure 1 :   Formules du cholestérol libre et estérifié, des triglycérides,
                   des phospholipides, et des acides gras..........................................................13

Figure 2 :   Structure générale des lipoprotéines........................................................17

Figure 3 :   Métabolisme des lipides alimentaires, sort metabolique des chylomicrons. 25

Figure 4 :   Catabolisme des VLDL, production des LDL.................................................. 30

Figure 5 :   Biosynthèse du Cholestérol............................................................................. 32

Figure 6 :   Facteurs affectant l'homeostasie du cholestérol au niveau cellulaire.... 34

Figure 7 :   Structure du récepteur des LDL.....................................................................36

Figure 8 :   Catabolisme du cholestérol en acides biliaires....................................... 37

Figure 9 :   Cycle des HDL et transport "reverse" du cholestérol....................... 42

Figure 10 : Développement avec l' âge et topographie des lésions d'athérosclérose. 53

Figure 11 : SchÉma unifié de l'athérogenese...................................................................... 63

Figure 12 : Homologie de séquence des cDNA de l'apo(a) et du plasminogène........ 79

Figure 13 : Structure des kringles et du domaine inter-kringle............................. 80

Figure 14 : Structures comparées du plasminogène, du t-PA, de l'urokinase et
                    de la prothrombine............................................................................................     . 81

Figure 15 : Les 6 isoformes d'apoprotéine(a) separées par Utermann..........................83

Figure 16 : Les 34 isoformes d'apoprotéine(a) mises en evidence par Marcovina.......83

Figure 17 : Structure schématique du cDNA de l'apoprotéine(a)................................84

Figure 18 : Localisation chromosomique des gènes de l'apo(a) et du plasminogène.90

Figure 19 : Séquences comparées des cDNA du plasminogène et des apo(a)
                    humaine et du hérisson........................................................................................................ 94

Figure 20 : Structure schématique des LDL et de la lipoprotéine(a).............................. 97

Figure 21 : Distribution des concentrations sériques de Lp(a) chez les Caucasiens...98

Figure 22 : Distribution des concentrations de Lp(a) dans 7 groupes éthniques....... 101

Figure 23 : Relations negatives entre phénotype / poids moléculaire 
                    des isoformes d'apo(
a) et concentration de Lp(a).......................................   102

Figure 24 : Exemples de profils lipoprotéiques avec l’ Hydragel LIPO + L p(a)..193

Figure 25 : Dosage de la Lp(a) par électroimmunodiffusion...................................... 197

Figure 26 : dosage de la Lp(a), correlation entre la nephelemetrie et
                    l’ electroimmunodiffusion............................................................................... 198

Liste des abréviations

Lp(a) : lipoprotéine Lp(a)

apo(a) : apoprotéine (a)

HDL : high density lipoprotein

LDL : low density lipoprotein

VLDL : very low density lipoprotein

IDL : intermediate density lipoprotein

LCAT : lecithin cholesterol acyl transferase

ACAT : acyl cholesterol acyl transferase

CETP : cholesterol ester transfer protein

H M G Co-A reductase : hydroxymethyl Co enzyme A reductase

R-LDL : récepteur des LDL

t-PA : activateur tissulaire du plasminogène

K : kringle

PAI-1 : inhibiteur de l’activateur du plasminogène de type 1

PDGF : platelet derived growth factor

RA : risque attribuable

RR : risque relatif

HbA1c : hémoglobine A1c

DID : diabète insulinodépendant

DNID : diabète non insulinodépendant

SN : syndrome néphrotique

IR : insuffisance rénale

IRC : insuffisance rénale chronique

PTU : protéinurie

HD : hémodialyse

DPC : dialyse péritonéale continue

TR : transplantation rénale

CBP : cirrhose biliaire primitive

Dr GUIMONT Marie-Christine - Thèse de Docteur en Pharmacie

La lipoprotéine Lp(a) : son intérêt dans l'interprétation du bilan lipidique - Lipoprotein(a) Lp(a): its interest in the interpretation of the lipid profile

Introduction

           Les maladies de l'appareil circulatoire représentent une des premières causes de mortalité dans les pays industrialisés. La plupart d'entre elles sont la conséquence clinique des complications survenant au niveau des lésions athéromateuses des artères.

Le processus d'athérogenèse se déroule progressivement pendant plusieurs décennies avant la survenue des manifestations cliniques. L'infarctus myocardique et cérébral, l'oblitération d'une artère d'un membre inférieur sont les plus fréquentes de ces manifestations. C'est dire l'importance d'une prévention précoce, qui devrait idéalement être instaurée avant la constitution des lésions ou à un stade où celles-ci peuvent encore régresser; cette prévention nécessite l'identification des facteurs de risque déclenchant l'athérogenèse.

Les nombreuses études entreprises, expérimentales ou épidémiologiques, ont permis de montrer que l'athérogenèse est une maladie multifactorielle, et de mettre en évidence des facteurs de risque primaires et secondaires.

Parmi les facteurs de risque primaires, l'étude de Framingham a démontré l'importance du rôle des lipides et tout spécialement de l'hypercholestérolémie dans le déclenchement des lésions. Toutefois, si les hyperlipoprotéinémies "classiques" (types IIa, IIb, III, IV) sont indiscutablement athérogènes, des lésions athéromateuses précoces peuvent aussi se développer chez des sujets dont les taux de cholestérol total et de triglycérides sont normaux.

L'implication d'autres paramètres lipidiques a donc dû être recherchée et les progrès réalisés dans la connaissance du métabolisme des lipoprotéines plasmatiques ont permis d'affiner cette recherche.

Les études des différentes lipoprotéines et du rôle de leurs diverses apoprotéines ont permis de franchir un pas important, et de préciser l'impact sur l'athérogenèse d'une diminution d'une sous-classe d'HDL, les HDL2, de la présence de LDL petites et denses, de la concentration en apolipoprotéine B.

Enfin, la découverte par Berg d'une lipoprotéine aux propriétés particulières, la lipoprotéine (a), a ouvert une voie intéressante dans le dépistage des facteurs de risque des maladies cardiovasculaires. Cette lipoprotéine constitue un facteur de risque indépendant qu'il est important de déterminer, notamment dans les hypercholestérolémies familiales et chez les sujets normolipidémiques présentant une athérosclérose précoce.

Les hyperlipidémies postprandiales ne bénéficient d'aucun test standardisé actuellement. On sait cependant que certains individus présentent, uniquement en période postprandiale, des modifications de concentration et de composition des lipoprotéines qui pourraient expliquer certaines situations d'athérosclérose prématurée.

          L'objet de notre travail a été de discuter l'intérêt d'inclure la détermination de la lipoprotéine (a) dans le bilan lipidique de patients à risque de maladies cardiovasculaires.

Dans la première partie, nous nous sommes efforcée de définir, à partir des données expérimentales et épidémiologiques de diverses études, les facteurs de risque primaires et secondaires de l’athérosclérose, puis après le rappel du métabolisme des lipoprotéines, nous avons présenté les différentes théories de constitution de l'athérome.

Dans la deuxième partie, nous avons fait le point des connaissances actuelles sur la lipoprotéine (a).

Dans la troisième partie, nous avons exposé nos résultats personnels dans le dépistage et le suivi de patients atteints de maladies cardiovasculaires.

Enfin, dans la quatrième partie nous avons discuté de la place de la lipoprotéine (a) dans l'interprétation du bilan lipidique.

Dr GUIMONT Marie-Christine - Thèse de Docteur en Pharmacie    page 2

La lipoprotéine Lp(a) : son intérêt dans l'interprétation du bilan lipidique - Lipoprotein(a) Lp(a): its interest in the interpretation of the lipid profile

1. Rappels sur les maladies cardiovasculaires

1.1. Définition

Les maladies cardiovasculaires rassemblent des pathologies affectant le cœur et les vaisseaux, pathologies le plus souvent consécutives à une artériopathie.

Les principales artériopathies comprennent l'artériosclérose, les anomalies de structure congénitales, les affections inflammatoires, et les maladies touchant principalement les petits vaisseaux, comme les pathologies d'hypersensibilité ou auto-immunes.

L'artériosclérose est un terme générique pour désigner un épaississement et un durcissement de la paroi artérielle. Dans environ deux tiers des cas, elle est la conséquence de l'athérosclérose.

L'athérosclérose est une forme d'artériosclérose atteignant les gros vaisseaux. Elle est à l'origine de la plupart des coronaropathies, des anévrismes aortiques et des artériopathies des membres inférieurs; elle joue également un rôle déterminant dans les artériopathies cérébrales.

1.2. Les données de l'épidémiologie

L'athérosclérose, principale cause des infarctus du myocarde, des maladies cérébro-vasculaires et de l’artériopathie oblitérante des membres inférieurs, est responsable de la majorité des décès dans les sociétés occidentales (USA, Europe)[1].

1.2.1. Mortalité

D'après la statistique des décès survenus en France pour l'année 1990, 174544 des 526201 décès sont dus aux maladies cardio-vasculaires, soit une part de mortalité égale à 33,2 pour cent [2] (Tableau I).

Parmi ces décès, 27,8 p. cent sont dus aux maladies cérébrovasculaires, 28,2 p. cent aux cardiopathies ischémiques et 6,0 p. cent aux artérites, anévrisme de l'aorte, embolies et thromboses artérielles.

Ainsi, en France près de deux tiers des causes de décès par maladie cardiovasculaire sont liés à l'athérosclérose.

 

                                                               

                                                               

                                                                 2

Hommes

Nombre

(%)

Femmes

Nombre

(%)

Total

Nombre

(%)

Maladies cérébrovasculaires

19 718

(24,9)

28 810

(30,3)

48 528

(27,8)

Cardiopathies ischémiques

26 724

(33,7)

22 564

(23,7)

49 288

(28,2)

Artérites

Anévrisme de l'aorte

Embolies et thromboses artérielles

5 658

(7,1)

4 781

(5,0)

10 439

(6,0)

Autres maladies de l’appareil circulatoire

27 257

(34,3)

39 032

(41,0)

66 289

(38,0)

Total

79 357

(100)

95 187

(100)

174 544

(100)

Tableau I : Mortalité par maladies de l’appareil circulatoire, France 1990

 

La part des maladies cardio-vasculaires parmi l'ensemble des décès varie considérablement avec l'âge : très faible chez les sujets jeunes, elle augmente régulièrement pour atteindre un niveau très élevé chez les personnes âgées où ces maladies sont responsables de près d'un décès sur deux.

Cependant, si les maladies cardio-vasculaires sont la principale cause de décès aux âges élevés quel que soit le sexe, l'intensité de ces maladies diffère grandement d'un sexe à l'autre à l'âge adulte avec un indice de surmortalité masculine dépassant 3 entre 35 et 64 ans. Pour le sexe masculin, les cardiopathies ischémiques constituent la première cause de décès d'origine circulatoire entre 35 et 75 ans. Pour le sexe féminin, ce sont les maladies cérébrovasculaires qui prédominent quel que soit l'âge sauf entre 55 et 75 ans, mais avec des taux de mortalité qui restent toujours inférieurs aux taux masculins 2.

La mortalité de l'infarctus du myocarde à la phase aiguë est d'environ 30 p. cent avec plus de la moitié des décès survenant avant l'hospitalisation. La survie après hospitalisation s'est nettement améliorée ces deux dernières décennies, mais il existe toujours 5 à 10 p.cent de mortalité dans l'année qui suit l'infarctus.

D'après les données des 3 registres Français MONICA [3], (Bas-Rhin, Haute-Garonne et communauté urbaine de Lille), les taux de mortalité par infarctus du myocarde ont diminué entre 1985 (58,5 pour 105) et 1992 (40,5 pour 105).

1.2.2. Morbidité

L’athérosclérose est également responsable d'une importante morbidité cardiaque (angor, infarctus du myocarde, cardiomyopathie ischémique) et non cardiaque (accidents vasculaires cérébraux, maladie vasculaire périphérique).

L'infarctus du myocarde est une des causes les plus fréquentes d'hospitalisation dans les pays occidentaux. Il y a en France environ 110 000 infarctus par an dont 40 pour cent surviennent chez des sujets âgés de moins de 65 ans et 160 000 hospitalisations pour insuffisance coronarienne aiguë. Chez les survivants d'infarctus du myocarde, il existe un risque augmenté de mortalité et de récidive.

D'après les données des registres Français MONICA l'incidence des infarctus du myocarde a diminué également entre 1985 (113 pour 105) et 1992 (104 pour 105).

La baisse de mortalité et de morbidité constatée dans notre pays peut correspondre à plusieurs phénomènes : baisse de l'incidence, baisse de la létalité globale des événements ischémiques ou de la létalité hospitalière.

Les maladies cardio-vasculaires ne sont donc nullement l'apanage de la vieillesse, ni du sexe masculin et leur retentissement, tant humain (mortalité, morbidité) qu'économique (coût direct et indirect), les situe au premier plan des problèmes de santé publique.

Etant donnée leur forte prévalence, ces maladies, en particulier l'ischémie myocardique, doivent faire l'objet de mesures de prévention [4].

La prévention comporte 2 aspects

          - la prévention primaire, consistant à diminuer l'exposition aux facteurs de risque grâce à des campagnes d'éducation de la population (modification des facteurs d'environnement et de comportement par des conseils diététiques, la lutte contre le tabagisme ...), au dépistage et au traitement des individus à risque élevé d'accident clinique précoce.

          - la prévention secondaire qui consiste à traiter énergiquement (régime et/ou hypolipidémiants) les patients ayant des antécédents de maladie vasculaire afin de prévenir la récidive des accidents cliniques [5].

Afin d'effectuer une prévention efficace, il convient d'identifier les différents facteurs de risque d'athérosclérose.

1.2.3. Détermination des facteurs de risque

Des études cliniques et épidémiologiques ont permis de définir des facteurs de risque associés aux maladies cardio-vasculaire[6] [7] [8] [9] [10], facteurs de risques répartis en 3 groupes:

       - des facteurs cliniques : l'hypertension artérielle, l'obésité, la sédentarité, le tabagisme, le stress, l'âge, le sexe...

       - des facteurs biologiques : les dyslipoprotéinémies athérogènes, le diabète, l'hyperuricémie...

       - des facteurs environnementaux et génétiques, qui rendent certaines personnes plus exposées que d'autres à l'athérosclérose. Ainsi, en ce qui concerne la cardiopathie ischémique, les taux de mortalité aux Etats-Unis sont six fois plus importants que ceux enregistrés au Japon. Parmi les différences culturelles les plus évidentes entre les groupes à fort et à faible risque, on note l'apport calorique total, la part lipidique de l'alimentation ainsi que l'activité physique. Dans les groupes d'individus ayant la même origine ethnique et la même culture, l'hétérogénéité génétique est à l'origine des différences dans la susceptibilité aux maladies cardiovasculaires.

En définitive, les facteurs de risque qui exposent le plus à l'athérosclérose sont l'hypertension artérielle, le tabagisme et les dyslipoprotéinémies, les autres facteurs favorisent la maladie plus qu'ils ne la provoquent.

Les données actuelles tendent même à considérer que l'hypercholestérolémie constitue le facteur de risque le plus important car directement impliquée dans l'initiation des lésions pathologiques [11] [12].

L'aggravation des lésions résulterait de l’interaction entre des facteurs génétiques (hypercholestérolémie familiale, par exemple) et des facteurs d’environnement
(alimentation, tabagisme...)
8.

1.2.4. Rôle des dyslipoprotéinémies

La relation causale entre cholestérolémie et maladie coronarienne a été établie par de très nombreuses études, génétiques, d'expérimentation animale, épidémiologiques et d'intervention dont les résultats sont en bonne concordance.

       - Arguments génétiques

Le développement d'une athérosclérose sévère peut résulter d'une hypercholestérolémie isolée. C'est le cas des enfants atteints d'hypercholestérolémie familiale homozygote qui font des infarctus dans l'enfance et dont l'espérance de vie est très diminuée en l'absence de traitement.

La forme hétérozygote de cette maladie, aboutit à des hypercholestérolémies moins sévères, et les complications cliniques surviennent chez l'adulte jeune [13].

       - Arguments expérimentaux

Diverses espèces animales, soumises à un régime riche en graisses qui augmente leur cholestérolémie, développent des lésions d'athérosclérose qui régressent lorsque la cholestérolémie est abaissée pendant un temps suffisant.

       - Arguments épidémiologiques

La comparaison de différentes populations à travers le monde révèle une relation directe entre cholestérolémie et prévalence des maladies cardio-vasculaires.

En effet, il n'a pas été rapporté de population ayant un taux élevé de maladies cardiaques et une cholestérolémie moyenne faible [14].

Au Japon où l'hypercholestérolémie est rare, mais où le tabagisme et l'hypertension artérielle sont largement prévalant, il existe très peu de maladie coronarienne. En revanche, les Japonais ayant émigré aux USA et adopté le régime alimentaire de ce pays voient leur cholestérolémie et la fréquence des infarctus du myocarde augmenter et rejoindre celles des Américains de souche [15]. Les différences de morbidité constatées sont liées à des facteurs d'environnement (principalement les habitudes alimentaires) et non à des différences ethniques.

Cette observation montre que les populations soumises à un régime pauvre en graisses, ont moins d'athérosclérose.

Comme l'a montré la Bogalusa Heart Study il existe une relation positive entre, d’une part les concentrations de cholestérol total et de cholestérol des LDL et l’étendue des stries lipidiques sur l’aorte, d’autre part entre les concentrations de cholestérol total, de cholestérol des LDL et des VLDL et l’étendue des stries lipidiques sur les artères coronaires des sujets jeunes [16].

De plus, les études cliniques et épidémiologiques ont montré que les autres facteurs de risque (hypertension, tabagisme, diabète ...) sont moins athérogènes en l’absence d’hypercholestérolémie [17].

Les études prospectives comme celle de Framingham ont conclu que la cholestérolémie a un pouvoir prédictif de maladie coronarienne future chez les sujets en bonne santé 8 11.

       - Arguments tirés des études cliniques

Ils sont basés sur l'exploitation de résultats d'études ciblées, aussi bien que sur ceux obtenus après des campagnes de prévention organisées au plan national.

Les résultats des expérimentations cliniques et ceux des études de cohorte montrent de fortes similitudes dans la relation à la fois quantitative et qualitative entre cholestérolémie et risque de maladie cardio-vasculaire.

Ainsi, le pourcentage de réduction des maladies cardiovasculaires observé dans les essais cliniques, est proportionnel à la diminution de la cholestérolémie et correspond à ce qu'on peut prédire à partir des études de population. De plus la relation cholestérolémie versus risque est continue, dans tous les types de population ou groupes de patients étudiés[18] [19].

Ces résultats ont incité de nombreux pays à réagir face à l'ampleur du problème de santé publique que posent les maladies cardiovasculaires. Ils ont organisé :

  •        des conférence de consensus destinées à établir des normes et des stratégies de prévention :

                   - Conférence de consensus du National Institute of Health (USA), qui la première en 1985, a recommandé une campagne de traitement diététique et/ou médicamenteuse des hyperlipoprotéinémies [20]

                   - Consensus de la Société Européenne d'Athérosclérose [21]

                   - Consensus Français de l'Arcol (Comité Français de Coordination des Recherches sur l'Athérosclérose et le Cholestérol) [22]

  •        des campagnes d'information de la population générale :

                   - Le National Cholesterol Education Program (NCEP) mené aux USA est à l'origine d'une importante diminution de la mortalité et de la morbidité due aux maladies cardiovasculaires dans ce pays [23].

                   - L'ARCOL a participé à la campagne de la Fédération Française de Cardiologie (1989) : " Connaissez-vous votre taux de cholestérol ? "

  •        de nombreuses études de prévention primaire et secondaire et plus récemment des études de régression de l'athérosclérose.

L'analyse des résultats de quelques études d'intervention (mesures diététiques et/ou médicamenteuses) montre que la réduction de mortalité coronarienne est d'autant plus forte que la diminution de la cholestérolémie a été importante 4  (Tableau II).

Une diminution de 1 pour cent de la cholestérolémie entraîne une diminution de 2 à 2,5 pour cent de la probabilité de survenue d'un infarctus du myocarde.

 

 

 

 

Cholestérolémie

Résultat : diminution relative (%)

(Traités / Témoins)

 

Réf.

Durée moyenne du suivi :

années

Initiale

g / l

(mmol/l)

Diminution

(%)

Mortalité coronarienne

Mortalité + morbidité coronarienne

Mortalité

totale

1

[24]

5,3

2,62

- 9

- 11

- 17

+ 25

2

[25]

6

2,62

- 16

- 50

- 66

 

3

41

7

2,54

- 7

- 4

 

+ 2

4

[26]

4

2,32

- 1

- 21

- 24,5

- 17,5

5

[27]

5

2,70

- 10

- 18

- 34

+ 6

6

[28]

5,4

2,61

- 25

- 41

- 37

- 29

7

[29]

4,9

2,72

- 20

- 28

- 31

- 22

 

Tableau II : Résultats d’études d’intervention sur la cholestérolémie
(diététique et / ou médicaments)

 

Plusieurs études artériographiques ont montré qu'une diminution significative des taux de cholestérol total et de cholestérol des LDL, est associée à une diminution de l'apparition de nouvelles lésions, un ralentissement de la progression et même une régression des lésions existantes[30] [31] [32] [33] [34].

On constate cependant, qu'à facteurs de risque connus équivalents, il existe une grande hétérogénéité dans la diffusion et le type des lésions d'athérosclérose.

Par exemple, parmi les patients atteints d'hypercholestérolémie familiale, pour un même phénotype (cholestérolémie) et un génotype identique (anomalie responsable du dysfonctionnement du récepteur des LDL), il existe entre les individus une grande variabilité dans la précocité et la sévérité des lésions coronaires et des accidents qu'elles occasionnent [35].

L'analyse des diverses études cliniques permettent de conclure que :

          - l'hypercholestérolémie joue un rôle primordial dans la genèse des maladies coronariennes et confirme son statut de facteur de risque indépendant,

          - la baisse de la cholestérolémie entraîne une diminution significative du risque de survenue d'un infarctus du myocarde,

          - d'autres facteurs lipidiques doivent intervenir pour expliquer l'hétérogénéité clinique des maladies cardiovasculaires. Un de ces facteurs lipidiques pourrait être la lipoprotéine (a) ainsi que le suggèrent plusieurs études récentes.

La lipoprotéine (a) [Lp(a)], découverte en 1963 [36] et très étudiée depuis est une lipoprotéine particulière et indépendante des autres tant sur le plan structural que métabolique et pathogénique. De structure proche des lipoprotéines de faible densité (LDL), elle est reconnue comme un facteur de risque indépendant de la maladie athéroscléreuse. De plus la nature et les propriétés de son constituant caractéristique qu'est l'apolipoprotéine (a) en font un lien entre l'athérosclérose et la thrombose. Elle pourrait avoir une meilleure valeur prédictive que les autres paramètres lipoprotéiniques. Ainsi pour Durrington, la plus grande part de la composante génétique de l'ischémie myocardique non explicable par les lipoprotéines à apo B ou par les autres facteurs de risque, serait imputable à la Lp(a) [37].

Cette lipoprotéine reste déroutante en particulier à cause :

       - de la relative stabilité de sa concentration tout au long de la vie,

       - de l'inefficacité des mesures diététiques et thérapeutiques à faire baisser sa concentration,

       - de sa fonction physiologique ainsi que des mécanismes pathogéniques encore incertains des concentrations élevées.

En conclusion, à la lumière des différentes études sur les maladies cardiovasculaires, les lipides occupent une place prépondérante dans la genèse de la maladie. Aussi, afin d'expliciter leurs différents points d'impact, nous allons rappeler le métabolisme des lipides.

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1.3. Importance biologique des lipides

1.3.1. Définition

Les lipides, également appelés graisses, sont des substances organiques hétérogènes définies par leur insolubilité dans l'eau et leur solubilité dans les solvants organiques. Toutefois certains d'entre eux, les triglycérides constitués d'acides gras à chaîne courte et moyenne (inférieure à 12 atomes de carbone), sont hydrosolubles.

Les lipides sont formés d'acides gras (élément structural commun) unis à d'autres molécules telles que glycérol, cholestérol, et certains alcools particuliers.

1.3.2. Importance nutritionnelle

Les lipides sont des constituants indispensables du régime alimentaire du fait, d'une part de leur grande valeur énergétique, d'autre part de leur association avec les vitamines liposolubles (A,D,E,K) et les acides gras essentiels (parfois appelés vitamine F).

1.3.3. Importance physiologique

Du point de vue physiologique, les lipides ont des rôles métaboliques variés permettant de les classer en lipides de réserve, lipides de structure, et lipides à activité métabolique

1.3.3.1. Lipides de réserve

Leur quantité dans l'organisme varie avec l'état nutritionnel. Ils sont présents en faible quantité dans presque toutes les cellules mais sont particulièrement abondants dans des cellules spécialisées appelées adipocytes.

Constitués à plus de 95 p. cent par des triglycérides, les lipides de réserve représentent principalement une réserve d'acides gras mais aussi d'autres substances liposolubles, aussi bien chez les animaux que chez les végétaux.

1.3.3.2. Lipides de structure

Ils représentent environ 10 p. cent du poids sec de l'organisme et ce taux est constant quel que soit l'état nutritionnel. Ces lipides font partie intégrante des structures cellulaires. Leur grande affinité pour les protéines explique leur localisation préférentielle dans les membranes cellulaires où ils assurent, outre un rôle structural, des fonctions physiologiques importantes.

Leur composition chimique est très variable (phospholipides, esters de cholestérol) et ils sont qualifiés de "complexes" par opposition aux lipides de réserve dits "simples" [38]

1.3.3.3. Lipides à activité métabolique

En plus de leur rôle énergétique et structural, les lipides ont un rôle fonctionnel important dans la synthèse des eicosanoïdes (prostaglandines et leucotriènes), des diacylglycérols et inositol-phosphate (messagers hormonaux) et des hormones stéroïdes.

1.3.3.4. Lipides circulants

Les lipides circulent dans l'organisme sous forme d'associations complexes entre les composés lipidiques (cholestérol, triglycérides, phospholipides) et diverses protéines, les apolipoprotéines.

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1.4. Les lipides circulants et le concept de lipoprotéine

1.4.1. Les lipides circulants

Ils sont constitués essentiellement de cholestérol, de triglycérides et de phospholipides (Figure 1). Les principaux lipides impliqués dans l'athérosclérose sont le cholestérol et les triglycérides. Les phospholipides sont des éléments structuraux très importants des lipoprotéines mais ils n'interviennent pas directement dans les complications des dyslipoprotéinémies athérogènes [39].

1.4.1.1. Le cholestérol

Il circule pour deux tiers sous forme estérifiée par des acides gras et pour un tiers sous forme libre, seule forme facilement échangeable entre les lipoprotéines circulantes et les membranes cellulaires.

Chez l'homme, le cholestérol circulant a une origine principalement endogène mais le taux de synthèse semble modulable par certains facteurs exogènes tels que le régime alimentaire, en particulier la composition en acides gras des divers aliments. Environ 30 pour cent du cholestérol circulant est lié à l'alimentation, la composition des graisses consommées intervenant plus que la quantité ingérée.

La nature des protéines alimentaires influence aussi la cholestérolémie. Par exemple, le remplacement des protéines animales par des protéines de soja est associé à une diminution de 20 pour cent de la cholestérolémie chez le sujet normolipidémique et encore plus chez l'hypercholestérolémique [40]

La synthèse du cholestérol, possible dans toutes les cellules est surtout active dans les hépatocytes et les entérocytes. Sa seule voie catabolique est la transformation en acides biliaires qui a lieu au niveau du foie.

Les valeurs usuelles de la cholestérolémie sont comprises entre 4,40 et 5,20 mmol/l (1,70-2,00 g/l)

Les études épidémiologiques ont montré qu'en dessous de 4,40 mmol/l il n'y a pas d'atteinte coronarienne et qu'à partir de 5,20 mmol/l le risque vasculaire apparaît et augmente de manière exponentielle avec la cholestérolémie.

Par exemple, entre 5,20 et 6,70 mmol/l, le risque de décès par infarctus du myocarde double [41].

1.4.1.2. Les triglycérides

Les triglycérides circulants proviennent de 2 sources : l'intestin qui absorbe les graisses alimentaires, surtout constituées de triglycérides et le foie qui synthétise des triglycérides, à partir des nutriments absorbés en période post-prandiale et à partir des lipides de réserve en période de jeûne.

Comme pour le cholestérol l'influence du régime alimentaire sur la triglycéridémie est importante. Les acides gras polyinsaturés de la série w3, abondants dans les poissons gras, diminuent la triglycéridémie (et la cholestérolémie), par le biais d'une diminution de la synthèse hépatique de VLDL. Si le régime alimentaire est pauvre en graisses et riche en hydrates de carbone, les concentrations de triglycérides et de VLDL augmentent, à la fois chez les sujets normolipidémiques et chez les hypertriglycéridémiques car le foie synthétise davantage de VLDL, et celles-ci sont plus riches en triglycérides que les VLDL normales.

Les valeurs usuelles de la triglycéridémie sont comprises entre 0,50 et 1,70 mmol/l (0,45-1,50 g/l). Le rôle athérogène des triglycérides semble indirect :

- l'augmentation de leur concentration plasmatique est le plus souvent associée à une diminution de celle des HDL anti-athérogènes.

- l'hypertriglycéridémie est associée à des effets délétères non athérogènes mais suspectés d'intervenir dans la pathogénie des maladies cardio-vasculaires.

1.4.1.3. Les phospholipides

Les phospholipides interviennent dans les propriétés physico-chimiques des lipoprotéines et des membranes cellulaires. Ils sont également les précurseurs de nombreux messagers intra et intercellulaires, impliqués dans des phénomènes aussi différents que la réponse aux stimulations hormonales, l'inflammation, l'agrégation plaquettaire. Leur métabolisme, très complexe et mal connu, se déroule dans le foie, l'intestin et le plasma [42].

Figure 1 : Formules du cholestérol libre et estérifié, des triglycérides, des phospholipides (lécithine), et des acides gras

 

Figure 1 : Formules du cholestérol libre et estérifié, des triglycérides,
des phospholipides (lécithine), et des acides gras

 

1.4.1.4. Les acides gras non estérifiés

Présents dans le plasma en faible concentration (0,13-0,45 mmol/l) ils sont transportés par l'albumine et captés au niveau de nombreux tissus utilisateurs (foie, muscles, cœur). En dépit de leur faible concentration plasmatique, ils représentent une part importante du flux des lipides transportés dans le plasma car leur temps de renouvellement est de l'ordre de 2 minutes. Leur concentration plasmatique dépend de l'intensité des réactions métaboliques, lipidiques et glucidiques, du tissu adipeux qui est leur principal lieu de synthèse.

Les acides gras libérés par le tissu adipeux sous l'action des hormones lipolytiques (catécholamines, glucagon, hormone de croissance) fournissent une part importante de l'énergie consommée par l'organisme.

Le foie synthétise des acides gras mais utilise aussi les acides gras libres non estérifiés, captés après interaction avec l'albumine ou provenant des lipoprotéines captées par endocytose par les cellules hépatiques : résidus de chylomicrons ou de VLDL et sans doute HDL. Les acides gras sont interconvertis en d'autres acides gras puis réincorporés dans les phospholipides, les triglycérides et les esters de cholestérol des lipoprotéines avant d'être à nouveau sécrétés dans les HDL et les VLDL 42.

En plus du rôle de rétrocontrôle de leur propre biosynthèse, les acides gras non estérifiés sont, dans le foie, des stimulants de la formation des lipoprotéines circulantes et de la biosynthèse du cholestérol. Ils stimulent aussi la néoglucogenèse. Dans le plasma, ils freinent l'activité de la lipoprotéine-lipase [43].

1.4.2. Le concept de lipoprotéine

Les graisses alimentaires absorbées par l'intestin et les lipides endogènes synthétisés par le foie et le tissu adipeux doivent être transportés dans la circulation puis délivrés aux divers tissus et organes pour utilisation ou mise en réserve.

Le concept actuel de "lipoprotéine", en tant que système physico-chimique d'interaction "lipides-protéines" résulte des travaux de Macheboeuf qui a montré que les lipides, insolubles dans l'eau, ne peuvent être transportés dans le plasma que grâce à leur association avec une ou plusieurs protéines spécifiques, différentes de l'albumine et des globulines [44]. Ces protéines spécifiques sont appelées apolipoprotéines ou apoprotéines (apo: sur, à côté de).

Ainsi les lipoprotéines plasmatiques constituent un système de macromolécules complexes résultant de l'association de protéines spécifiques et de différents lipides, ce qui permet à ces derniers d'être véhiculés dans la circulation sous forme soluble [45].

Le rôle physiologique principal des lipoprotéines circulantes est d'assurer le transport et la distribution des lipides exogènes et endogènes et des substances liposolubles entre les différents tissus impliqués dans leur métabolisme.

Les lipoprotéines plasmatiques comprennent plusieurs familles de lipoprotéines différentes, qui ont une composition lipidique et apoprotéique variable, tant qualitativement que quantitativement (Tableau III, Tableau IV). Cette variabilité confère d'importantes différences fonctionnelles à leurs constituants lipidiques. Ainsi, une cholestérolémie totale donnée n'a pas la même signification selon les lipoprotéines qui transportent ce cholestérol.

Elles possèdent néanmoins une structure générale commune (Figure 2).

                                  [46]

Chylomicrons

VLDL

LDL

HDL

Protéines

1-2 *

6-10

18-22

45-55

Lipides

98-99

90-94

78-82

45-65

Triglycérides

85-95

50-65

4-8

2-7

Cholestérol estérifié

2-4

16-22

45-50

15-20

Cholestérol libre

1-3

4-8

6-8

3-5

Phospholipides

3-6

15-20

18-24

26-32

* (pour cent de la masse totale de lipoprotéine)

Tableau III : Composition chimique des lipoprotéines plasmatiques

 

 

[47]

Apoprotéines

(% de la masse totale de lipoprotéine)

Différentes apoprotéines

(% d’apoprotéines totales)

Apoprotéines majeures           Apoprotéines mineures

 

Chylomicrons

2-4

B-48 (20), C (66), A-I

A-II, E, A-IV

VLDL

6-10

B-100 (37), C (50), E

A-I, A-II

LDL

18-22

B-100 (96)

C, D, E

HDL

45-55

A-I (46-65), A-II (10-23),

C(10-12)

E, D

       

Tableau IV : Composition en apoprotéines des principales lipoprotéines plasmatiques

 

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1.5. Structure et classification des lipoprotéines circulantes

1.5.1. Structure générale des lipoprotéines

La plupart des lipoprotéines circulantes ont une structure sphérique dans laquelle on distingue une partie centrale plus ou moins volumineuse, entourée d'une couche périphérique. Le noyau central comprend les lipides apolaires, strictement insolubles dans l'eau : triglycérides et cholestérol estérifié. La couche périphérique est constituée par les lipides polaires assemblés en une monocouche de phospholipides dans laquelle s'insèrent des molécules de cholestérol non estérifié et par les apolipoprotéines liées de façon non covalente aux lipides (Figure 2).

La cohésion interne de l'édifice lipoprotéinique est assurée par des liaisons hydrophobes entre les chaînes aliphatiques des acides gras des lipides et les chaînes aliphatiques des acides aminés apolaires des protéines ainsi que par des liaisons ioniques entre les groupes polaires des régions hélicoïdales des apoprotéines et ceux des phospholipides adjacents.

Deux propriétés méritent d'être soulignées car elles ont des implications physiologiques importantes :

       - la couche périphérique des lipoprotéines a une structure qui ressemble à celle des membranes plasmiques des cellules.

       - les apoprotéines peuvent être séparées en 2 catégories, les apoprotéines structurales intégrées dans la couche périphérique et ne pouvant la quitter, et les apoprotéines libres, faiblement liées qui font l'objet d'échanges entre lipoprotéines.

Figure 2 : Structure générale des lipoprotéines

Figure 2 : Structure générale des lipoprotéines

Les différentes familles de lipoprotéines plasmatiques partagent ces caractères structuraux (sauf les HDL naissantes) mais diffèrent nettement entre elles quant à leur métabolisme et leur rôle physiologique.

En effet, entre leur synthèse et leur catabolisme, elles font l'objet d'échanges de constituants lipidiques et apoprotéiques, entre elles et avec les tissus, et subissent ainsi des remaniements permanents.

Les apoprotéines jouent un rôle essentiel dans le métabolisme des lipoprotéines et on dit parfois qu'elles constituent la partie "intelligente" des lipoprotéines (Tableau VIII). Elles conditionnent en effet :

       - la formation des lipoprotéines (rôle structural)

       - les interactions des lipoprotéines avec leurs récepteurs cellulaires

       - la régulation de l'activité d'enzymes impliquées dans leur métabolisme.

1.5.2. Classification et nomenclature des lipoprotéines

La classification des lipoprotéines, encore actuellement universellement utilisée en biologie clinique est basée sur 2 propriétés physiques :

       - la charge électrique : les lipoprotéines ont une charge électrique variable selon leur composition protéique.

       - la densité hydratée : les lipoprotéines ont une densité hydratée qui varie principalement avec leur richesse relative en lipides.

1.5.2.1. Classification selon la mobilité électrophorétique

Les lipides polaires et les apoprotéines de la couche périphérique confèrent aux lipoprotéines une charge électrique permettant leur séparation lorsqu'un échantillon de sérum est soumis à l'action d'un champ électrique.

La première classification des lipoprotéines a été proposée par Blix et al [48] qui montrèrent que les lipides d'un plasma normal ont une migration électrophorétique équivalente à celle des a1 et β globulines sur support de papier.

Puis l'emploi d'autres supports (papier avec tampon albumineux, gel d'agarose) permit de mettre en évidence la présence de lipoprotéines au niveau du dépôt et en position a2 (pré-bêta).

L'électrophorèse de zone a été la première technique permettant une classification des lipoprotéines plasmatiques en 4 fractions nommées :

       - chylomicrons, lipoprotéines ne migrant pas

       - bêta lipoprotéines, de mobilité comparable à celle des bêta globulines

       - prébêta lipoprotéines, de mobilité comparable à celle des alpha 2 globulines

       - alpha lipoprotéines, de mobilité comparable à celle des alpha 1 globulines

La séparation électrophorétique des lipoprotéines plasmatiques est facile à mettre en oeuvre et couramment utilisée en biologie clinique pour typer les dyslipoprotéinémies [49].

1.5.2.2. Classification selon la densité hydratée

Du fait de leur constituants lipidiques, les lipoprotéines ont une densité hydratée inférieure à celle des protéines, et variable selon les fractions. Cette propriété permet de les séparer des protéines et entre elles par ultra centrifugation de flottation.

Dans les années cinquante il est montré que les lipoprotéines plasmatiques sont distribuées de façon continue dans une zone de densité comprise entre 0,920 et 1,210. L'ultra centrifugation séquentielle à des densités fixes permet de séparer 4 classes majeures de lipoprotéines [50] :

       - Chylomicrons, densité < 0,94

       - Very Low Density Lipoprotein (VLDL), 0,94 < densité < 1,006

       - Low Density Lipoprotein (LDL), 1,006 < densité < 1,063

       - High Density Lipoprotein (HDL), densité > 1,063 (Tableau. VI).

Des études ultérieures, toujours basées sur l'ultracentrifugation, ont démontré l'existence de sous-classes différant par de très faibles variations de densité au sein des groupes majeurs HDL et LDL. Ceci révéla l'hétérogénéité des lipoprotéines, qui fut confirmée par d'autres techniques de séparation comme l'isoélectrofocalisation, qui a permis de révéler une dizaine de sous-classes au sein des alphalipoprotéines.

C'est la variation relative et absolue des constituants lipidiques et le rapport lipides / protéines qui est à l'origine de l'hétérogénéité de densité des classes de lipoprotéines (Tableau V).

 

     74

Chylomicrons

VLDL

LDL

HDL

Protéines

1-2 *

6-10

18-22

45-55

Lipides

98-99

90-94

78-82

45-65

Densité hydratée g/ml

< 0.94

0.94 - 1.006

1.006 - 1.063

1.063 - 1.21

            (* pour cent de la masse totale de lipoprotéine)

Tableau V : Composition et densité hydratée des lipoprotéines plasmatiques

L'ultra centrifugation est considérée comme la méthode de référence pour la séparation et l'étude des différents classes de lipoprotéines. En effet, les connaissances actuelles du métabolisme des lipoprotéines plasmatiques sont essentiellement fondées sur ce concept de classe de densité [51]. L'intérêt de cette classification a été renforcé par les études cliniques qui ont permis de relier des anomalies de transport des lipides à telle ou telle classe de lipoprotéine de densité particulière. Mais il s'agit d'une technique longue, onéreuse et délicate surtout utilisée dans les laboratoires de recherche.

Au laboratoire de biologie clinique, on utilise plutôt l'électrophorèse pour séparer les lipoprotéines : cette technique plus rapide que l'ultracentrifugation, se prête bien à des déterminations en série. C'est pourquoi de nombreux auteurs ont fait correspondre les classes de densité avec les fractions obtenues par électrophorèse.

Ainsi les chylomicrons correspondent aux lipoprotéines ne migrant pas, les VLDL correspondent aux prébêta lipoprotéines, les LDL correspondent aux bêta lipoprotéines et les HDL correspondent aux alphalipoprotéines (Tableau VI).

En réalité ces classes de lipoprotéines présentent un certain nombre de propriétés communes mais ne sont pas identiques. On sait par exemple que les HDL ne sont pas strictement équivalentes aux a lipoprotéines et qu'il peut exister des VLDL migrant en position b, position assignée aux LDL.

Enfin, sur gel d'agarose simple, la lipoprotéine (a) migre dans une zone très proche des VLDL voire confondue avec elles.

1.5.2.3. Séparation en fonction de la taille

La chromatographie de gel filtration, l'électrophorèse en gel de polyacrylamide permettent de séparer les lipoprotéines selon leur taille.

Grâce à ces techniques, les lipoprotéines peuvent être définies par leur diamètre apparent, établi par rapport à celui de protéines globulaires de référence.

On obtient 4 classes principales qui correspondent approximativement aux classes séparées par ultra centrifugation.

       - une fraction de très grande taille, 100 à 1000 nm correspondant aux chylomicrons

       - entre 30 et 70 nm sont trouvées les VLDL

       - entre 18 et 25 nm on trouve les LDL

       - les plus petites lipoprotéines, correspondant aux HDL, peuvent être séparées en 2 sous-fractions de caractéristiques voisines, les HDL2 de diamètre 10 à 13 nm et les HDL3 de diamètre 7 à 10 nm.

Ceci a permis de montrer qu'il existe une relation inverse entre la taille et la densité des lipoprotéines (Tableau VI).

Dans la zone 25 à 30 nm, existent des lipoprotéines mineures au moins dans les sérums normaux. c'est dans cette zone que l'on trouve la Lp(a) de diamètre voisin de 28 nm. Il est à remarquer que la règle de relation inverse entre taille et densité n'est pas respectée pour cette lipoprotéine puisqu'elle se situe dans un domaine de densité compris entre 1,050 et 1,120.

 

                            [52]

Chylomicrons

VLDL

LDL

HDL

Densité hydratée (g/l)

< 0,96

0,96 - 1,006

1,006 - 1,063

1,063 - 1,21

Poids Moléculaire moyen (dalton)

5,0.109

7,5.106

2,5.106

0,39.106

Mobilité électrophorétique

origine

pré-bêta

bêta

alpha

Diamètre (nm)

100 - 1000

30 - 80

17 - 25

7 - 15

Tableau VI : Propriétés physiques des lipoprotéines

Ces différentes techniques de séparation des lipoprotéines, basées sur leurs propriétés physiques ont révélé l'importante hétérogénéité de ce système de macromolécules et la difficulté d'un classement rigoureux.

La séparation par classes de densité considérait la partie lipidique des lipoprotéines comme principale responsable de l'hétérogénéité. La reconnaissance du rôle des lipides dans l'athérosclérose et le développement de travaux indiquant une possible relation métabolique entre les classes majeures de lipoprotéines ont polarisé l'intérêt sur la partie lipidique, négligeant l'importance de la partie protéique pourtant principale responsable de la stabilité structurale et de la spécificité fonctionnelle des lipoprotéines (Tableau VIII). C'est pourquoi il a été proposé une classification des lipoprotéines basée sur leur composition en apoprotéines.

1.5.2.4.Classification en fonction de la composition en apoprotéines

De nombreux travaux ont mis en évidence que les principales classes de densité ou zones de migration électrophorétique comprennent plusieurs espèces de lipoprotéines qui diffèrent, non seulement par la composition en lipides mais aussi par la nature et la concentration en apoprotéines. Ceci a conduit Alaupovic à proposer l'utilisation des apoprotéines comme marqueur spécifique pour la définition, et la classification des lipoprotéines plasmatiques. Les lipoprotéines sont nommées d'après leur composition en apoprotéines [53]. Les lipoprotéines qui contiennent une seule apoprotéine sont appelées lipoprotéines simples, celles qui en contiennent deux ou plus sont appelées lipoprotéines complexes.

 

Lipoprotéines simples

Lipoprotéines complexes

Lp - A I

Lp - A II

 

Lp - B

Lp - C III

Lp - E

Lp - A I : A II

Lp - A I : E

Lp - A I : C III : C II : C I

Lp - B : E

Lp - B : C III : C II : C I

Lp - B : C III : E : C II : C I

Lp - B : (a)

Tableau VII : Exemples de lipoprotéines simples et complexes

Ce concept de classification reconnaît aux apoprotéines un rôle essentiel et la composition en lipoprotéines du plasma peut être considérée comme un état d'équilibre reflétant l'ensemble des réactions métaboliques de tous les composants du système (Tableau VII). Toute perturbation du métabolisme lipidique entraînera un déséquilibre de leur distribution.

Ce concept de lipoparticules a des implications importantes dans l'exploration du métabolisme des lipoprotéines. A titre d'exemple, il a été montré qu'il existe au sein des HDL, au moins 2 types de particules lipoprotéiques contenant l'apoprotéine A I, la Lp AI : AII et la Lp AI, qui ont des origines et des fonctions métaboliques distinctes [54] .

Ce nouveau concept devrait permettre de mieux comprendre et explorer les phénomènes impliqués dans l'athérosclérose.

 

53

Apo-protéines

Présence dans les classes (p.cent)

Concentration plasmatique g /l.

PM moyen X 103

Lieu de synthèse

Rôle métabolique

A-I

Chylomicrons

HDL

(87%)

1,1 - 1,7

28,3

Foie

Cofacteur indispensable à l’activation de la LCAT.

Stucture des HDL

Ligand pour le récepteur des HDL

A-II

Chylomicrons

HDL

(89%)

0,4 - 0,6

17,5

Intestin

Cofacteur de la lipase hépatique

Structure des HDL

A-IV

Chylomicrons

 

0,16

46

Intestin

Peut-être impliquée dans les transferts de lipides

 entre lipoprotéines.

(a)

Lp(a)

(100%)

0 - 2,5

280 - 800 (isoformes)

Foie

Non connu avec certitude

B-48

Chylomicrons et ses remnants

(100%)

absente à jeun

264

Intestin

Transport des lipides alimentaires par la synthèse

des chylomicrons

Structure des chylomicrons

B-100

LDL

VLDL

(87%)

0,6 - 1,2

549

Foie

Structure des VLDL, LDL, Lp(a)

Liaison aux récepteurs des LDL

C-I,

C-II,

et C-III

Chylomicrons

VLDL

HDL

LDL

 

(25%)

(56%)

(traces)

C-I: 0,04-0,06

C-II: 0,03-0,05

C-III: 0,12-0,14

6,3

8,8

8,8

Foie

C-I: Régule l'activité de la LCAT

C-II:Cofacteur de l'activation de la lipoprotéine lipase

C-III: Inhibiteur de la lipoprotéine lipase

D

HDL

(64%)

0,10

22

 ?

Transfert des lipides entre lipoprotéines

E

Chylomicrons

VLDL

LDL

HDL

 

 (27%)

(traces)

(37%)

0,025 - 0,050

34

Foie

Ligand pour le récepteur cellulaire des LDL

et pour le récepteur hépatique des remnants

de chylomicrons et de VLDL

Tableau VIII : Propriétés et fonctions métaboliques des apoprotéines plasmatiques

 

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1.6. Rappels du métabolisme normal des lipoprotéines

Le métabolisme des lipoprotéines est un processus complexe impliquant de nombreuses réactions qui contrôlent la synthèse des lipides et des apoprotéines, l'assemblage et la sécrétion des lipoprotéines, leur catabolisme total ou partiel dans la circulation et leur utilisation au niveau des tissus 47 [55] [56].

L'ensemble de ces réactions métaboliques dépend de l'intégrité structurale et fonctionnelle des apoprotéines, des récepteurs cellulaires des lipoprotéines, des enzymes lipolytiques et des protéines de transfert qui agissent de concert pour réguler l'homéostasie du cholestérol et des triglycérides.

De nombreux tissus interagissent avec les lipoprotéines. Les glandes surrénales et les gonades assimilent activement le cholestérol pour la production des hormones stéroïdes, de même les cellules des villosités intestinales en division pour la synthèse de leurs membranes. Les tissus métaboliquement actifs comme le muscle squelettique utilisent les triglycérides circulants pour la production d'énergie ou les stockent dans les adipocytes lorsqu'ils sont présents en excès.

Le foie assure la synthèse de 90 p.cent de l'ensemble des lipoprotéines, le restant étant synthétisé par l'intestin. De plus, il secrète des enzymes telles que la lipase hépatique et la "lecithin cholesterol acyl-transferase" (LCAT), ainsi que la "cholesterol-ester transfer protein" (CETP ou protéine de transfert des esters de cholestérol), qui sont indispensables au métabolisme des lipoprotéines.

Les lipides alimentaires, principalement constitués de triglycérides sont absorbés dans les entérocytes au sein desquels ils s'associent à des apoprotéines pour constituer les chylomicrons natifs qui passent dans la lymphe puis dans le sang. Dans la circulation les chylomicrons sont rapidement épurés de 90 p.cent de leurs triglycérides par la lipoprotéine-lipase et libèrent des constituants de surface qui rejoignent le pool des HDL. Les particules résiduelles, appelées remnant de chylomicrons sont rapidement fixées par le foie grâce à un récepteur spécifique de l'apoprotéine E, puis leur catabolisme se poursuit sous l’action de la lipase hépatique.

En dehors des périodes digestives, les VLDL d'origine hépatique remplacent les chylomicrons comme principal transporteur de triglycérides et c'est alors le foie qui domine le métabolisme des lipoprotéines.

Le transport des lipides endogènes comporte deux circuits opposés.

       - Un circuit "hépatofuge" : le transport du cholestérol et des triglycérides synthétisés par le foie vers les tissus est assuré par les VLDL et leurs produits de transformation, IDL et LDL.

Les LDL transportent les deux tiers du cholestérol circulant qu'elles délivrent aux cellules hépatiques et aux tissus périphériques en se fixant sur un récepteur membranaire spécifique appelé récepteur B-E. Lorsque ces récepteurs sont saturés, une voie d'épuration dite "scavenger" devient prédominante.

       - Un circuit "hépatopète" appelé transport reverse du cholestérol ramenant le cholestérol excédentaire des tissus vers le foie. Ce transport est assuré par les HDL.

Entre ces deux circuits, des échanges de lipides et d'apoprotéines se produisent entre les lipoprotéines circulantes grâce à la LCAT et à la CETP qui participent avec les HDL au retour du cholestérol vers le foie, seul organe capable de le cataboliser et de l'excréter.

Les concentrations circulantes des différentes classes de lipoprotéines représentent la résultante des diverses réactions d'un métabolisme tributaire d'apports alimentaires intermittents.

1.6.1. Absorption, transport et métabolisme des lipides alimentaires.

1.6.1.1. Lipides alimentaires

La ration journalière de lipides ne devrait pas dépasser 75 g par jour, selon les nutritionnistes. Ces lipides sont principalement constitués de triglycérides, le cholestérol et les phospholipides ne représentant que 10 p.cent environ de l'apport quotidien. La nature des acides gras ingérés est très importante : les acides gras saturés constituent un "sur-risque" de maladie cardiovasculaire.

Les recommandations actuelles vont dans le sens d'une augmentation des acides gras mono-insaturés et des acides gras poly-insaturés aux dépens des acides gras saturés, soit en pratique, une diminution des graisses d'origine animale (sauf les poissons) au profit des graisses d'origine végétale et des poissons 43.

1.6.1.2. Métabolisme des chylomicrons

          Synthèse des chylomicrons

Les entérocytes absorbent les produits de la digestion lipidique (acides gras, mono-glycérides, cholestérol libre, lysolécithines) et les utilisent pour synthétiser triglycérides et phospholipides (Figure 3). Ces lipides sont sécrétés après avoir été incorporés dans les chylomicrons, lipoprotéines spécifiquement synthétisées par les entérocytes en période postprandiale [57]. Ces lipoprotéines très volumineuses (100-1000 nm) confèrent au plasma sanguin un aspect opalescent ou lactescent. Leur taille est variable et dépend en partie de la qualité des acides gras alimentaires : plus les acides gras sont saturés, plus les chylomicrons sont de petite taille.

La formation des chylomicrons nécessite la synthèse d'apoprotéine B48, apoprotéine B d'origine intestinale qui diffère de l'apoprotéine B100 hépatique par l'absence du fragment N-terminal, spécifiquement reconnu par les récepteurs B-E des surfaces cellulaires [58]. Les entérocytes synthétisent aussi les apoprotéines A-I, A-II et A-IV qu'ils incorporent dans les chylomicrons.

Les chylomicrons natifs sont sécrétés dans les chylifères des villosités intestinales et parviennent au sang par voie lymphatique, étapes au cours desquelles ils acquièrent des apoprotéines C et E , et du cholestérol estérifié aux dépens des HDL.

Figure 3 : Métabolisme des lipides alimentaires, sort métabolique des chylomicrons

Figure 3 : Métabolisme des lipides alimentaires, sort métabolique des chylomicrons

          Catabolisme intravasculaire des chylomicrons

Les chylomicrons, dont la demi-vie est de l'ordre de 10 minutes, sont rapidement épurés de 90 p.cent de leurs triglycérides par action de la lipoprotéine-lipase (LPL) liée à l'endothélium vasculaire. La présence d'apoprotéine C-II à la surface des chylomicrons est un cofacteur indispensable à l'action de cette enzyme qu'elle lie et active à proximité de son substrat.

Parallèlement à l'hydrolyse des triglycérides, les chylomicrons perdent d'autres constituants puisque 80 p.cent des phospholipides et 40 p.cent des apoprotéines (principalement A-I, A-II et C) sont transférés aux HDL durant leur catabolisme. Cette perte de constituants de surface s'effectue par formation de replis de la couche périphérique des chylomicrons, favorisée par la diminution de volume du coeur de la particule, diminution liée à la perte des triglycérides. Ces replis se détachent des remnants sous forme de HDL naissantes [59].

Le catabolisme des chylomicrons conduit donc à :

                   - des HDL naissantes de forme discoïdale et de densité HDL3 constituées de phospholipides, d'apoprotéines A et C et de cholestérol libre.

                   - des acides gras accompagnés de mono et diglycérides. Ces acides gras fournissent l'énergie aux muscles squelettiques sous forme d'acétyl Co-A ou sont mis en réserve dans le tissu adipeux sous forme de triglycérides.

                   - des remnants de chylomicrons, petites particules de 50 à 10 nm de diamètre (Figure 3). Ces remnants composés de 70 p.cent de triglycérides, 6-7 p.cent de cholestérol libre, 6-7 p.cent de cholestérol estérifié, 6-7 p.cent d'apoprotéines et 11 p.cent de phospholipides ont une composition et une taille proches de celles des VLDL. Toutefois, les remnants issus des petits chylomicrons ont une taille de IDL et sont aussi appelés β-VLDL intestinales.

          Catabolisme hépatique des remnants de chylomicrons

Le foie est responsable de la clairance rapide des remnants de chylomicrons grâce à des récepteurs cellulaires de surface spécifiques de certains domaines de l'apoprotéine E. Captés par endocytose, ces remnants apportent au foie du cholestérol et des triglycérides d'origine alimentaire, source d'acides gras.

Le récepteur B/E ne joue aucun rôle dans ce catabolisme, en effet les remnants de chylomicrons ne s'accumulent pas chez les sujets atteints d'hypercholestérolémie familiale par déficit en récepteurs B-E.

L'apoprotéine E joue un rôle essentiel dans la clairance hépatique des remnants de chylomicrons. Il existe 3 allèles du gène de l'apoprotéine E, appelés e2, e3 et e4, qui aboutissent à 6 phénotypes possibles. Il a été montré que la clairance des remnants de chylomicrons varie selon la nature de l'apoprotéine E : la concentration en remnant de chylomicrons après un repas est la plus élevée chez les sujets E2/E2, la plus faible chez les sujets E4/E3 et E4/E4 et intermédiaire chez les E3/E3.

La clairance des chylomicrons et des remnants de chylomicrons est retardée chez les E2 homozygotes mais pas chez les hétérozygotes.

Les sujets atteints d’hyperlipoprotéinémie de type III expriment l’isoforme mutante E2 et sont caractérisés par un ralentissement important de ce catabolisme par défaut de reconnaissance de l'apoprotéine E par le récepteur [60].

          Régulation du métabolisme des chylomicrons

Le facteur de régulation le plus important de la chylomicronémie (donc de la durée la triglycéridémie post-prandiale) semble être la taille du pool des triglycérides endogènes circulants reflétée par la triglycéridémie à jeun. Plus cette dernière est élevée, plus lente est l'épuration plasmatique des chylomicrons ce qui entraîne une hypertriglycéridémie post-prandiale plus importante. Tout se passe comme si les lipoprotéines riches en triglycérides, qu'elles soient d'origine exogène (chylomicrons) ou endogène (VLDL), étaient en compétition pour les mêmes sites d'élimination. Ainsi, le catabolisme des lipoprotéines riches en triglycérides semble saturable dans les conditions physiologiques [61].

Par conséquent, en pathologie, une hypertriglycéridémie à jeun sera presque toujours associée à une lipémie postprandiale augmentée.

Les principaux facteurs physiologiques de régulation sont :

          - l'âge : le niveau et la durée de l'hypertriglycéridémie postprandiale augmentent avec l'âge.

          - le régime alimentaire : la lipémie postprandiale augmente avec la quantité de graisse ingérée, mais dépend aussi de la nature de ces graisses. La consommation régulière d'huiles de poissons entraîne une diminution de la triglycéridémie à la fois à jeun et postprandiale.

          - les isoformes de l'apoprotéine E.

1.6.2. Métabolisme des triglycérides endogènes et des VLDL

1.6.2.1. Synthèse hépatique des VLDL

Les VLDL sont synthétisées dans le foie sous forme native, à partir des triglycérides endogènes qui en sont le principal constituant, et d'apoprotéines, en particulier l'apoB100; elles sont ensuite excrétées par exocytose dans le sang.

Le foie est capable de synthétiser tous les lipides dont il a besoin mais il utilise préférentiellement les éléments préexistants:

          - en période d'alimentation : glucides, ou acides gras libérés des chylomicrons

          - en période de jeûne : acides gras mobilisés à partir du tissu adipeux.

La synthèse des VLDL est réalisée en continu par les hépatocytes permettant la sécrétion permanente de triglycérides endogènes. Cette synthèse augmente beaucoup après les repas et revient à son niveau de base à jeun.

L'augmentation de synthèse post-prandiale intervient après la synthèse intestinale des chylomicrons. En effet, les acides gras libérés par le catabolisme des chylomicrons sont des substrats pour la lipogenèse hépatique et des stimulants spécifiques de la synthèse des apoprotéines B100 et C qui, associées à des phospholipides choliniques et du cholestérol servent à enrober les triglycérides pour leur permettre de sortir des cellules sous forme de VLDL.

Les VLDL naissantes acquièrent dans la circulation des apoprotéines C-II et E venant des HDL qui leur cèdent également du cholestérol.

A jeun, environ 60 p.cent des triglycérides circulants sont transportés par les VLDL.

Leur taille varie entre 40 et 70 nm, leur composition varie également, principalement selon le régime : un régime riche en cholestérol aboutit à la synthèse de VLDL enrichies en cholestérol. Le foie peut modifier la composition des VLDL naissantes selon la nature et la quantité des précurseurs disponibles.

1.6.2.2. Catabolisme des VLDL

 Elles sont dégradées plus lentement que les chylomicrons, leur demi-vie est de 6 à 12 heures. Leur catabolisme est très semblable à celui des chylomicrons et dépend de l'action de la lipoprotéine-lipase activée par l'apoprotéine C-II (Figure 4).

L'hydrolyse des triglycérides du coeur des VLDL assure un apport régulier d'acides gras aux muscles et au tissu adipeux. Il n'y a pas formation de HDL naissantes comme lors de la lipolyse des chylomicrons mais des transferts de constituants de surface avec les HDL3 (apoprotéines C, cholestérol libre, phopholipides) dont la taille augmente (HDL2).

Il se produit parallèlement, grâce à la CETP, un enrichissement des remnants de VLDL en cholestérol estérifié venant des HDL qui acquièrent en échange des triglycérides. On aboutit ainsi aux IDL, remnants de VLDL plus petites, proportionnellement enrichies en cholestérol estérifié, en apoprotéines B100 et E.

Les IDL (βVLDL hépatiques) ont une durée de vie courte contrairement aux LDL et on ne les retrouve pas dans le sérum d'un sujet normal à jeun.

Une partie des IDL est éliminée du plasma par la voie des récepteurs hépatiques des remnants et des LDL. Moins de la moitié des IDL poursuivent leur catabolisme dans la circulation où elles se transforment en LDL, sous l'action de la lipase hépatique.

Au cours de ce catabolisme, des échanges de constituants conduisent au remplacement d'une partie des triglycérides par des esters de cholestérol, et à la perte de la plupart des apoprotéines C-II et E qui s'associent aux HDL.

Ainsi les LDL représentent les remnants ultimes du catabolisme des VLDL, dont le coeur de triglycérides a été éliminé et où la seule apoprotéine est l'apoprotéine B100.

1.6.2.3. Régulation

La concentration plasmatique des VLDL est fonction des vitesses de synthèse et de catabolisme. Les facteurs qui stimulent la biosynthèse des VLDL sont les acides gras libres, l'alcool, les corticostéroïdes et les glucides alimentaires 47.

Lorsque le débit intra-hépatique des acides gras dépasse les possibilités locales d'utilisation, ces derniers servent à la mise en circulation de triglycérides endogènes sous forme de VLDL. Parmi les facteurs qui influent leur catabolisme, le plus important est le besoin en nutriments énergétiques des cellules musculaires et cardiaques 43.

Le déficit en lipase hépatique ne se traduit pas par une accumulation de VLDL mais seulement d'IDL absentes des plasmas normaux.

Figure 4 : Catabolisme des VLDL, production des LDL

Figure 4 : Catabolisme des VLDL, production des LDL

1.6.3. Métabolisme du cholestérol et des lipoprotéines qui le transportent

1.6.3.1. Importance biologique du cholestérol

Le cholestérol est un constituant essentiel des membranes cellulaires et un précurseur indispensable à la synthèse des hormones stéroïdes et des acides biliaires. L'organisme humain en contient environ 100g très inégalement réparti : le système nerveux central en est très riche (30 à 40 g) mais le renouvelle très lentement à la différence du foie, des cellules sanguines et du plasma qui ne contiennent que 2 à 3 g par kg, se renouvelant rapidement. La biosynthèse du cholestérol est de l'ordre de 1 g par jour et varie avec les besoin des tissus et l'apport alimentaire (ce dernier inhibe la synthèse endogène).

1.6.3.2. Biosynthèse et sécrétion du cholestérol

Lorsque les cellules ont besoin de cholestérol, elles mettent en jeu un premier mécanisme de captation des lipoprotéines plasmatiques LDL ou HDL, en augmentant le nombre de leurs récepteurs spécifiques et en stimulant leur activité d'internalisation.

Ce n'est que lorsque la quantité de cholestérol ainsi apportée est insuffisante que les processus de biosynthèse se déclenchent. Toutes les cellules de l'organisme sont capables de cette synthèse mais c'est l'intestin et surtout le foie qui en synthétisent le plus.

Entièrement cytoplasmique, la synthèse se fait à partir de l'acétyl Co-A provenant des mitochondries. L'Hydroxy-Méthyl-Glutaryl-Coenzyme-A réductase (HMG Co-A réductase) est l'enzyme qui régule la synthèse du cholestérol. Son activité varie en fonction de la concentration intracytoplasmique en cholestérol libre qui influe sur la concentration de l'enzyme et module ainsi son activité (Figure 5).

La biosynthèse du cholestérol est particulièrement sensible à certains facteurs physiologiques : le jeûne, l'apport de cholestérol ou de sels biliaires diminuent nettement sa synthèse hépatique. Au contraire, une alimentation glucidique et surtout l'apport d'acides gras l'augmentent.

Le foie secrète le cholestérol dans le sang et dans la bile qui renferme aussi les produits de dégradation du cholestérol, les acides biliaires. La sécrétion biliaire (1 à 1,5 g par jour) est surtout destinée à favoriser la digestion intestinale des lipides.

Le cholestérol d'origine hépatique est excrété dans le sang incorporé aux lipoprotéines VLDL et HDL.

La teneur en cholestérol des VLDL naissantes dépend de la taille des particules sécrétées : le cholestérol se trouve surtout sous forme libre dans la couche périphérique et associé aux phospholipides, alors que le coeur hydrophobe contient seulement un peu de cholestérol estérifié. Ainsi, plus la particule est volumineuse, plus le rapport cholestérol / triglycéride est faible.

La quantité totale de cholestérol sécrété par le foie dans les VLDL est inférieure à 2 g par jour 43.

Le cholestérol sécrété sous forme de HDL est associé aux phospholipides choliniques en proportions voisines de 1 mole de cholestérol pour 2 moles de phospholipides. Un enrobage d'apoprotéines E et A-I (E/A-I >1) maintient ces particules sous forme de disques. Le cholestérol est ensuite estérifié grâce à la lécithin cholesterol-acyl transférase (LCAT), enzyme sécrétée par le foie et fixée aux HDL contenant apoprotéines A-I et D. L'estérification du cholestérol transforme les HDL discoïdales en HDL sphériques. Compte-tenu du turnover des HDL au niveau du foie, il est difficile d'évaluer la quantité de cholestérol ainsi mise en circulation mais elle est vraisemblablement inférieure à 1g par jour.

Figure 5 : Biosynthèse du cholestérol

Figure 5 : Biosynthèse du cholestérol

 

1.6.3.3. Transport du cholestérol aux tissus par les LDL

Les LDL sont les plus abondantes des lipoprotéines plasmatiques (60 à 70 p.cent) chez l'homme du fait de leur durée de vie de l'ordre de 3 jours. Elles sont le produit du catabolisme des VLDL et ont donc une origine principalement hépatique (Figure 6). Leur composition est la moins variable de toutes les lipoprotéines:

       - le coeur lipidique comprend du cholestérol estérifié (39 p.cent) et des triglycérides (5 à 7 p.cent)

       - la couche périphérique comprend des phospholipides (24 p.cent), du cholestérol libre (9 p.cent) et de l'apoprotéines B100 (21 p.cent).

Elles transportent les deux tiers du cholestérol circulant, principalement sous forme estérifiée.

Les cellules qui ont besoin de cholestérol captent les LDL grâce à des récepteurs membranaires spécifiques des apoprotéines B et E.

1.6.3.4. Catabolisme des LDL et du cholestérol

       Voie du récepteur des LDL ou récepteur B-E

Elle est responsable du catabolisme de plus de 75 p.cent du pool des LDL plasmatiques chez les sujets normaux et comprend les étapes suivantes:

       - fixation des LDL aux récepteurs des LDL de façon spécifique et saturable. Après fixation il se produit un regroupement des récepteurs dans des structures appelées "puits mantelés" (coated pits des Anglo-Saxons) qui formeront des vacuoles mobiles dans la cellule après l'endocytose.

       - intériorisation (internalisation) de l'ensemble "LDL- récepteur des LDL". Les vacuoles se déchargent des LDL dans les lysosomes.

       - les constituants des LDL sont catabolisés par les enzymes lysosomales alors que les récepteurs libérés rejoignent la membrane cellulaire pour un nouveau cycle de captation 13 [62] [63] .

Les apoprotéines sont hydrolysées en aminoacides, les esters de cholestérol en acides gras et cholestérol libre. Le cholestérol libre intracellulaire déclenche un triple effet régulateur (Figure 6):

       - inhibition de la HMG-Co-A réductase donc de la synthèse de cholestérol

       - stimulation de l'acyl cholestérol-acyl transférase (ACAT) qui estérifie le cholestérol libre intracellulaire

       - inhibition de la synthèse des récepteurs des LDL (R-LDL), dont le nombre diminue, ce qui protège la cellule d'une surcharge en cholestérol.

       

Figure 6 : Facteurs affectant l'homéostasie du cholestérol au niveau cellulaire

Figure 6 : Facteurs affectant l'homéostasie du cholestérol au niveau cellulaire

La captation des LDL par les récepteurs B-E est donc un régulateur très important de la concentration plasmatique des LDL. Ceci est objectivé par l'hyper-LDLémie sévère des sujets atteins de déficit familial de ces récepteurs (absence ou anomalie de structure), qui caractérise l'hypercholestérolémie familiale (hétérozygote ou homozygote) ou hyperlipoprotéinémie de type IIa.

Les cellules des sujets atteints d'hypercholestérolémie familiale ont un nombre de récepteurs fonctionnels diminué : environ 50% de la normale chez les hétérozygotes, les homozygotes ayant un nombre nul ou très réduit.

La structure du récepteur des LDL est très bien connue depuis les travaux de Goldstein et Brown (Figure 7) 13 62 63 .

Il s'agit d'une glycoprotéine transmembranaire comprenant plusieurs parties :

       - une partie intracytoplasmique de 50 aminoacides s'attache aux protéines du cytosquelette et permet l'internalisation lorsque le récepteur est chargé de LDL.

       - une partie hydrophobe de 22 aminoacides se trouve dans l'épaisseur de la membrane.

       - une partie hydrophile de 58 aminoacides située du côté externe de la membrane, et qui porte de nombreuses chaînes glucidiques.

       - enfin, au bout d'un bras intermédiaire de 350 aminoacides, se situe la partie
N-terminale de 292 aminoacides qui possède une structure anionique complémentaire de la séquence cationique des apoprotéines B100 et E et permet l'ancrage des LDL.

Des anomalies diverses se rencontrent sur ce récepteur : plus de 50 mutations sont connues dont les deux tiers sont des délétions, plus rarement des insertions.

Ces mutations, selon leur importance et leur localisation, se traduisent par une absence du récepteur, un défaut de localisation membranaire, la non reconnaissance des LDL ou l’absence d’internalisation après fixation.

D’autres anomalies génétiques, telles que les mutations de l’apoprotéine B, ligand normal du récepteur, ont un phénotype et une fréquence proche de celle de l’anomalie du récepteur des LDL [64].

La captation hépatique des LDL, qui constitue la principale voie catabolique de ces lipoprotéines, est limitée par le nombre des récepteurs des hépatocytes.

Figure 7 : Structure du récepteur des LDL

Figure 7 : Structure du récepteur des LDL

Dans l'hépatocyte, le cholestérol est catabolisé en acides biliaires après plusieurs réactions d'hydroxylation. Les acides biliaires sont ensuite conjugués avec la taurine ou la glycine et excrétés dans la bile sous forme de sels biliaires (Figure 8). Le foie est le seul organe capable d’effectuer ce catabolisme.

Figure 8 : Catabolisme du cholestérol en acides biliaires

Figure 8 : Catabolisme du cholestérol en acides biliaires

L'excrétion dans la bile des sels biliaires a un effet régulateur important sur la solubilisation des grandes quantités de cholestérol qui y sont présentes. L'excrétion biliaire est aussi une importante voie d'élimination du cholestérol et des acides biliaires. Si on bloque le cycle entéro-hépatique des sels biliaires, la dégradation du cholestérol est accélérée. Mais cet effet, utilisé en thérapeutique (cholestyramine), est pervers car il entraîne aussi une accélération de la biosynthèse hépatique de cholestérol.

Le foie dispose d'autres mécanismes de captation du cholestérol à partir des lipoprotéines circulantes :

       - le récepteur spécifique de l’apoprotéine E (isoformes E3 ou E4) qui reconnaît spécifiquement les remnants de chylomicrons et une partie des remnants de VLDL.

Cette voie est quantitativement peu importante chez l'homme normal où la majeure partie (70 p.cent) des VLDL et IDL se transforme en LDL,

       - un autre type de récepteur, spécifique des HDL permet aux hépatocytes de capter le cholestérol. Les HDL ont la capacité de s'enrichir en cholestérol au contact des cellules périphériques dont les membranes contiennent un excès de cholestérol libre par rapport aux phospholipides. Ceci permet un retour au foie du cholestérol en excès au niveau des tissus périphériques.

Le foie joue donc un rôle central dans le catabolisme du cholestérol.

          Voie "scavenger" des LDL modifiées

En plus de la voie normale du récepteur des LDL, il existe une voie catabolique indépendante qui semble quantitativement mineure à l'état normal mais dont l'importance est accrue dans l'hyperLDLémie. En effet, chez les malades atteints d'hypercholestérolémie familiale homozygote qui n'ont pas d’activité des récepteurs des LDL, on constate une production et une dégradation des LDL 3 fois plus importante environ que chez les sujets normolipidémiques. Dans les lésions d'athérosclérose de ces sujets, on a retrouvé des dépôts massifs de cholestérol dans des cellules spumeuses d'origine macrophagique.

L'accumulation de cholestérol dans les macrophages, phénomène qui favorise leur transformation en cellules spumeuses, ne se fait pas par la voie du récepteur des LDL. En effet, la transformation des monocytes-macrophages en cellules spumeuses, in vitro, ne se produit pas en présence de LDL natives.

Goldstein et Brown ont montré qu'il est nécessaire que les LDL subissent des modifications (méthylation, acétylation du site de liaison au récepteur) pour être reconnues par les récepteurs scavenger.

Les macrophages possèdent des récepteurs des LDL "modifiées".

Chez l'homme divers mécanismes peuvent conduire à une modification des LDL tels la lipoperoxydation ou la glycation. En raison de leur durée de vie d'environ 3 jours dans la circulation, les LDL sont susceptibles de subir des altérations qui se produisent principalement au niveau des cellules endothéliales ou dans l'espace sous-endothélial. En effet, les LDL franchissent assez facilement l'endothélium vasculaire et montrent une affinité pour certaines macromolécules de la matrice extracellulaire.

Au niveau de la paroi des vaisseaux, les systèmes peroxydants peuvent attaquer les acides gras insaturés et produire des substances toxiques (malondialdéhyde...) capables de réagir avec les aminoacides de l'apoprotéine B, en particulier au niveau des résidus lysines, entraînant la neutralisation des charges positives des LDL.

Par ailleurs, la glycation de l'apoB100, par le glucose plasmatique est un phénomène bien connu chez le diabétique.

Les LDL ainsi modifiées ne peuvent plus être reconnues par le récepteur normal et vont être captées par les récepteurs scavenger des macrophages. Les macrophages peuvent cataboliser dans les lysosomes la plupart des constituants des LDL à l'exception du cholestérol. Du fait de l'absence de rétrocontrôle négatif, le cholestérol libre, réestérifié par de l'acide oléique, s’accumule dans les macrophages qui deviennent ainsi des cellules spumeuses.

Ce phénomène, qui peut également se produire dans les cellules musculaires lisses et les cellules endothéliales, est considéré comme un des événements précoces de l'athérosclérose ainsi que nous le verrons plus loin.

La voie métabolique normalement accessoire des "scavengers" peut devenir prépondérante dans certains états pathologiques, déviant ainsi le catabolisme des LDL vers une voie favorisant l'athérogenèse. Ceci explique pourquoi les LDL sont considérées comme les lipoprotéines les plus athérogènes.

 

Au total, on peut considérer que les chylomicrons, les VLDL, les IDL et les LDL font partie d'une même famille de lipoprotéines car elles ont en commun l'apoprotéine B.

Elles représentent très schématiquement le courant d'influx du cholestérol depuis les sites d'absorption et de synthèse vers les sites d'utilisation.

1.6.4 Métabolisme et rôle des HDL

Les HDL représentent une classe particulière de lipoprotéines, de masse et de taille beaucoup plus faibles que les LDL (7-11 nm). Leur densité hydratée élevée est due à l'importante proportion d'apoprotéines (45-55 p.cent). Les apoprotéines les plus abondantes sont les apoprotéines A-I et A-II mais elles peuvent aussi porter, les différentes apoprotéines C, et l'apoprotéine E.

Certaines protéines circulantes se fixent aux HDL : c'est le cas par exemple de la LCAT, de la cholesterol ester transfer protein (CETP) et probablement d'autres protéines ayant une affinité pour les phospholipides.

Les HDL subissent de nombreux remaniements tout au long de leur métabolisme, ce qui entraîne d'importantes variations de leur composition. Les HDL natives, qui peuvent ne contenir aucun lipide neutre (cholestérol estérifié, triglycérides) se présentent comme des disques de phospholipides (en double feuillet) et de cholestérol, entourés d'apoprotéines. Les autres HDL sont sphériques, le coeur constitué de cholestérol estérifié et d'un peu de triglycérides et la surface est occupée par des apoprotéines A-I et accessoirement par quelques molécules d'apoprotéines A-II, C, ou E associées à des phospholipides et du cholestérol libre. Le rapport molaire phospholipides/cholestérol libre voisin de 3 constitue le caractère essentiel des HDL, il explique qu'elles puissent se charger de cholestérol libre au contact de membranes dont le rapport molaire est plus faible.

La présence de LCAT associée aux HDL contribue à modifier leur composition en transformant le cholestérol libre (superficiel) en cholestérol estérifié qui s'enfonce au coeur de l'édifice, alors que des lysolécithines se détachent des HDL et se lient à l’albumine. La CETP, modifie aussi la composition des HDL : elle transfère du cholestérol estérifié des HDL vers les lipoprotéines riches en triglycérides (chylomicrons et VLDL), et permet un enrichissement des HDL en triglycérides aux dépens de ces lipoprotéines.

1.6.4.1. Synthèse

Les HDL sont synthétisées par plusieurs voies :

       - le catabolisme des chylomicrons par la lipoprotéine-lipase génère dans la circulation des HDL discoïdales contenant des phospholipides et du cholestérol libre associés à des apoprotéines A-I et A-II synthétisées par l'intestin,

       - le foie secrète dans le sang des HDL discoïdales contenant des apoprotéines A-I, E et probablement C, ainsi que des phospholipides et du cholestérol libre.

La sécrétion hépatique est quantitativement la plus importante,

       - l'intestin à jeun est capable de synthétiser des HDL sphériques dont le coeur est riche en cholestérol estérifié et qui transportent principalement de l'apoprotéine A-I et des phospholipides,

       - au cours du catabolisme des VLDL, il se détache des lipoprotéines contenant principalement des apoprotéines C en plus des phospholipides et du cholestérol libre.

La demi vie des HDL, évaluée à partir de celle de leurs apoprotéines est de 4 à 6 jours et est influencée par le régime alimentaire et les médicaments.

1.6.4.2. Transformation intravasculaire

Dans la circulation, les HDL subissent des remaniements en perdant et gagnant des constituants, par transfert avec d'autres lipoprotéines et par échange avec les cellules des divers tissus (Figure 9) [65] [66].

Les HDL discoïdales quelle que soit leur origine, peuvent s'enrichir en molécules de cholestérol libre qu'elles soustraient aux cellules périphériques. Cet échange dépend de la proportion phospholipides/cholestérol libre de la couche périphérique : les HDL les plus riches en phospholipides sont les plus actives pour l'efflux de cholestérol libre. Toutes les particules HDL ne sont pas équivalentes dans cette fixation. Ainsi, il a été montré que l'apoprotéine A-II exerce un effet inhibiteur 54.

Après avoir fixé du cholestérol libre, les HDL constituent un bon substrat pour la LCAT, dont elles contiennent l’activateur spécifique (l’apoprotéine A-I). La LCAT se lie aux HDL sous forme de complexes avec l'apoprotéine A-I et avec des protéines de transfert des lipides.

La LCAT estérifie le cholestérol libre avec un acide gras provenant des lécithines ainsi transformées en lysolécithines. Quant à l'ester de cholestérol formé, il peut gagner le coeur de la particule qui grossit à mesure de son enrichissement en cholestérol estérifié. C'est donc par le fait d'être un substrat pour la LCAT qu'une HDL naissante devient sphérique et mature.

Lorsque l'apoprotéine A-I ne peut plus être liée aux HDL, comme dans le cas des cholestases, le métabolisme des HDL devient anormal.

La demi-vie des HDL matures est de l'ordre de 5 jours. Enrichies en cholestérol estérifié, elles deviennent aussi plus grosses et moins denses que les HDL naissantes. Elles sont alors dégradées dans les capillaires hépatiques par une lipase hépatique à activité phospholipasique et triglycéridasique. Le cholestérol ainsi retourné au foie est éliminé dans la bile ou dégradé en acides biliaires.

Il semble qu'une quantité non négligeable du cholestérol estérifié formé dans les HDL soit transférée aux lipoprotéines riches en triglycérides sous l’action de la CETP, les HDL s’enrichissant parallèlement en triglycérides provenant des VLDL ou des remnants de chylomicrons.

Les actions consécutives de la LCAT et de la CETP contribuent au maintien d'un flux de cholestérol de la périphérie vers le foie .

1.6.4.3. Catabolisme

- Certaines cellules endocriniennes (ovaires, cortico-surrénales) possèdent des récepteurs membranaires spécifiques des HDL en plus des récepteurs LDL [67].

Une activité enzymatique du type de celle de la lipase hépatique existe dans les ovaires et les cortico-surrénales où elle assure peut-être une partie de l'approvisionnement en cholestérol libre, la plus grande partie venant des LDL.

Les oestrogènes qui diminuent le taux de cette enzyme, augmentent la durée de vie des HDL et explique que leur concentration soit plus élevée chez la femme que chez l'homme.

- C'est le foie qui semble jouer le rôle principal dans leur dégradation : celle-ci est conditionnée par l'activité de la lipase hépatique. Cette enzyme bien connue en tant que triglycéride-hydrolase possède aussi une activité phospholipasique de sorte que, lorsque les HDL traversent le foie, les phospholipides sont hydrolysés en lysolécithines. Les lysolécithines et le cholestérol libre des HDL passent alors dans les hépatocytes. Au cours de ce catabolisme, la densité des HDL augmente progressivement et le cycle peut recommencer.

Le retour du cholestérol des cellules périphériques vers le foie via les HDL est connu sous le nom de transport inverse du cholestérol (reverse pour les Anglo-Saxons). Son efficacité est capitale pour tout le métabolisme du cholestérol et très liée au rôle protecteur des HDL vis à vis de l'athérosclérose [68] [69].

Les HDL sont quantitativement représentatives du potentiel d'épuration du cholestérol cellulaire.

Figure 9 : Cycle des HDL et transport "reverse" du cholestérol

Figure 9 : Cycle des HDL et transport "reverse" du cholestérol

Il existe une voie indirecte du transport du cholestérol des HDL vers le foie, via le transfert du cholestérol estérifié aux VLDL par la CETP, qui contribue aussi au flux du cholestérol périphérique vers le foie. Mais cette voie indirecte pourrait accroître le risque d'athérosclérose, notamment par un enrichissement en cholestérol estérifié des particules contenant l'apoprotéine B. En effet, dans la plupart des conditions où le risque d'athérosclérose est élevé, l'activité CETP est importante, alors que les sujets génétiquement déficients en CETP n'ont pas de signes cliniques d'athérosclérose et ont un profil lipidique protecteur (HDL augmentées, LDL diminuées) [70].

1.6.5. Conclusion

Les concentrations circulantes des diverses classes de lipoprotéines représentent la résultante des diverses réactions de synthèse et de catabolisme. Un rôle régulateur central semble joué par les récepteurs cellulaires du foie et des tissus extra-hépatiques .

La principale fonction des lipoprotéines est le transport des lipides vers les tissus. Le transport des triglycérides par les chylomicrons et les VLDL est le plus important quantitativement. La dégradation par les lipoprotéines lipases de ces lipoprotéines riches en trigycérides constitue une étape clé du métabolisme des lipoprotéines en permettant, d'une part la synthèse des remnants et des LDL et, d'autre part la synthèse des HDL.

Les LDL et les HDL sont surtout impliquées dans le transport et l'utilisation cellulaire du cholestérol, les divers récepteurs cellulaires ayant un rôle régulateur  important.

Mais ces dernières voies métaboliques sont beaucoup plus lentes que les précédantes, en effet les LDL et les HDL ont une durée de vie nettement plus longue (environ 3 jours) que les chylomicrons (quelques minutes) et les VLDL (quelques heures).

Il en résulte une coexistence obligatoire et irrégulière des LDL et HDL avec les lipoprotéines riches en triglycérides, du fait des 3 repas journaliers.

Or, la plupart des études ont été réalisées chez des sujets à jeun et de nombreuses anomalies ne sont ainsi pas évaluées.

Dr GUIMONT Marie-Christine - Thèse de Docteur en Pharmacie    page 42

La lipoprotéine Lp(a) : son intérêt dans l'interprétation du bilan lipidique - Lipoprotein(a) Lp(a): its interest in the interpretation of the lipid profile

1.7. L'athérosclérose et ses complications

1.7.1. Définition

L'OMS en donne définition descriptive : "l'athérosclérose est une association en proportion variable de remaniements de l'intima des artères, consistant en une accumulation locale de lipides, de complexes glucidiques et de produits d'origine sanguine, de tissus fibreux et de dépôts calcaires, le tout accompagné de modifications de la média" [71].

Il s'agit d'une pathologie chronique qui se développe à bas bruit en réponse à des lésions vasculaires subtiles qu'on attribue habituellement à certaines lipoprotéines.

L'évolution des lésions qui conduit de l'artère saine à l'artère athéroscléreuse a été étudiée par de nombreux auteurs.

1.7.2. Structure et composition cellulaire d'une artère saine

1.7.2.1. Structure

La paroi artérielle est constituée par un manchon de calibre et de structure variable suivant qu'il s'agit d'artères à prédominance élastique comme l'aorte et ses grandes branches, ou bien d'artères à prédominance musculaire telles que les coronaires.

La paroi artérielle comprend trois tuniques superposées avec, de la lumière vers la périphérie : l'intima, la média et l'adventice

          L'intima

Elle constitue la première couche et comprend:

       - une couche unique et continue de cellules endothéliales directement en contact avec le sang circulant.

       - une couche sous-endothéliale ou membrane basale sur laquelle reposent les cellules endothéliales. Cette couche sous-endothéliale d'épaisseur variable et de nature conjonctive est constituée de fibres collagènes, de quelques fibres élastiques, et des fibroblastes qui produisent des protéoglycanes, du glycogène et de l'élastine.

Elle est caractérisée par une grande activité enzymatique et par la présence d'abondantes cellules immunitaires.

       - la limitante élastique interne qui sépare l'intima de la média. Elle est particulièrement développée dans les artères élastiques de gros calibre et les artères musculaires de moyen calibre, et disparaît au niveau des capillaires.

          La média

Elle comprend principalement des cellules musculaires lisses, qui sont entourées de fibres élastiques et de fibres collagènes, qu'elles synthétisent. La media est séparée de l'adventice par la limitante élastique externe.

Selon la prédominance de fibres élastiques ou de cellules musculaires lisses on distingue les artères de type élastique (proches du coeur) et les artères de type musculaire (artères de distribution régionale).

          L' adventice

Elle ancre le vaisseau dans les tissus voisins. C'est un lacis lâche de fibres de collagène, de fibres élastiques, de cellules musculaires lisses et de fibroblastes dans lequel vont cheminer les vasa vasorum irriguant la partie externe de la média, (la partie interne de celle-ci ainsi que l'intima reçoivent leur apport nutritionnel du sang circulant dans le vaisseau). Les vasa vasorum n'existent que dans les grosses artères [72].

1.7.2.2. Composition cellulaire et métabolisme de la paroi artérielle

Les principaux types cellulaires composant les artères sont les cellules endothéliales, les macrophages et les cellules musculaires lisses.

La paroi artérielle est un organe métaboliquement actif.

          Les cellules endothéliales

Situé à l'interface entre le sang et les tissus, l'endothélium vasculaire constitue d'une part une barrière à perméabilité sélective, d'autre part un organe multifonctionnel pouvant croître, se différentier et être activé. Il est en interaction permanente avec d'autres cellules et des facteurs humoraux.

Les cellules endothéliales participent activement à la régulation de l'homéostasie vasculaire et sous l'influence de certains stimuli à l'évolution de processus pathologiques comme la thrombose, l'inflammation, l'infection, l'athérosclérose, la cancérogenèse.

Leurs principales fonctions physiologiques sont :

       - constituer une surface non thrombogénique et non adhérante pour les leucocytes,

       - constituer une barrière perméable d'échange et de transport de substances dans la paroi artérielle,

       - assurer le maintien du tonus vasculaire par le relargage de monoxyde d'azote, de prostacycline (PG-I2) à propriétés vasodilatatrices et d'endothéline à propriétés vasoconstrictrices,

       - synthétiser et sécréter des facteurs de croissance et des cytokines,

       - permettre le renouvellement du collagène et des protéoglycanes de la membrane basale sur laquelle elles reposent,

       - fournir une surface non adhérante pour les leucocytes.

Les cellules endothéliales sont aussi capables de modifier les lipoprotéines par oxydation lors de leur transport dans la paroi artérielle.

Ces fonctions sont régulées par de nombreux facteurs humoraux modulant

leur capacité de synthèse et leur conférant ainsi un phénotype différent selon qu'elles sont au repos, stimulées, activées ou lésées.

Les cellules endothéliales activées présentent une dysrégulation de leurs fonctions normales et participent activement aux processus d'athérogenèse par leur implication notamment dans les processus suivants :

          - Coagulation et fibrinolyse

Dans les conditions physiologiques (cellules endothéliales au repos), l'endothélium vasculaire exprime surtout des propriétés antithrombogéniques en s'opposant à l'activation et à l'agrégation plaquettaire (synthèse de protéoglycanes de type héparane sulfate, de prostacycline), à la coagulation (thrombomoduline, protéines C et S) et en favorisant la fibrinolyse (activateurs du plasminogène de type urokinase ou tissulaire, prostacycline).

Les cellules endothéliales, activées par des cytokines inflammatoires ou par des concentrations athérogènes de lipoprotéines, développent un phénotype prothrombotique, caractérisé notamment par la synthèse de thromboplastine tissulaire et d'inhibiteur de l'activateur du plasminogène de type 1 (PAI-1).

          - Réponses immunitaires et inflammatoires

Quatre grandes fonctions permettent aux cellules endothéliales de répondre aux nombreux signaux environnementaux et humoraux auxquels elles sont en permanence exposées : l'expression d'antigènes de surface, l'expression de molécules d'adhésion, la synthèse de cytokines et la production de médiateurs lipidiques tels les écosanoïdes

          - Synthèse de composants du stroma

Les cellules endothéliales synthétisent et sécrètent des composants de leur surface cellulaire, de leur lame basale et du stroma : protéoglycanes (héparane-sulfate, chondroïtine-sulfate, dermatane-sulfate) caractérisés par leur charge électronégative, divers types de collagène, du facteur de von Willebrand, de la laminine, de la thrombospondine, de la fibronectine et de l'élastine ainsi que des collagénases et autres protéases.

       - Interaction avec les lipoprotéines plasmatiques

Lorsque les cellules endothéliales sont activées, elles produisent davantage de protéoglycanes. En raison de leur charge négative, les protéoglycanes ont de multiples interactions avec les séquences basiques de différentes protéines du stroma, de certaines cytokines et d'autres molécules comme les LDL. Ils exercent ainsi un rôle dans la capture, la rétention , la modification et l'accumulation des lipoprotéines au sein de la paroi vasculaire, ce qui favorise l'auto-entretien de l'athérogenèse par accumulation et modification des lipoprotéines [73].

          Les macrophages

Cellules fondamentales du tissu conjonctif et des liquides biologiques, les macrophages ont un rôle capital dans la réparation tissulaire, dans l'inflammation, l'athérosclérose et la croissance tumorale.

Les macrophages sont caractérisés par d'importantes capacités de phagocytose mais aussi par la synthèse de plus d'une centaine de molécules physiologiquement actives et par leur rôle immunitaire fondamental qu'est la présentation des antigènes aux lymphocytes T.

Certaines fonctions du macrophage se font sans qu'une stimulation préalable soit nécessaire : la phagocytose, la sécrétion de lysozyme et des facteurs du Complément. D'autres fonctions telles la sécrétion de cytokines, ne surviennent qu'après stimulation par des cytokines comme l'interféron g ou des substances exogènes comme les endotoxines bactériennes.

Parmi les très nombreuses substances sécrétées par les macrophages stimulés, citons : le Tumor Necrosis Factor a (TNF a), les Interleukines 1 et 6, le facteur de croissance des lignées granulocytaires et monocytaires (GM-CSF), des facteurs de coagulation (thromboplastine tissulaire, facteurs X, VII, V...), des prostaglandines et des leucotriènes, des métabolites toxiques de l'oxygène comme les radicaux libres O2- et OH- 73.

          Les cellules musculaires lisses

Elles constituent le type cellulaire prédominant de la média des artères et ont un rôle essentiel dans le maintien du tonus vasculaire. Elles assurent également l'intégrité structurale et fonctionnelle de la paroi artérielle par leurs capacités de prolifération et de synthèse de la matrice extracellulaire. Les cellules musculaires lisses synthétisent un collagène abondant, des fibres élastiques, de l'élastine soluble et insoluble, et des glycosaminoglycanes (principalement dermatan-sulfates).

En raison de la prédominance des lipides au sein des lésions d'athérosclérose, on s'est plus particulièrement intéressé au métabolisme lipidique au niveau artériel. Les cellules musculaires lisses peuvent synthétiser des acides gras, du cholestérol, des phospholipides et des triglycérides à partir de substrats endogènes, mais elles utilisent de façon préférentielle les lipides provenant des lipoprotéines du plasma captées par la voie des récepteurs spécifiques. Si le catabolisme des lipoprotéines plasmatiques devient pathologique ces cellules peuvent accumuler des esters de cholestérol.

Comme les cellules endothéliales, les cellules musculaires lisses sont capables de synthétiser diverses molécules régulant leur croissance, fonction pouvant être altérée dans certaines pathologies.

Les cellules musculaires lisses peuvent exprimer toute une gamme de phénotypes en relation avec leurs multiples fonctions.

Les phénotypes extrêmes sont :

       - le phénotype "contractile" dont la seule fonction est la contraction. Ce phénotype est celui de la majorité des cellules musculaires lisses de la media des artères de l'adulte sain.

       - le phénotype "synthétique" dont la fonction principale est la synthèse.

La média des artères fœtales exprime surtout ce phénotype qui évolue vers le type contractile au cours du développement.

Lors de réparations vasculaires il peut y avoir réversion vers le type synthétique [74].

Les cellules musculaires lisses retrouvées dans l'intima et impliquées dans l'athérosclérose ont parfois été décrites comme des fibroblastes ou des cellules mésenchymateuses. Il s'agit en fait de véritables cellules musculaires lisses mais de phénotype modifié.

Les capacités de la paroi artérielle à maintenir l'intégrité de son endothélium, à prévenir l'agregation plaquettaire, l'adhésion des cellules mononucléées sanguines, l'accumulation de cholestérol, la prolifération de cellules musculaires lisses au niveau de l'intima et à assurer la nutrition de sa média sont les éléments principaux de protection contre le processus d'artériosclérose.

 

          Modifications dues à l'âge

La modification principale survenant au cours du vieillissement normal consiste en un épaississement lent, apparemment continu et symétrique de l'intima.

Cet épaississement intimal résulte de l'accumulation progressive de cellules musculaires lisses entourées de tissu conjonctif.

Dans la paroi artérielle normale, la quantité de lipides (principalement ester de cholestérol), augmente également avec l'âge. Cet ester de cholestérol semble provenir du plasma car il contient principalement de l'acide linoléique, acide gras prédominant du cholestérol estérifié plasmatique.

De plus, des LDL sont détectables immunologiquement dans l'intima des artères normales, de façon parallèle à leur concentration plasmatique. L'ensemble de ces phénomènes conduit à un épaississement progressif de l'intima associé à une accumulation de lipides.

Cet épaississement diffus de l'intima, lié à l'âge, doit être distingué des plaques fibreuses surélevées caractéristiques de l'athérosclérose. Sur le plan fonctionnel, ces modifications provoquent une augmentation progressive de la rigidité de la paroi. Ces modifications liées au vieillissement sont souvent proportionnelles au diamètre vasculaire et localisées aux bifurcations, aux courbures et aux points d'attache anatomiques.

Bien que présentant des points communs, les modifications dues à l'âge et à l'athérosclérose semblent être des processus bien distincts.

1.7.3. L'artère athéroscléreuse

L'athérosclérose est définie anatomiquement comme une variété de sclérose artérielle caractérisée par l'accumulation de lipides amorphes (athérome) dans la tunique interne du vaisseau. Elle atteint surtout les grosses et les moyennes artères (aorte, artères coronaires et cérébrales, artères des membres inférieurs) dont elle peut provoquer l'oblitération.

1.7.3.1. Topographie des lésions athéroscléreuses

Ces lésions se développent préférentiellement en certains endroits du système vasculaire (artères de gros et moyen calibre : l'aorte et sa bifurcation, les gros vaisseaux, le système carotidien et vertébral, les artères iliaques et fémoro-poplitées, les artères coronaires).

Les facteurs hémodynamiques (zones de turbulence) jouent sans doute un rôle important. D'autres localisations, notamment rénales et mésentériques peuvent également se voir mais, pour une raison inconnue, les artères des membres supérieurs sont en général indemnes 71.

Les vaisseaux sont touchés à des âges différents et à des degrés divers (Figure 10).

Une évaluation quantitative de la prévalence et de l'étendue des lésions sur les coronaires de 548 autopsies de patients âgés de 1 à 69 ans, montre que les stries lipidiques, rares pendant la première décade, deviennent fréquentes dés la deuxième et sont presque toujours présentes après 20 ans. Quant aux plaques fibreuses, elles apparaissent lors de la deuxième décade, puis augmentent en nombre et en étendue pendant les troisième et quatrième décades [75].

Les autopsies pratiquées sur 2000 soldats morts pendant la guerre de Corée, âgés de 22 ans en moyenne (18 à 48 ans), ont révélé la présence de lésions modérées (sans rétrécissement de la lumière artérielle) chez 35 p.cent de ces hommes. Environ 39 pour cent avaient un rétrécissement de 10 à 90 p.cent de la lumière des artères et 3 p.cent des plaques obstruant complètement une ou plusieurs coronaires [76].

Plus récemment, l'étude PDAY (Pathobiological Determinants Of Atherosclerosis in Youth) a étudié les aortes et les coronaires de 1532 personnes âgées de 15 à 34 ans et décédées par homicide, accident et suicide.

Toutes les aortes, et les coronaires de la moitié des sujets âgés de 15 à 19 ans présentaient des lésions et le pourcentage de surface atteint augmentait entre 15 et 34 ans, passant de 20 à 33 p. cent pour l'aorte et de 2,6 à 16 p. cent pour la coronaire étudiée.

Chez les sujets âgés de 30 à 34 ans des lésions coronariennes sont présentes dans 75 pour cent des cas et sont plus grandes chez les hommes que chez les femmes [77].

L'âge auquel débute l'athérosclérose varie entre les différentes artères. Des lésions sont trouvées dans l'aorte pendant la première décade, dans les artères coronaires au cours de la seconde et dans les artères cérébrales pendant les deux décades suivantes et les manifestations cliniques de ces lésions surviennent environ 30 ans plus tard [78] [79] [80].

De la naissance jusqu'à l'âge de 5 ans pratiquement toutes les lésions consistent en l'accumulation de lipides intracellulaire ou de petites stries lipidiques dont la fréquence diminue pendant la première enfance (jusqu'à l'âge de 6-8 ans).

La prévalence de ces lésions précoces augmente à nouveau à la fin de l'enfance et au début de l'adolescence. Elles sont alors prédominantes et concernent environ 70 p.cent des sujets. Les lésions plus évoluées commencent à apparaître à la fin de l'adolescence, période au cours de laquelle leur prévalence augmente alors que celle des stries lipidiques diminue. Ceci suggère que les stries lipidiques évoluent en lésions avancées pendant cette période. Les lésions d'athérome ont globalement une prévalence importante (30 p.cent) entre les âges de 26 et 35 ans.

1.7.3.2. Anatomie pathologique des lésions athéroscléreuses

Il s'agit de plaques nodulaires développées surtout au niveau de l'intima, de formes et de tailles variables, isolées ou confluantes et qui évoluent en plusieurs stades 80.

          La lésion initiale

Les lésions initiales ne sont détectables que par méthode chimique ou microscopique, et consistent en un dépôt de lipides dans les macrophages de l'intima (cellules spumeuses). Elles représentent les premières modifications évoluant vers une maladie clinique. Fréquemment observées chez l'enfant, elles sont situées sur des zones à risque d'athérosclérose.

          La strie lipidique

Les stries lipidiques sont visibles à l'oeil nu à la surface de l'endothélium de l'aorte et des artères coronaires et peuvent se présenter sous 2 aspects très différents :

Il s'agit le plus souvent de simples stries blanchâtres, formées d'une succession de petites taches à peine saillantes, alignées dans le sens du courant sanguin. Très fréquentes, on les trouve même chez les sujets très jeunes et en bonne santé. Plus tard, des stries perpendiculaires aux stries primaires ou obliques apparaissent, donnant l'aspect d'un reticulum. Elles contiennent de nombreuses cellules musculaires lisses et des macrophages remplis de lipides (cellules spumeuses), ainsi que du tissu fibreux. Les lipides accumulés sont principalement constitués d'oléate de cholestérol intracellulaire.

Les stries lipidiques sont visibles dans l'aorte et les artères coronaires du très jeune enfant et s'étendent au niveau de l'aorte à la puberté.

Le fait que ces lésions progressent ou non vers des lésions évoluées dans certaines zones électives du système circulatoire dépend en grande partie des forces hémodynamiques et des taux plasmatiques des lipoprotéines athérogènes.

 

          La plaque lipidique

Considérées comme lésion intermédiaire, les plaques lipidiques résultent de l'évolution des stries par accumulation de lipides extracellulaires et de débris dans la matrice de protéoglycanes. A ce stade il n'existe pas de noyau lipidique, la mort cellulaire n'est pas visible et les cristaux de cholestérol sont rarement retrouvés. Ces lésions développeront ultérieurement un noyau lipidique caractéristique des lésions évoluées (plaque fibreuse ou athérome).

Les plaques lipidiques se voient surtout dans les hypercholestérolémies de type IIa les plus intenses.

Ces lésions "initiales" sont limitées à l'intima.

          La plaque fibreuse

Les plaques fibreuses sont des zones surélevées réalisant un épaississement blanchâtre ou gris, de contours mal limités et circonscrit à l'intima. Elles représentent la lésion la plus caractéristique de l'athérosclérose évoluée. Elles apparaissent d'abord au niveau de l'aorte abdominale, des artères coronaires, et des artères carotides dans la troisième décennie, et augmentent progressivement avec l'âge.

Elles apparaissent plus précocement chez l'homme que chez la femme. On ignore les raisons pour lesquelles il existe une différence de susceptibilité entre les différents segments de l'arbre artériel et une répartition non uniforme des lésions.

La plaque fibreuse est ferme, surélevée en dôme, possède une surface opaque bombant dans la lumière vasculaire. Elle est composée d'un noyau central de lipides extracellulaires (avec cristaux de cholestérol) et de débris de cellules nécrotiques, recouverts d'un manchon fibromusculaire contenant un grand nombre de cellules musculaires lisses ainsi que du collagène. De ce fait la plaque est beaucoup plus épaisse que ne l'est l'intima normale. A la différence des stries, le lipide accumulé est pricipalement du linoléate de cholestérol extra cellulaire (comme dans les lipoprotéines).

          La plaque fibro-lipidique

La lésion compliquée est une plaque fibreuse calcifiée présentant différents degrés de nécrose, de thrombose et d'ulcération. Ces lésions sont le plus souvent symptomatiques, et associées aux maladies ischémiques rencontrées en clinique.

L'augmentation de la nécrose, conduit à un affaiblissement progressif de la paroi artérielle et une rupture de l'intima peut survenir, provoquant un anévrisme et une hémorragie. Des emboles artériels peuvent être générés par la fragmentation de la plaque dans la lumière du vaisseau. La sténose artérielle et la détérioration de la fonction de l'organe en aval sont les conséquences d'une occlusion progressive liée à l'épaississement des plaques et à la formation de thrombi.

C'est en général au stade des complications des lésions d'athérosclérose qu'apparaissent les signes cliniques de souffrance ischémique.

En effet, le ralentissement du débit sanguin n'apparaît que si le rétrécissement de la lumière artérielle est supérieur à 75 p.cent, en tout cas pour les artères coronaires.

L'infarctus du myocarde par exemple, survient généralement lors de l'occlusion aiguë d'une artère coronaire consécutive à une thrombose au niveau d'une sténose athéroscléreuse. La rupture ou la fissuration des plaques favorisent la constitution de la thrombose.

Figure 10 : Développement avec l'âge et topographie des lésions d'athérosclérose.

Figure 10 : Développement avec l'âge et topographie des lésions d'athérosclérose.

1.7.4. Pathogénie de l'athérosclérose

La complexité est une des caractéristiques de la pathogénie de cette maladie et, depuis un siècle et demi, plusieurs théories physiopathologiques de l'athérosclérose ont été proposées. Nullement exclusives elles reflètent différents aspects du même phénomène 14. Cependant, dans la plupart des processus pathogéniques mis en avant depuis qu’on cherche la (les) cause(s) de l’athérosclérose, les dyslipoprotéinémies prennent une place de plus en plus importante en particulier pour expliquer les mécanismes initiateurs.

1.7.4.1. Théorie ancienne de la réponse plaquettaire

Pendant de nombreuses années, il fut admis que l'événement majeur initiant l'athérogenèse consistait en une perte des cellules endothéliales de la surface des artères (consécutives à des lésions vasculaires mécaniques ou chimiques) suivie de l'adhésion des plaquettes puis de la formation d'un thrombus. Ce thrombus serait ensuite incorporé dans la paroi artérielle lors du processus de cicatrisation de la lésion. De plus les plaquettes activées sécrètent du platelet-derived growth factor (PDGF) qui induit la prolifération des cellules musculaires lisses, phénomène caractéristique des plaques fibreuses.

Cette théorie a été proposée par Ross dans les années soixante-dix [81].

Bien que la thrombose intervienne certainement dans la croissance des lésions, certaines objections ont été opposées à cette théorie :

          - les thromboses sont fréquentes dans le système veineux qui n’est pas touché par l'athérosclérose,

          - si la thrombose précède l'athérosclérose, les sujets atteints de déficits sévères de la coagulation devraient présenter une faible incidence de maladies coronariennes, ce qui n'est pas le cas,

          - la strie lipidique qui est antérieure à la plaque fibreuse, se développe sur une surface endothéliale intacte,

          - les cellules spumeuses retrouvées dans la strie lipidique correspondent, non pas à des cellules musculaires lisses, mais dérivent des monocytes-macrophages [82],

       - enfin, des facteurs de croissance (PDGF et autres) peuvent être libérés par les cellules endothéliales, les macrophages et les cellules musculaires lisses.

1.7.4.2. Hypothèse de l'infiltration lipidique

Dés le milieu du siècle dernier Rokitansky propose que l'hyperlipidémie, en particulier l'hypercholestérolémie, est une cause directe de l'athérosclérose. D'abondantes données expérimentales, cliniques, génétiques, épidémiologiques, thérapeutiques sont ensuite venues conforter cette hypothèse par la mise en évidence d'une très forte association entre hypercholestérolémie et athérosclérose :

          - les parois artérielles athéroscléreuses montrent une accumulation de cholestérol, que ce soit en pathologie humaine ou dans l'athérosclérose expérimentale,

          - l'athérosclérose peut être provoquée chez diverses espèces d'animaux par un régime alimentaire entraînant une hypercholestérolémie,

          - les patients atteints d'hypercholestérolémie familiale ont une plus forte probabilité de développer une maladie coronarienne et de mourir de cette maladie que les sujets dont la cholestérolémie est normale,

          - les populations dont la cholestérolémie moyenne est basse, comme les Africains, les Orientaux ont une beaucoup plus faible incidence de maladie coronarienne,

          - les études d'intervention ont montré que le risque de maladie coronarienne diminue lorsque la cholestérolémie diminue sous l’influence de mesures diététiques ou médicamenteuses.

L'accumulation de lipides (cholestérol principalement) dans les parois artérielles peut se produire par le biais de différents mécanismes ou circonstances dont :

          - la présence de lipoprotéines en concentration élevée dans le plasma comme dans l'hypercholestérolémie pure, l'hyperlipidémie combinée, l'accumulation de remnants,

          - l'augmentation de la perméabilité endothéliale aux lipoprotéines, lors de troubles hémodynamiques ou suite à l'oxydation des LDL,

          - un défaut d'élimination du cholestérol des tissus périphériques par déficit en HDL,

          - la synthèse de constituants de la matrice extracellulaire (protéoglycanes) qui lient les LDL et favorisent leur rétention.

1.7.4.3. Hypothèse de la réaction à un traumatisme

Selon cette hypothèse, les cellules endothéliales bordant l'intima sont exposées à des agressions continues ou répétées menaçant leur intégrité, avec une perte deleurs fonctions normales et de leur rôle de barrière. Les agressions de l'endothélium peuvent être d'origine métabolique, comme une hypercholestérolémie chronique ou une hyperhomocystéinémie, d'origine mécanique comme dans l'hypertension ou d'origine immunologique comme après une transplantation.

A certains endroits du système artériel, les cellules endothéliales lésées exposeraient le tissu sous endothélial aux constituants plasmatiques. Cela peut amorcer toute une série d'événements comme l'adhésion de monocytes et de plaquettes, la migration des monocytes dans l'intima, l'agrégation de plaquettes et la formation de microthrombi, la libération de substances sécrétées par les plaquettes et les macrophages, ainsi que l'accumulation de constituants du plasma comme les lipoprotéines.

Cela pourraît stimuler la prolifération des cellules musculaires lisses au niveau des sites lésés. Les cellules musculaires lisses en prolifération synthétiseraient une matrice conjonctive et se chargeraient en lipides.

Ce processus serait accéléré par les hyperlipidémies. Les macrophages provenant des monocytes peuvent se charger en lipides dont une partie est sous forme oxydée, favorisant leur captation par les récepteurs de type scavenger.

            Rôle des monocytes-macrophages

La plupart sinon toutes les cellules spumeuses des lésions athéroscléreuses dérivent des monocytes circulants qui adhèrent à l'endothélium, passent dans l'espace sous-endothélial et là, captent les lipoprotéines puis se chargent en esters de cholestérol.

Le premier événement qui survient lors d'un régime alimentaire hypercholestérolémiant est une augmentation de l'adhésion des monocytes circulants à l'endothélium vasculaire suivi de sa traversée.

L’augmentation des LDL circulantes constituerait une "lésion chimique" pour les cellules endothéliales qui ainsi activées exprimeraient des molécules d’adhésion en surface. Ces molécules d’adhésion favoriseraient l’adhésion des monocytes à l’endothélium 12.

Chez les animaux soumis à une alimentation riche en cholestérol, l'augmentation du cholestérol plasmatique est en grande partie liée à des β-VLDL (dérivés des chylomicrons et des VLDL, enrichis en cholestérol).

Ces β-VLDL se lient fortement à des récepteurs des monocytes-macrophages et sont captées très rapidement aboutissant à des cellules spumeuses in vitro.

Par contre chez les malades hypercholestérolémiques, en général, ce sont principalement les LDL qui sont augmentées.

Or, Goldstein et al ont montré que les monocytes-macrophages en culture ne captent que très lentement les LDL natives, du fait du rétrocontrôle exercé par les récepteurs des LDL qui protège les cellules d'une accumulation excessive de cholestérol intracellulaire, et ne forment pas de cellules spumeuses [83].

On sait maintenant que pour être captées par les monocytes-macrophages les LDL doivent subir des modifications biochimiques dont la principale consiste en une oxydation [84] [85]. En culture cellulaire, les trois types de cellules de la paroi artérielle (endothéliales, musculaires lisses et macrophagiques) peuvent oxyder les LDL .

Les LDL oxydées sont captées par les monocytes-macrophages au moyen des récepteurs scavenger, non régulés et peuvent ainsi donner lieu à l’accumulation de cholestérol en excès et à la formation de cellules spumeuses.

Le recrutement d’autres monocytes se fait par le biais des molécules d’adhésion qui s’expriment sur les cellules endothéliales en réponse à des LDL légèrement oxydées ou à des cytokines comme l’interleukine-1, l'interféron g, le TNF-a.

Les monocytes-macrophages sont donc impliqués dans plusieurs aspects du développement de l’athérosclérose :

          - ils contribuent à la formation des stries lipidiques en se chargeant de cholestérol,

          - les macrophages dérivés des monocytes circulants produisent des facteurs de croissance pour les cellules musculaires lisses et contribuent donc à leur prolifération et au développement des plaques fibreuses,

          - ils peuvent synthétiser des facteurs cytotoxiques pour les cellules voisines (musculaires lisses et endothéliales),

          - enfin, les macrophages chargés de lipides peuvent émigrer de la paroi vasculaire vers l’endothélium aggravant les lésions endothéliales [86].

            Oxydation des LDL

La présence de cellules spumeuses au sein des lésions athéromateuses a orienté les recherches vers le rôle de lipoprotéines LDL modifiées et tout spécialement de LDL oxydées. Il a été montré que des LDL natives mises en présence de cellules endothéliales en culture voient leurs propriétés physico-chimiques modifiées et deviennent reconnaissables par les macrophages. Les cellules musculaires lisses, les polynucléaires neutrophiles et les macrophages eux-mêmes donnent des résultats similaires.

Ces modifications consistent en une peroxydation lipidique. L'étape initiale serait une attaque des acides gras polyinsaturés des phospholipides par des radicaux libres de l'oxygène avec production de lipoperoxydes et d'aldéhydes. Ces produits d'oxydation se fixent ensuite sur les terminaisons lysine et arginine de l'apoprotéine B, impliquée dans la reconnaissance des LDL par le récepteur. Au delà d'un certain degré d'oxydation (plus de 15 pour cent des groupements lysine et arginine modifiés), les LDL ne sont plus reconnues par leur récepteur normal mais par le récepteur scavenger. D'autres types de modifications ont été mises en évidence in vivo. Chez le diabétique, l'apoprotéine B peut, comme d'autres protéines subir une glycation des restes lysines, qui serait responsable d'une diminution du catabolisme normal des LDL et d'une augmentation de leur captation par les macrophages.

Les LDL oxydées sont impliquées dans l'athérogenèse par les 4 mécanismes suivant mis en évidence par Steinberg 12 :

          - Elles favorisent la génération des cellules spumeuses, du fait de leur épuration par la voie scavenger.

          - Elles sont cytotoxiques pour l'endothélium vasculaire, notamment au niveau des stries lipidiques favorisant leur transformation en plaques fibreuses.

          - Elles inhibent la mobilité des macrophages, les fixant dans l'espace sous-endothélial où se développent les lésions athéromateuses.

          - Les macrophages ayant internalisé des LDL oxydées sécrètent des facteurs chimio-tactiques responsables d'un nouvel afflux de monocytes dans l'intima.

Les antioxydants comme l'a tocophérol stoppent ce processus dans les expériences de culture cellulaire et, seraient efficaces en thérapeutique.

On rejoint donc l'hypothèse de la lésion endothéliale qui pourrait être plus métabolique que physique [87] [88].

Ainsi, les hypothèses "lésion de l'endothélium" et "infiltration lipidique" longtemps considérées comme contradictoires pourraient bien représenter 2 aspects du même phénomène.

1.7.4.4. Autres hypothèses

          Hypothèse post-prandiale et rôle des lipoprotéines légères

  • Pour Zilversmit l'athérosclérose serait un phénomène post-prandial lié aux VLDL et aux remnants de chylomicrons qui, bien que trop volumineux pour traverser l'endothélium vasculaire, auraient néanmoins un pouvoir athérogène.

Les VLDL, soumises à la lipolyse par la lipoprotéine-lipase à la surface artérielle, perdent leurs triglycérides et deviennent des lipoprotéines plus petites et ayant conservé leur contenu en cholestérol. Ces remnants pourraient pénétrer dans l'intima artérielle, en quantité proportionnelle à la concentration des VLDL plasmatiques.

Un certain nombre d'arguments vont dans le sens d'un pouvoir athérogène des remnants de chylomicrons et de VLDL :

          - le contenu en cholestérol des chylomicrons et des remnants de chylomicrons augmente avec la richesse en cholestérol de l'alimentation,

          - chez le lapin qui développe une athérosclérose sous régime riche en cholestérol, l'hypercholestérolémie induite par le régime est principalement liée aux remnants de chylomicrons,

          - chez le lapin, les remnants de chylomicrons sont aussi athérogènes que les LDL et les VLDL endogènes à niveaux équivalents de cholestérolémie totale,

          - plusieurs espèces animales qui développent hypercholestérolémie et athérosclérose lors d'un régime riche en cholestérol accumulent dans leur plasma des VLDL et/ou IDL enrichies en cholestérol et de mobilité β en électrophorèse sur gel d'agarose,

       - les patients atteints d'hyperlipoprotéinémie de type III (très athérogène) ont de fortes concentrations de remnants de chylomicrons, même en dehors des périodes digestives.

Ainsi les remnants de chylomicrons, les VLDL et leurs remnants sont athérogènes [89] [90].

De plus il a été montré, chez le lapin et d'autres espèces, que si une alimentation riche en graisses induit une "simple" chylomicronémie, un ajout de cholestérol à l'alimentation aboutit à une forte concentration de remnants de chylomicrons enrichis en cholestérol.

Ainsi, même en l'absence d'hypercholestérolémie, le cholestérol pourrait se déposer dans les artères par l'action de la LPL qui assure physiologiquement le catabolisme des lipoprotéines post-prandiales.

Cette théorie pourrait expliquer l'athérosclérose constatée chez des sujets dont les concentrations plasmatiques de lipides à jeun sont normales mais dont l'alimentation est trop riche en cholestérol.

Bersot a montré la présence d'apolipoprotéine (a) dans les remnants de chylomicrons induits par un régime riche en graisses et enrichi en cholestérol, et suggère que l'athérosclérose liée à la Lp(a) pourrait être en partie liée à l'effet de l'apo(a) sur le catabolisme des remnants de chylomicrons [91].

  • Il existe désormais un relatif consensus quant au rôle des triglycérides dans l'athérogénèse, surtout depuis que l'étude de Framingham a individualisé un sous-groupe à haut risque coronarien, caractérisé par une hypertriglycéridémie et un taux faible de HDL 11.

Environ 30 p.cent des patients atteints de coronaropathie, d'artérite des membres inférieurs et d'athérosclérose des vaisseaux cervico-encéphaliques sont hypertriglycéridémiques.

Le rôle athérogène des triglycérides a été longtemps discuté car la relation entre triglycérides et maladies cardio-vasculaires n'est pas aussi forte que celle qui existe avec le cholestérol en analyse univariée. De plus elle a tendance à disparaître en analyse multivariée, lorsque l'analyse tient compte de plusieurs facteurs tels que cholestérol des HDL et des LDL, glycémie, tension artérielle... .

Ce phénomène peut s'expliquer par les faits suivants :

          - la triglycéridémie est un paramètre peu stable, qui varie d'un moment à l'autre au cours du nychtémère et aussi d'un jour à l'autre environ 3 fois plus vite que la cholestérolémie,

          - la très grande majorité des hypertriglycéridémies est liée à une augmentation des VLDL mais constitue un groupe hétérogène et de potentiel athérogène plus ou moins important selon qu'il s'agit d'hypertriglycéridémies de type IV, IIb, III ou de formes secondaires par exemple à l'insuffisance rénale [92] ou au diabète [93].

L'hypertriglycéridémie est importante à prendre en considération pour 2 raisons.

Premièrement, les lipoprotéines riches en triglycérides, particulièrement les VLDL, peuvent être athérogènes [94] [95]. Les facteurs influençant leur athérogénicité sont la taille des particules, le contenu en cholestérol estérifié et la composition en apoprotéines. La petite taille, l'enrichissement en cholestérol estérifié et la présence d'apoprotéine E favorisent respectivement : le passage dans l'intima, l'apport de cholestérol estérifié dans la paroi artérielle et la liaison aux récepteurs scavenger des macrophages, favorisant la formation des cellules spumeuses [96]. C'est le cas des remnants de VLDL qui s'accumulent dans l'hyperlipoprotéinémie de type III et des b-VLDL qui peuvent se voir lors d'une alimentation riche en cholestérol.

Deuxièmement du fait des conséquences métaboliques de l'hypertriglycéridémie :

          - il y a une compétition entre les VLDL et les lipoprotéines postprandiales pour la lipoprotéine-lipase et de nombreux hypertriglycéridémiques ont une lipolyse ralentie des chylomicrons,

          - l'hypertriglycéridémie induit une hétérogénéité des LDL avec un excès de LDL petites et denses (phénotype B) qui sont plus athérogènes que les LDL normales [97]. Enrichies en triglycérides, les LDL de type B ont un catabolisme ralenti en raison d'une moindre affinité pour leur récepteur normal [98],

       - enfin la diminution de concentration des HDL est une conséquence majeure de l'hypertriglycéridémie. Le mécanisme de la diminution des HDL semble se faire par le biais d'échanges de cholestérol et de triglycérides entre lipoprotéines, les VLDL s'enrichissant en cholestérol estérifié et les HDL s'enrichissant en triglycérides. Les HDL présentent alors une modification de structure avec prépondérance de formes qui semblent moins anti-athérogènes. Ces HDL enrichies en triglycérides subissent l'action de la lipoprotéine-lipase avec perte d'apoprotéine A1 et diminution de concentration [99]. C'est probablement par la relation inverse entre triglycéridémie et concentration du cholestérol des HDL que les triglycérides jouent un rôle athérogène [100].

          - Une conséquence potentielle de l'hypertriglycéridémie est l'augmentation du risque thrombotique. En effet, l'hypertriglycéridémie semble pouvoir influer sur les trois étapes de l'hémostase en induisant une hyperagregabilité plaquettaire, une augmentation du facteur VII et une diminution de la fibrinolyse.

L'exercice physique augmente la fibrinolyse physiologique et pourrait expliquer l'effet pathogène de la sédentarité dans la genèse des maladies cardio-vasculaires.

          Théorie tumorale de l'athérosclérose, hypothèse monoclonale de Benditt

Cette théorie, développée au cours des années 80, considère l'athérome comme une tumeur bénigne résultant notamment de la prolifération des cellules musculaires lisses vasculaires sous l'effet de substances chimiques ou de virus. Le point de départ de cette théorie est la découverte d'une origine monoclonale de la prolifération des cellules musculaires lisses. Les auteurs observent que les cellules musculaires lisses des lésions d'athérosclérose présentent le même profil d'isoenzymes de la glucose-6-phosphate déshydrogénase, ce qui constitue un argument en faveur de leur caractère monoclonal [101]. Par contre les mêmes cellules provenant de parois artérielles normales sont polyclonales.

Ainsi la plaque d'athérosclérose constituerait une tumeur bénigne résultant de la transformation d'une cellule unique suivie de sa prolifération. La transformation serait le résultat d'une mutation somatique chimio ou viro-induite altérant un proto-oncogène impliqué dans la régulation de la croissance cellulaire [102].

Chez l'homme le virus oncogène qui semble impliqué est le cytomegalovirus (CMV).

Des arguments cliniques et expérimentaux sont en faveur de cette hypothèse :

          - le pourcentage de sujets ayant un taux élevé d'anticorps IgG anti-CMV est deux fois plus élevé chez les sujets athéroscléreux que chez les témoins indemnes appariés sur l'âge,

          - la technique de polymérisation en chaîne (PCR), plus sensible que la sérologie, a permis de montrer que 90 p.cent d'individus souffrant d'athérosclérose avancée, sont porteurs du génome du CMV au niveau vasculaire,

          - les rats infectés par le CMV murin développent des plaques d'athérosclérose au niveau de l'aorte après infection,

          - le CMV est capable d'infecter et de stimuler les cellules musculaires lisses humaines en culture.

Néanmoins, les relations entre le CMV et les autres facteurs de risque athérogène (notamment la part liée au CMV) ne sont pas bien établies et de nombreuses questions restent posées [103].

          Hypothèse de l'homocystéinémie

L'observation initiale d'une fréquence très élevée de complications vasculaires précoces (50 p.cent avant l'âge de 30 ans) chez les patients présentant un déficit sévère en cystathionine-b-synthétase (homocystéinurie), est à l'origine de l'hypothèse qu'une hyperhomocystéinémie modérée serait un facteur de risque de pathologie thrombotique.

Cette anomalie métabolique peut être diagnostiquée par dosage de l'homocystéine plasmatique à jeun, ou après charge en méthionine. Selon les études, une hyperhomocystéinémie modérée ou une réponse anormale au test de charge en méthionine a pu être démontrée chez 10 à 24 p.cent de patients ayant présenté un infarctus du myocarde et chez 23 à 47 p.cent de patients ayant eu un accident vasculaire cérébral ou périphérique, contre 1 à 7 p.cent chez les sujets normaux [104].

L'analyse des résultats de 27 études montre que l'hyperhomocystéinémie est un facteur de risque indépendant de maladies vasculaires coronariennes, cérébrales et périphériques [105].

Le mécanisme physiopathologique est mal connu : une agression de l'endothélium par l'homocystéine, via la production de radicaux libres oxygénés, des perturbations de la synthèse du collagène et des protéoglycanes, une activation de facteurs de la coagulation ont été avancées.

Néanmoins la recherche d'hyperhomocystéinémie modérée semble intéressante en présence d'autres facteurs de risque qui semblent potentialisés par cette anomalie, car il est possible de la corriger par vitaminothérapie (acide folique, vitamines B12 et B6) [106].

1.7.4.5. Consensus actuel sur l'athérogénèse

Actuellement il y a un accord entre la plupart des auteurs pour admettre la séquence d'événements suivants, proposée par Steinberg (Figure 11) 12 [107] :

          - Formation de la strie lipidique

Le premier événement induit par l'hypercholestérolémie est une augmentation de l'adhésion des monocytes circulants à l'endothélium vasculaire.

La seconde étape est la pénétration du monocyte dans l'intima sous l'influence de l'effet chimio-attractant des  LDL oxydées. Après être entré dans la paroi artérielle, le monocyte se transforme en macrophage résidant. Cette transformation, complexe et de régulation mal connue, s'accompagne notamment de l'augmentation de l'expression du récepteur "scavenger" pour les LDL oxydées. L'ensemble de ces réactions devient un processus auto-entretenu car l'oxydation des LDL peut être induite par les cellules endothéliales, les cellules musculaires lisses et surtout par les macrophages eux-mêmes.

Les premiers monocytes génèrent donc les signaux qui vont attirer des vagues successives de monocytes-macrophages.

          - Evolution de la strie lipidique vers des lésions plus avancées

Quelques cellules musculaires lisses ayant probablement migré de la media vers l'intima, sont présentes dans la strie lipidique. Quelques unes de ces cellules accumulent des vésicules lipidiques mais beaucoup plus rarement que les cellules spumeuses macrophagiques. Les cellules musculaires lisses deviennent ensuite prédominantes et sont à l'origine de la matrice conjonctive de la plaque fibreuse.

La sécrétion de facteurs de croissance joue un rôle important dans le développement de la plaque, notamment le PDGF qui n'est pas produit que par les plaquettes mais également par les principales cellules de la paroi artérielle.

De plus l'ensemble des cellules présentes dans les lésions synthétisent des cytokines, expriment des récepteurs et sont le siège d'une inflammation chronique et focalisée.

          - Les relations entre stries lipidiques et plaques fibreuses sont un point controversé de la pathogenèse de l'athérosclérose. Par exemple l'hypothèse "mutagénique" suggère que les plaques fibreuses résultent d'un processus indépendant de celui à l'origine des stries lipidiques. Certaines observations ne vont pas dans le sens d'une évolution des stries lipidiques en plaques fibreuses. Par exemple chez les enfants les stries sont plus nombreuses dans l'aorte thoracique que dans l'aorte abdominale alors que chez l'adulte les plaques fibreuses sont plus étendues dans l'aorte abdominale.

Autre exemple, les femmes jeunes ont plus de stries lipidiques dans les artères coronaires et l'aorte que les hommes du même âge alors que chez les sujets plus âgés les hommes développent des plaques fibreuses plus étendues dans leurs coronaires que les femmes du même âge. Mais d'autres observations vont dans le sens d'une évolution des stries vers les plaques.

Dans les artères de sujets jeunes on observe de nombreuses lésions dont les caractéristiques histologiques et chimiques sont intermédiaires entre les stries lipidiques et les plaques fibreuses. De plus, les sites préférentiels de formation des stries lipidiques dans les coronaires des enfants sont les mêmes que ceux où les plaques fibreuses se développent chez l'adulte.

Au total il semble que certaines stries évoluent en plaques fibreuses alors que d'autres régressent probablement.

Figure 11 : Schéma unifié de l'athérogenèse

Figure 11 : Schéma unifié de l'athérogenèse

          - L'évolution finale des plaques d'athérosclérose est le plus souvent la constitution d'une thrombose obstruant le vaisseau et responsable d'infarctus mortel ou non et de nombreux cas de mort soudaine d'origine cardiaque.

La thrombose peut être considérée comme une réponse à l'agression du vaisseau.

Au moins trois types de facteurs déterminent la localisation et l'extension d'une thrombose : les facteurs hémodynamiques et rhéologiques, les modifications vasculaires et l'activation des constituants du sang, plaquettes et facteurs de coagulation

L'interaction de ces trois facteurs détermine le type de thrombose et en particulier, l'importance relative de la participation de la thrombine et des plaquettes.

Les différentes théories physiopathologiques de l'athérogenèse montrent bien la complexité des interactions susceptibles d'intervenir dans cette affection multifactorielle.

Ces diverses théories ne s'excluent nullement, chacune permettant d'expliquer un aspect particulier du processus.

 

Dr GUIMONT Marie-Christine - Thèse de Docteur en Pharmacie    page 64

La lipoprotéine Lp(a) : son intérêt dans l'interprétation du bilan lipidique - Lipoprotein(a) Lp(a): its interest in the interpretation of the lipid profile

2. La Lipoprotéine Lp(a)

La lipoprotéine Lp(a) [Lp(a)] est une particule lipoprotéique résultant de l’assemblage d’une particule LDL et d’une glycoprotéine très hydrophile, riche en hydrates de carbone appelée apolipoprotéine(a) [apoprotéine (a) ou apo(a)]. La présence d’apo(a) fait de la Lp(a) une lipoprotéine distincte de toutes les autres classes de lipoprotéines.

2.1. Découverte de la lipoprotéine (a) par Kare BERG

2.1.1. Circonstances

La découverte de la Lp(a) s'est faite à l'occasion de travaux sur les variants antigéniques génétiquement contrôlés (allotypes) des protéines du sérum humain normal. Plusieurs marqueurs allotypiques étaient déjà connus en particulier pour les immunoglobulines G, l'haptoglobine, la transferrine.

Des variants antigéniques des LDL ont été découverts en 1962 par Blumberg qui s'aperçoit que le sérum d'un patient polytransfusé (donc ayant produit des anticorps contre des antigènes sériques dont il est lui même dépourvu) précipite certains sérums de sujets normaux, mais pas tous. Le nouveau marqueur allotypique fut appelé "système AG". L'antigène reconnu par le sérum allo-immun était une bêtalipoprotéine génétiquement déterminée et constituait un système indépendant des autres marqueurs allotypiques connus. Plus tard il a été montré que le système AG correspond à un polymorphisme génétique de l'apoprotéine B.

Etant donnée la rareté des alloanticorps antiprotéines sériques humaines et surtout l'impossibilité de les étudier chez les personnes polytransfusées pour des raisons éthiques, il paraissait souhaitable de faire produire ces antisérums par des animaux.

Kare Berg va approfondir la découverte de Blumberg en immunisant des lapins avec des bêtalipoprotéines humaines, avec comme objectifs de mettre en évidence les différents types antigéniques de bêtalipoprotéines et d'apporter la preuve du caractère héréditaire de ce système allotypique.

L'équipe avec laquelle Berg travaille a l'expérience des variants génétiques des protéines sériques ainsi que de l'étude fine des antigènes érythrocytaires. De plus, Berg sait que les lapins produisent facilement des anticorps anti-bêtalipoprotéines humaines et il dispose d'une méthode simple pour préparer les bêtalipoprotéines : la chromatographie sur colonne d'hydroxyapatite.

2.1.2. Stratégie de recherche utilisée

L'hypothèse sur laquelle repose l'étude de Berg est que les animaux développent des anticorps dirigés contre plusieurs déterminants antigéniques (épitopes) de l'antigène injecté, y compris de possibles épitopes allotypiques. La stratégie utilisée consistait à immuniser des lapins avec une préparation de bêtalipoprotéines isolées du plasma d'un donneur unique.

Les antisérums obtenus peuvent ensuite être rendus spécifiques d'un seul marqueur allotypique au moyen d'absorptions spécifiques.

          Préparation antigénique utilisée

Les bêtalipoprotéines du sérum d'un individu Lp(a) + dans un panel de 20 sérums sont isolées par chromatographie sur colonne d'hydroxyapatite. Les solutions de bêtalipoprotéines utilisées pour l'immunisation ne contenaient pas d'autre protéine détectable par immuno-électrophorèse avec un antisérum anti-humain total.

          Immunisation des lapins

Après immunisation de trois lapins avec la précédente préparation, les sérums de ces lapins précipitent en immuno-diffusion double avec les 20 sérums totaux du panel ainsi qu'avec les 20 fractions de bêtalipoprotéines correspondantes.

L'immuno-électrophorèse démontre que les anticorps précipitants anti-bêtalipoprotéines sont des gammaglobulines. L'absence d'anticorps précipitant dans les sérums des lapins avant l'immunisation avait été vérifiée .

          Les adsorptions

L'antisérum anti-bêtalipoprotéine humaine obtenu est mis en contact avec chacun des sérums totaux et des fractions isolées de bêtalipoprotéines des 20 sujets du panel. Chaque aliquote d'immunsérums ainsi adsorbés est ensuite testé par immunodiffusion double ou par immunoélectrophorèse contre chacun des sérums totaux et des fractions de bêtalipoprotéines du panel.

Seuls certains sérums et les fractions bêtalipoprotéines correspondantes provoquent l'apparition d'un précipité.

Ces expériences permettent ainsi de séparer les individus du panel en "répondeurs" (réaction positive) et en "non répondeurs" (réaction négative).

Lorsque l'antisérum a été adsorbé par le sérum d'un sujet non répondeur, l'immunsérum obtenu ne réagit plus avec tous les sérums du panel mais seulement avec certains.

Si c'est le sérum d'un sujet répondeur qui a servi à l'adsorption, l'immunsérum obtenu ne réagit plus avec aucun des sérums.

2.1.3 Résultats: mise en évidence du nouvel allotype

Les expériences montrent qu'un immunsérum de lapin adsorbé avec le sérum d'un sujet non répondeur est capable de distinguer, en immuno-précipitation, 2 types de sérums humains. L'immunsérum obtenu est devenu spécifique d'un déterminant antigénique présent dans certains sérums et absent dans d'autres.

Parmi les 20 sujets du panel, 7 se révèlent répondeurs dont celui choisi au hasard pour les immunisations, les 13 autres étant non répondeurs et pouvant donc être utilisés comme matériel d'adsorption pour produire les immunsérums spécifiques.

Les fractions isolées de bêtalipoprotéines des 20 sujets ont donné les mêmes réactions avec l'immunsérum spécifique que les sérums totaux, et les autres fractions lipoprotéiques isolées n'ont pas réagi avec cet immunsérum.

Donc l'immunsérum est spécifique d'un marqueur allotypique des bêtalipoprotéines humaines.

La reproductibilité de ces résultats a été vérifiée en répétant les expériences avec des échantillons de sérum des 20 sujets du panel, prélevés à différents intervalles pendant plus de 1 an 36.

2.1. 4. Nomenclature et nature du nouvel antigène

2.1.4.1. Nomenclature

Le facteur présent dans le sérum d'un sujet répondeur est nommé Lp(a), "Lp" pour lipoprotéine et "(a)" pour le premier antigène mis en évidence dans ce nouveau système.

Les individus possédant cet antigène sont dits Lp(a+), les autres sont dits Lp(a-).

La décision de nommer Lp(a) ce nouvel antigène est antérieure de plusieurs années à l'emploi des noms Lp:AI et Lp:AI-AII pour désigner les principales HDL et a donc été conservé par l'usage, bien que source de possibles confusions.

En toute rigueur, le terme Lp(a) désigne l'antigène détecté par l'immunsérum spécifique et le terme "lipoprotéine Lp(a)" la classe de lipoprotéines possédant cet antigène dans sa structure. Cependant il est devenu habituel de parler de lipoprotéine(a), [en abrégé Lp(a)] et de prononcer lipoprotéine "petit" a.

2.1.4.2. Nature du nouvel antigène

Il s'agit d'une lipoprotéine différente des autres lipoprotéines connues jusque là. En effet, Berg montre que les sujets Lp(a+) possèdent 2 populations de lipoprotéines capables de réagir avec un antisérum anti bêtalipoprotéine : une population qui porte l'antigène Lp(a) et une autre qui en est dépourvue.

La notion que cette lipoprotéine est différente des autres a été renforcée par l'étude de 23 sérums connus comme étant Lp(a+) ou Lp(a-) avec l'immun sérum spécifique du système AG de Blumberg. Il est apparu qu'il n'y avait pas de relation entre les systèmes AG et Lp(a) : les allotypes AG sont absents des lipoprotéines possédant l'antigène Lp(a).

2.1.5. Fréquence du caractère

Berg teste les sérums de 314 adultes en bonne santé et non apparentés avec son immunsérum spécifique; 107 (34,1 p.cent) sont trouvés Lp(a+) et 207 (65,9 p.cent) sont trouvés Lp(a-).

2.1.6. Etude génétique préliminaire

Berg suppose que le caractère Lp(a) est déterminé par 2 allèles d'un même gène,

(il nomme ces allèles Lpa et LpÆ), et que le gène Lpa est dominant, c'est à dire s'exprimant par un phénotype Lp(a+) lorsqu’il est présent en simple dose ou en double dose.

Il calcule la fréquence des 2 allèles d'après la fréquence des phénotypes observés :

       Lpa : 0,812,  LpÆ : 0,188

Afin de tester cette hypothèse, il entreprend une étude génétique avec les sérums des membres de 23 familles ce qui lui permet de confirmer le caractère génétiquement déterminé de l'antigène Lp(a).

Au cours d'études ultérieures sur un plus grand nombre de familles, Berg confirme le caractère héréditaire, monogénique et dominant du phénotype Lp(a+)[108].

Le gène d'abord nommé Lpa deviendra LPA dans l'International Workshops on Human Genom Maping.

La lipoprotéine Lp(a) retrouvée chez 30 à 40 p.cent des sujets étudiés dans différentes populations, est alors considérée comme un variant qualitatif et génétiquement déterminé des bêtalipoprotéines humaines.

Dr GUIMONT Marie-Christine - Thèse de Docteur en Pharmacie    page 67

La lipoprotéine Lp(a) : son intérêt dans l'interprétation du bilan lipidique - Lipoprotein(a) Lp(a): its interest in the interpretation of the lipid profile

2.2. Composition chimique et propriétés physico-chimiques de la Lp(a)

2.2.1 Caractéristiques

Les études biochimiques après séparation des constituants lipidiques et protéiques de la Lp(a) montrent que le coeur lipidique a une composition similaire à celle des LDL, et que la partie protéique est constituée d’une apoprotéine B et d’au moins une apoprotéine(a) [109]. De plus la Lp(a) est plus riche en sucres que les LDL et a une mobilité électrophorétique pré-bêta-1  donc distincte de celle des LDL.

Lors de l'ultracentrifugation du sérum, les VLDL (pré-bêtalipoprotéines) surnagent alors que la Lp(a) sédimente, cette propriété lui valu un temps la qualification de "sinking pre-bêtalipoproteine" (to sink = sombrer, plonger) [110].

De plus, la Lp(a) est retrouvée dans une zone de densité comprise entre 1,050 et 1,120 g/ml qui s’étend donc entre celle des LDL et celle des HDL.

Au début des années 1980, il est montré que l'antigène Lp(a) mis en évidence par Berg, est une glycoprotéine de poids moléculaire élevé, appelée apoprotéine (a), caractéristique de la lipoprotéine Lp(a), dans laquelle elle est liée à l'apoprotéine B100 par un ou plusieurs ponts disulfures. Ainsi, la Lp(a)  apparaît comme une lipoprotéine immunochimiquement et physicochimiquement distincte des LDL, et non plus comme un simple variant des LDL comme on le pensait au départ.

Gaubatz 109 et Fless 110 montrèrent que le traitement de la Lp(a) par des agents réducteurs comme le dithiothréitol ou le bêta-mercaptoéthanol scinde la molécule en deux parties : une molécule d'apoprotéine (a), libre de tout lipide, et une lipoprotéine appelée Lp(a-). Cette particule est retrouvée, en ultracentrifugation, dans la zone de densité des LDL d'où la qualification de LDL "like".

Plus tard il est montré que l'antigène spécifique de la Lp(a) est porté par une glycoprotéine de haut poids moléculaire qu'on appela apoprotéine(a) et dont l'affinité pour les lipides se révéla très faible voire nulle, à tel point que pour certains elle ne devrait pas être classée dans les apoprotéines.

Ainsi il devint clair que la Lp(a) n'est pas un simple variant des LDL comme on le pensait jusque là, mais qu'elle constitue une entité immunochimiquement et physicochimiquement distincte des LDL.

La plupart des études récentes sur la composition chimique et la structure de la Lp(a) ont été faites par comparaison avec les LDL.

2.2.2. Isolement de la Lp(a)

2.2.2.1. Isolement et purification

Une première méthode est la précipitation sélective, par l'héparine et le chlorure de magnésium à des concentrations précises. Après plusieurs opérations de précipitation et de ressolubilisation, on aboutit à une fraction enrichie en Lp(a) [111]. Cette méthode, bien que simple à utiliser, présente deux inconvénients majeurs : elle est dénaturante et peu spécifique, aussi n'est-elle plus guère utilisée.

Une autre méthode est l'ultracentrifugation suivie d'une dialyse des isolats obtenus. La fraction enrichie en Lp(a) est isolée dans la zone de densité 1.053-1.120 g/ml 110 [112].

La purification des fractions enrichies en Lp(a) peut être effectuée par plusieurs techniques. La chromatographie de filtration sur gel a été très utilisée 111 [113].

La chromatographie d'affinité, d'emploi plus récent, utilise des colonnes d'immunoadsorbants spécifiques anti-apo(a) [114].

Actuellement, la chromatographie d'adsorption sur héparine-sépharose [115] et lysine-sépharose [116] tendent à remplacer les techniques précédentes.

2.2.2.2. Contrôle de la pureté des préparations

Cette étape fait appel à des méthodes immunologiques telles que :

       - l'immunodiffusion double d'Ouchterlony ou l'immunoélectrophorèse avec des antisérums anti-LDL et anti-Lp(a). Il ne doit se produire de précipité qu'avec l'antisérum anti apo(a) [117].

       - l'électroimmunodiffusion avec une partie de la plaque contenant des anticorps anti apo(a) et une partie contenant des anticorps anti LDL. Seules les fractions donnant une précipitation dans le gel anti apo(a) et pas dans le gel anti LDL sont considérées comme pures 109.

       - le western blotting

Technique d'identification des protéines par réaction avec des anticorps spécifiques. Après électrophorèse sur gel de polyacrylamide, les protéines séparées sont transférées sur une membrane de nitro-cellulose puis révélées par les anticorps.

2.2.2.3. Séparation de l'apo (a) et de la particule "LDL like" [Lp(a-)]

Le plus souvent, on procède par ultra centrifugation d'une solution de Lp(a) préalablement traitée par un agent réducteur. Cette méthode est basée sur le fait que l'apoprotéine B est solidement liée aux lipides et ne s'en dissocie pas sous l'action des réducteurs.

La pureté des fractions d'apo(a) et de Lp(a-) obtenues sont contrôlées par électrophorèse sur gel de polyacrylamide (PAGE) suivie d'un western blotting. La Lp(a-) migre plus loin dans le gel que la Lp(a) indiquant que la perte de l'apo(a) entraîne une diminution de taille. La Lp(a-) contient l'apoprotéine B et tous les lipides de la Lp(a), et présente des caractéristiques similaires à celles des LDL.

2.2.3 Constantes et propriétés physiques de la Lp(a)

2.2.3.1. Densité hydratée

La Lp(a) plasmatique est principalement retrouvée dans la zone de densité comprise entre 1,055 et 1,120 c'est à dire dans une zone intermédiaire entre celle des LDL (1,019-1,063) et celle des HDL2 (1,063-1,125) (Tableau IX) 109 [118]

Dans les conditions d'ultracentrifugation où les pré-bêtalipoprotéines flottent, la Lp(a) sédimente, c'est pourquoi cette dernière est aussi appelée "sinking prebetalipoprotein".

La Lp(a) peut également être trouvée dans d'autres zones de densité, pratiquement dans tout le spectre des lipoprotéines et cette propriété est liée à l'hétérogénéité de sa composition (Tableau X) [119].

Bien que sa densité moyenne, plus élevée que celle des LDL, se situe généralement entre les LDL et les HDL2, la Lp(a) de certains sujets a une densité de LDL.

La plus grande densité hydratée de la Lp(a) par rapport aux LDL est liée à sa composition : elle contient davantage de protéines que les LDL. Ou plus précisément le rapport protéines/lipides est plus important dans la Lp(a) alors que la quantité et la composition des lipides transportés sont proches de celles des LDL.

La Lp(a) contient, en plus de l'apoprotéine B100 (apoprotéine majoritaire dans les LDL), une molécule d'apoprotéine(a) responsable de l'hétérogénéité de la Lp(a).

2.2.3.2. Mobilité électrophorètique

          Acétate de cellulose ou gel d'agarose

Sur ces supports, la Lp(a) migre entre les bêta et les pré-bêtalipoprotéines ce qui lui a valu l'appellation de pré-bêta-1-lipoprotéine.

Ehnholm montre que la plus grande mobilité électrophorétique de la Lp(a) par rapport aux bêta-lipoprotéines est due à son contenu plus important en acide sialique et que la vitesse de migration varie selon les individus [120].

L'addition de cations divalents (Mg 2+) au gel d'agarose permet d'individualiser la Lp(a) en retardant la migration de toutes les lipoprotéines sauf celle de la Lp(a).

          Gel de polyacrylamide

L'électrophorèse sur gel de polyacrylamide en gradient discontinu d'acrylamide permet d'individualiser nettement la Lp(a) des autres lipoprotéines car sur ce support, la séparation se fait en fonction de la charge électrique et de la taille moléculaire. La Lp(a) s'immobilise du côté cathodique par rapport aux LDL [121].

          Isofocalisation

En focalisation isoélectrique, la Lp(a) s'immobilise à un pHi de 4,9 plus faible que celui des LDL qui est de 5,5 120.

2.2.3.3. Masse moléculaire et taille

Par la technique de filtration sur gel de sépharose en étalonnant avec 2 virus de poids moléculaires connus et avec des LDL, le poids moléculaire apparent de la Lp(a) est de 4,8×106 Da et le diamètre mesuré au microscopie électronique, est supérieur (25,5 nm) à celui des LDL (22,5 nm) 120. La forme est sphérique.

Par calcul en tenant compte du diamètre mesuré et d’une densité de 1,070 (1,035 pour les LDL) : le poids moléculaire de la Lp(a) est de 5,6 ×106 Da contre 3,6 ×106 pour les LDL.

Etudiant l’hétérogénéité de la Lp(a), Fless isole les Lp(a) de plusieurs individus, qu’il compare aux LDL autologues. Les poids moléculaires vont de 3,1 à 4,2 ×106 pour les Lp(a) et de 2,5 à 3,1 ×106 pour les LDL, et les diamètres de 21 à 24 nm pour les Lp(a) et de 20 à 21 nm pour les LDL 118.

Au total, la Lp(a) a une taille légèrement supérieure à celle des LDL et du même ordre que celle des IDL. Son poids moléculaire est plus important que celui des LDL. Il varie selon les individus et cette variation est liée à l'hétérogénéité de l'apo(a) (Tableau IX).

 

Lp(a)

LDL

Densité hydratée (g/ml)

1,055 - 1,120

1,019 - 1,063

Poids moléculaire (106 x Da)

3,6 - 4,0

selon l'isoforme d'apoprotéine(a)

3,0

Diamètre (nm)

25

21

Mobilité électrophorétique

pré-bêta-1

bêta

Point isoélectrique

4,9

5,5

Tableau IX : Propriétés physiques de la Lp(a) et des LDL

2.2.3.4. Viscosité

Fless a mesuré la viscosité intrinsèque de la Lp(a), de la Lp(a-) et de l'apoprotéine (a) libre provenant d'un même individu : la Lp(a-) et les LDL ont une viscosité comparable et qui est inférieure à celle de la Lp(a). L'apoprotéine(a) influencerait donc les propriétés hydrodynamiques de la Lp(a). Quant à l'apo(a) isolée, sa viscosité intrinsèque est beaucoup plus importante que celle des lipoprotéines [122].

En fait le traitement réducteur nécessaire à l’isolement de l’apoprotéine(a) modifie sa structure par rupture des ponts disulfures ce qui jette un doute sur les résultats de la mesure de la viscosité intrinsèque de l’apoprotéine(a) isolée [123].

2.2.3.5. Comportement au froid de la Lp(a) purifiée.

On s'est rapidement aperçu que la Lp(a) est fragile et que lorsqu'elle est conservée à 0°C, elle se dissocie en une particule de type LDL et une protéine apo(a).

En étudiant l'éventuelle activité enzymatique de la Lp(a), Jurgens constate que la Lp(a) préparée en l'absence d'inhibiteur des protéases, a tendance à s'agréger (troubles dans les solutions) et à précipiter au cours de sa préparation [124].

Les profils obtenus par électrophorèse sur gel de polyacrylamide (PAGE) de ces préparations montrent de nombreuses bandes de poids moléculaire variables.

En présence d'inhibiteurs, au contraire, les solutions restent claires durant les différentes étapes de la préparation, la Lp(a) ainsi obtenue donne une seule bande par PAGE, mais l'activité enzymatique recherchée est perdue.

La Lp(a) isolée et purifiée n'est pas stable à 4°C, ceci quelque soit le mode de préparation utilisé. Placée à 4°C dans un but de conservation, la Lp(a) commence à précipiter aux environs de 15°C. Ce phénomène est partiellement réversible et dépend de la concentration. Parvenue à 4°C, la Lp(a) continue de précipiter jusqu'à ce que sa concentration dans la solution soit de 1 à 2 g/l. A cette concentration et en dessous, les solutions de Lp(a) sont stables à 4°C. Tout ceci contraste nettement avec le comportement de toutes les autres fractions lipoprotéiniques connues dans le sérum humain 120.

En étudiant l'hétérogénéité de la Lp(a), Fless constate que parmi les Lp(a) qu'il a isolées, les plus denses (1,082) s'agrègent au froid alors qu'aucune des Lp(a) de faible densité (1,050) ne le fait. Il évalue la turbidité d'une solution de Lp(a) de densité égale à 1,082, par mesure de l'augmentation d'absorbance à 600 nm : le trouble apparaît à 13°C et augmente linéairement jusque vers 0°C.

La succinylation clarifie immédiatement les solutions et empêche l'agrégation 118.

Fless relie le phénomène d'agrégation à des différences de structure secondaire des apoprotéines des Lp(a), les Lp(a) s'autoagrégant ont un pourcentage d'hélice alpha moindre (34p.cent) et un pourcentage de structure désordonnée plus important

(54 p.cent) que celles qui ne s'agrègent pas (38 p.cent et 50 p.cent respectivement).

La Lp(a) purifiée sans inhibiteurs de protéases, montre des propriétés estérolytiques et protéolytiques pendant l'isolement. Dans ces conditions, les apo(a) sont dégradées en multiples peptides, la plupart des antigènes spécifiques de la Lp(a) sont perdus et une importante agrégation se produit 123.

De plus l'apo(a) isolée dans ces conditions tend à s'autoassocier et Fless suggère que ce sont les domaines de l'apo(a) normalement impliqués dans les interactions avec la surface de la Lp(a) qui sont aussi responsables de l'auto-association de l'apo(a) libre en solution .

Ces phénomènes pourraient avoir généré des artefacts lors des premières études.

Par la suite, des études confirmèrent l'instabilité des préparations de Lp(a) purifiées, et la nécessité de travailler en présence d'inhibiteurs des protéases (aprotinine) et de conservateurs, dès le prélèvement et à toutes les étapes.

2.2.4 Composition chimique

La plus grande richesse en protéines de la Lp(a) explique que sa densité hydratée soit supérieure à celle des LDL. Au début des années 1970, les techniques biochimiques montrent que la Lp(a) a une composition lipidique semblable à celle des LDL mais qu'elle contient davantage d'hydrates de carbone et de protéines 120.

                         [125]

Lp(a)

 % (masse)

LDL

 % (masse)

Protéines

variable selon les isoformes d'apo(a)

[ apo(a)   = 300 ]

[ apo(a) = 700 ]

 

 

(g x 103 /mol)

850 - 1 250

23,6

31,2

550

18,1

Cholestérol libre

(mol / mol)

750

8,1

7,2

725

9,2

Cholest. estérifié

(mol / mol)

2000

36,2

32,6

1900

40,8

Triglycérides

(mol / mol)

350

8,5

7,6

220

6,3

Phospholipides

(mol / mol)

1100

23,6

21,3

1000

25,5

Lipides / Protéines

 (masse)

3,2 -2,2

 

 

4,5

 

Tableau X : Composition chimique de la Lp(a) et des LDL

2.2.4.1. Les hydrates de carbone.

La Lp(a) contient 0,26 mg de sucres par mg de protéine ce qui en fait la plus fortement glycosylée des lipoprotéines plasmatiques 120. A titre de comparaison, les LDL ont 0,1 mg de sucres par mg de protéines (Tableau XI).

Ces sucres sont principalement liés aux apoprotéines 114 [126]. En colorant par le réactif de Schiff après migration des apoprotéines dans des conditions réductrices, Utermann montre que la majeure partie des hydrates de carbone est portée par l'apoprotéine(a) (28 p.cent pour l'isoforme de PM 500 kDa, 4529 aa) et non par l'apoprotéine B100 (9 p.cent) 112.

 

      120

Acide sialique

Hexosamines

Hexoses

Total

(mg / mg de protéine)

Lp(a)

66,0

84,0

108,0

258

LDL

10,4

28,2

54,6

95

Tableau XI : Composition en hydrates de carbone de la Lp(a) et des LDL

Le contenu en acide sialique, hexosamines et hexoses est multiplié respectivement par 6, 3, et 2 par rapport aux LDL.

La richesse de l'apoprotéine(a) en acide sialique est responsable d'une forte concentration de charges négatives en surface de la Lp(a) ce qui explique la plus grande mobilité électrophorétique de la Lp(a) comparativement aux LDL.

Les principales hexosamines de la Lp(a) sont la N-acétylglucosamine et la
N-acétylgalactosamine alors que dans les LDL seule la N-acétylglucosamine est présente en quantité significative.

Les hexoses de la Lp(a) sont le mannose et le galactose en quantité à peu près équivalentes. Les LDL semblent contenir davantage de mannose que de galactose 112 114.

2.2.4.2. Les lipides

Le rapport lipides / protéines de la Lp(a) est inférieur à celui des LDL compte tenu de la grande richesse en protéines de la Lp(a).

La composition lipidique des principales fractions de Lp(a) purifiées, isolées dans les densités comprises entre 1,05 et 1,08 est similaire à celle des LDL autologues 109 117.

Cependant, en terme de transport lipidique, la Lp(a) transporte des quantité de cholestérol et de phospholipides légèrement supérieures aux LDL et nettement plus de triglycérides (Tableau X).

La Lp(a) transporte de 0 p.cent à plus de 30 p.cent du cholestérol circulant selon les individus.

2.2.4.3. Les protéines

Elles représentent en masse, 24 à 31 p.cent de la molécule de Lp(a) selon les isolats étudiés. Gaubatz mesure par la méthode de Lowry le contenu en protéines des Lp(a) isolées chez 2 sujets, et montre qu’il est significativement plus important dans la Lp(a) (28-29 p.cent) que dans les LDL autologues (19-20 p.cent) 114.

Cette plus grande richesse en protéines est en accord avec la plus forte densité hydratée de la Lp(a) par rapport aux LDL.

Le constituant protéique majeur de la Lp(a) est l'apoprotéine B100, propriété partagée avec les LDL dont elle représente environ 98 p.cent des apoprotéines.

La Lp(a) possède en plus une glycoprotéine spécifique particulière, l'apoprotéine(a), liée à l'apoprotéine B100 par un ou plusieurs ponts disulfures. Lors des premières études sur la composition protéique de la Lp(a), on trouvait en plus de l'apoprotéine B100 et de l'apoprotéine(a), de l'albumine et des apoprotéines C 120 [127] .

Puis Utermann et Gaubatz montrent que la partie protéique de la Lp(a) est constituée d'une apoprotéine B100 identique à celle des LDL et d'une apoprotéine(a) : glycoprotéine de haut poids moléculaire responsable de ses propriétés physico-chimiques et immunologiques originales 112 114 .

En étudiant la partie protéique des Lp(a) de 6 sujets, par SDS-PAGE dans des conditions réductrices et non réductrices, et par immuno-diffusion double, Utermann montre la présence d'une apoprotéine B de poids moléculaire 513 kDa et une apoprotéine(a) dont le poids moléculaire est variable (de 0,8 à 1,5 fois celui de l'apoprotéine B).

Ceci a été récemment confirmé par Albers, par comparaison de la composition en amino acides de 4 préparations de Lp(a). Après détermination de la taille des apo(a) et connaissant les structures primaires des apoprotéines (a) et B100, ses calculs lui permettent de confirmer la très probable présence d’une seule molécule d’apo(a) par molécule de Lp(a)[128].

Utermann comparant ses résultats avant et après réduction, suggère que l'apoprotéine(a) est probablement liée à l'apoprotéine B100 par un pont disulfure 112.

L’apoprotéine(a) représente entre 34 et 59 p.cent et l’apoprotéine B entre 66 et 41 p.cent des protéines de la Lp(a) selon l’isoforme d’apoprotéine(a) présente dans la Lp(a).

Certaines études ont montré que 20 p.cent de la Lp(a) plasmatique contient de l'apoprotéine E en plus de l'apo(a) et de l'apoB-100. Les Lp(a) sans apo E sont riches en cholestérol estérifié, pauvres en triglycérides et trouvées surtout dans la zone de densité des LDL alors que les Lp(a) contenant de l'apo E sont enrichies en triglycérides et retrouvées dans une zone de densité plus faible. La Lp(a) contenant l'apo E semble se lier plus faiblement aux récepteurs de LDL des cellules en culture.

L'apoA-1 principalement associée aux chylomicrons et aux HDL peut aussi être associée à la Lp(a). Toutefois la signification fonctionnelle de la présence d'autres apoprotéines que les apo (a) et B dans la Lp(a) reste à déterminer [129].

          L'apoprotéine B100

C'est une protéine de poids moléculaire 550 kDa dont le gène est situé sur le chromosome 2.

La protéine mature comporte 4536 acides aminés et 9 p.cent d'hydrates de carbone.

Sa concentration plasmatique varie entre 0,50 et 2,00 g/l.

Il y a une molécule d'apoprotéine B100 par lipoparticule de Lp(a) comme dans les lipoparticules LDL.

          L'apoprotéine (a)

Voir paragraphe : 2.3.1.

Dr GUIMONT Marie-Christine - Thèse de Docteur en Pharmacie    page 76

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2.3. Composition chimique, structure, propriétés et génétique de l'apo(a)

2.3.1 Composition chimique

2.3.1.1. Isolement et purification de l'apolipoprotéine(a)

La Lp(a) préalablement purifiée est traitée par un agent réducteur, pour rompre la liaison entre l’apoprotéine(a) et l’apoprotéineB. L’apoprotéine(a) isolée par ultracentrifugation est ensuite purifiée selon différentes techniques. Il est important de travailler en présence d'inhibiteurs des protéases et dans des conditions aseptiques pour prévenir toute éventuelle dénaturation.

2.3.1.2. Composition chimique de l'apo(a)

          Acides aminés

La composition en acides aminés a été étudiée par Fless 122 Bersot 91 Gaubatz 114 qui ont obtenu des résultats comparables, les différences pouvant être attribuées à l'étude d'isoformes différentes d'apo(a).

                 122

apo(a)

apoB

composition moyenne
des protéines

Asp

8,2

10,3

10,0

Thr

10,0

6,5

6,5

Ser

6,3

8,6

7,8

Glu

12,0

11,8

9,4

Pro

11,4

3,8

5,5

Gly

7,4

4,8

7,6

Ala

7,0

6,1

8,1

Val

6,1

4,8

6,9

Met

2,0

2,2

1,6

Ile

2,0

5,2

4,6

Leu

4,2

13,0

7,3

Tyr

5,8

3,3

3,4

Phe

1,0

4,9

3,5

His

2,8

2,5

2,2

Lys

1,5

8,2

7,0

Arg

6,2

3,5

3,9

Trp

3,3

 

1,2

Cys

3,0

0,5

3,4

exprimé en pourcentage de molécules d'acides aminés

aa : différences supérieures à 50 p.cent par rapport à la concentration moyenne des protéines

Tableau XII : Composition en acides aminés de l’apo(a), de l’apoB et
de la moyenne des protéines

La composition en acides aminés de l'apoprotéine(a) est notablement différente de celle de la moyenne des protéines avec 8 amino-acides très différemment représentés (plus de 50 p.cent d’écart par rapport à la moyenne des protéines) (Tableau XII).

La richesse en proline de l'apoprotéine(a) est particulièrement intéressante à noter car cet acide aminé joue un rôle important dans la structure secondaire en favorisant les structures "désordonnées" au détriment des structures en hélice alpha et en feuillet plissé bêta 112.

Elle est aussi plus riche en thréonine qui constitue un site de O-glycosylation 122.

          Hydrates de carbone

L'apoprotéine(a) contient 5 sucres différents : mannose, galactose, galactosamine, glucosamine et acide sialique dans un rapport molaire approximatif de 3 : 7: 5 : 4 : 7 respectivement.

Le contenu total en sucres de l'apoprotéine(a) est de 0,28 g par g de protéine 122.

Les sucres sont situés dans des régions spécifiques de la molécule.

2.3.2 Structure

2.3.2.1. Structure primaire et homologie avec le plasminogène.

          Séquençage

La Lp(a) correspondant à une LDL contenant en plus l’apoprotéine (a), on a attribué à cette dernière le pouvoir athérogène particulier de la lipoprotéine entière.

Le caractère athérogène de la Lp(a) est resté une énigme, jusqu'au séquençage de l'apolipoprotéine(a) et de son ADN (cDNA) par une équipe de chercheurs de la firme Genetech, qui met en évidence une étroite homologie de structure avec le plasminogène, enzyme responsable de la fibrinolyse.

Le plasminogène est une glycoprotéine simple chaîne de 791 acides aminés et de poids moléculaire 92 000 Da, contenant 2 p.cent d’hydrates de carbone. Elle est constituée de plusieurs régions structurales avec, à partir de l’extrémité N-terminale: un peptide de préactivation suivi de 5 domaines (numérotés de 1 à 5) comprenant 78 à 82 acides aminés dont 6 restes cystéine et unis entre eux par de courtes séquences de liaison. Les 6 cystéines forment 3 ponts disulfures dans chaque domaine (entre les cystéines 1 et 6, 2 et 4, 3 et 5) responsables de leur structure tertiaire en triple boucle définissant les domaines de type kringle. Ces 5 domaines en boucles présentent des homologies entre eux. A l’extrémité C-terminale il y a un domaine protéase de type trypsine.

Le séquençage de l'apo(a) 116, et celui du cDNA de l'apo(a) 126 révèlent une importante homologie de séquence avec le plasminogène, sérine protéase plasmatique responsable de la fibrinolyse (Figure 12).

Les diverses régions codantes et non codantes du gène de l’apo(a) ont un pourcentage d’identité allant de 75 à 100 p.cent avec les régions correspondantes dans le gène du plasminogène [130].

Figure 12 : Homologie de séquence des cDNA de l'apo(a) et du plasminogène

Figure 12 : Homologie de séquence des cDNA de l'apo(a) et du plasminogène

Le séquençage de l’apoprotéine (a) montre que la séquence N-terminale est homologue au kringle 4 du plasminogène, qu’il existe un kringle 5 et que les domaines protéases des deux protéines présentent une importante homologie.

Le plasminogène est activé par l'activateur tissulaire du plasminogène (t-PA), par clivage au niveau d’un reste arginine situé dans la séquence d’activation.

La séquence d'activation de l'apoprotéine(a) diffère de celle du plasminogène :

Lys-Cys-Pro-Gly-Arg-Val-Val-Gly-Gly , pour le plasminogène

Lys-Cys-Pro-Gly-Ser-Ileu-Val-Gly-Gly , pour l'apo(a)

Pour Eaton cette mutation Arg ® Ser rend l'apoprotéine(a) non activable en enzyme par le t-PA, activateur physiologique du plasminogène ou par l’urokinase 116.

L'homologie de séquence a été confirmée par l'analyse des cDNA du plasminogène et de l'apo(a) 126.

Ainsi l'apo(a) est dépourvue des 3 premiers domaines du plasminogène, elle possède n copies du kringle 4 (n allant de 11 à plus de 50 selon les isoformes), une copie du kringle 5, un domaine protéase et une séquence d'activation.

Le cDNA séquencé par Mc Lean code pour une apoprotéine(a) de poids moléculaire 500 kDa, comprenant 37 copies du kringle 4. Il existe une très forte homologie intra-génique dans l'apoprotéine(a) puisque sur les 37 copies des 342 paires de bases des kringles 4, 24 ont la même séquence nucléotidique, 4 en sont très proches avec seulement 3 nucléotides différents et les autres diffèrent par 11 à 71 nucléotides.

Le 33ème kringle 4 a une délétion de 24 bases et le 36ème kringle 4 possède une cystéine supplémentaire, impliquée dans la liaison avec l'apoB.

Chaque domaine de type kringle de l’apo(a) est précédé et suivi par un peptide, l’ensemble s’étendant sur 114 acides aminés (Figure 13). L’union des peptides de début et des peptides de fin constitue les régions "inter-kringles".

Le kringle "élargi" est divisé en 7 segments : le segment 1 est le peptide de tête et comprend 11 acides aminés, suivi des segments 2 à 6 qui constituent le kringle proprement dit comprenant 78 ou 80 acides aminés et enfin le segment 7 ou peptide de fin qui comporte 25 acides aminés.

Figure 13 : Structures des kringles et du domaine inter-kringles

Figure 13 : Structures des kringles et du domaine inter-kringles

Les régions riches en sérine, thréonine et proline correspondent aux segments 7 et 1 donc aux régions inter-kringles. Ces régions ont une ressemblance avec les régions riches en thréonine et proline retrouvées dans les glycoprotéines d’adhésion et dans les immunoglobulines 135.

Des structures en kringle existent dans diverses protéines de la coagulation et de la fibrinolyse (plasminogène, prothrombine, t-PA, urokinase, facteur XII) et dans d’autres protéines comme la fibronectine (Figure 14)  141.

Figure 14 : Structures comparées du plasminogène, du t-PA, de l'urokinase et de la prothrombine

Figure 14 : Structures comparées du plasminogène, du t-PA, de l'urokinase
et de la prothrombine

Les kringles des protéines impliquées dans la coagulation et la fibrinolyse contiennent de 78 à 82 acides aminés 135.

L’homologie de l’apoprotéine(a) avec le plasminogène la distingue de toutes les autres apolipoprotéines connues. Sept apoprotéines (A-I, A-II, IV, C-I, C-II, C-III et E) ont dans leurs gènes des séquences apparentées, et dans leurs structures des régions en hélice alpha amphiphiles similaires . Les apoprotéines B et D ne sont pas apparentées à ce groupe.

                   Polymorphisme de taille

Utermann a montré que l’apoprotéine(a) présente un important polymorphisme de taille. Par la technique du western blotting il met en évidence 6 isoformes d’apoprotéine(a) différentes avec des masses moléculaires allant de 280 à 800 kDa (Tableau XIII). Chaque individu présente une ou deux isoformes distinctes donnant lieu à une quinzaine de phénotypes possibles.

De plus, il existe une association entre le phénotype d'apoprotéine(a) et la concentration de Lp(a) [131] [132].

Les variations de taille de l’apo(a) résultent d’ARN messagers de taille différente avec une relation linéaire et positive entre la taille des transcrits et la taille des protéines correspondantes déterminée par immunoblotting.

Les variations de taille de l’apo(a) apparaissent donc dues à des allèles différant par le nombre des répétitions en tandem, des séquences de 114 acides aminés homologues au kringle 4 du plasminogène [133].

Hixson avait obtenu des résultats similaires chez le Babouin [134].

Ainsi le polymorphisme est sous contrôle génétique et est lié à la longueur des chaînes polypeptidiques et non pas à un degré variable de glycosylation.

En effet, l'action de la neuraminidase (qui élimine l’acide sialique) n'altère pas l'hétérogénéité de l'apo(a) 116.

Kratzin étudie une isoforme d’apoprotéine(a) de poids moléculaire 570 kDa et montre que les domaines de type kringle de l’apoprotéine(a) sont unis par des séquences de liaison (inter-kringle) plus longues (36 a.a.) que celle qui unit les kringles 4 et 5 du plasminogène (26 a.a.) [135].

Les hydrates de carbone sont répartis le long de la chaîne d’apo(a) sous forme de liaisons O- et N- glycosidiques. Au niveau des séquences inter-kringles, il existe 6 sites potentiels de O-glycosylation (4 thréonines et 2 sérines) et au sein de chaque kringle, un site de N-glycosylation (Asn, Leu, Thr).

Il y a donc un grand nombre de sites théoriques de glycosylation (70 à 350) selon les isoformes) mais on ne sait pas lesquels sont réellement glycosylés [136].

Les régions inter-kringles ressemblent à des séquences existant dans d'autres protéines comme la chaîne a de la glycoprotéine Ib de la membrane plaquettaire, les chaînes légères d'IgG. Plusieurs courtes séquences dans les régions inter-kringles sont similaires à des séquences présentes dans des molécules d'adhésion intercellulaires. De plus le plus petit motif d'adhésion "Arg - Gly - Asp", présent dans de nombreuses macromolécules impliquées dans la thrombose est également présent dans le kringle 4-10 de l'apo(a) 136.

Plusieurs isoformes d'apo(a) ont été décrites avec des masses moléculaires allant de 280 à 800 kDa. L'électrophorèse sur gel de polyacrylamide-SDS en présence de β-mercaptoéthanol suivie d'un western blotting a permis à Utermann de définir 6 isoformes qui ont été nommées en fonction de leur mobilité respective par rapport à celle de l'apoB100 : Lp(a)-F, Lp(a)-B,  Lp(a)-S1,  Lp(a)-S2,  Lp(a)-S3,  Lp(a)-S4 131.

L'isoforme F (F pour fast) a une mobilité supérieure à celle de l'apoB100, l'isoforme B a une mobilité égale à celle de l'apoB100, et les isoformes S1 à S4 (S pour slow) ont une mobilité décroissante et inférieure à celle de l'apoB100 (Figure 15).

A mesure de l’augmentation de sensibilité des méthodes de phénotypage, un plus grand nombre d’isoformes d’apo(a) est mis en évidence. Gaubatz sépare 11 isofomes 132 , Kamboh distingue 23 isoformes [137] , et Marcovina parvient à une résolution au kringle près en révélant 34 isoformes d’apo(a) différant entre eux par

un seul kringle 4 (Figure 16) [138].

Figure 15 : Les 6 isoformes d'apoprotéine (a) séparées par Utermann [139]

Figure 15 : Les 6 isoformes d'apoprotéine (a) séparées par Utermann [139]

 

 

Isoforme d'apo (a)

Poids moléculaire (kDa)

selon  Kraft                180

Poids moléculaire (kDa)

selon  Ritter           404

F

<400

450

B

460

500

S1

520

530

S2

580

610

S3

640

670

S4

>700

710

Tableau XIII : Poids moléculaires et nombre de kringles des isoformes d'apoprotéine(a)

 

 

Figure 16 : Les 34 isoformes d'apoprotéine (a) mise en évidence par Marcovina

Figure 16 : Les 34 isoformes d'apoprotéine (a) mise en évidence par Marcovina

 

Les analyses au niveau moléculaire d’isoformes d’apo(a), ont permis d’affiner la connaissance de la structure primaire.

On distingue ainsi 10 types de kringles 4 nommés T1, T2, ... à T10, très homologues entre eux à de légères différence de séquence près. Leur homologie avec le kringle 4 du plasminogène va de 75 à 85 p.cent.

Dans chaque apo(a) il y a un seul kringle 4-T1 suivi de 3 à plus de 40 kringles 4-T2, puis les kringles 4-T3 à T10, chacun présent en un seul exemplaire comme le kringle 4-T1, et enfin un K5-T11. Le kringle 4-T9 contient une 7ème cystéine, non appariée et responsable de la liaison disulfure entre l'apo(a) et l'apoB (Figure 17).

Lackner a récemment démontré que c’est le nombre de copies du kringle 4-T2 qui supporte l’hétérogénéité de taille de l’apo(a) [140].

Il existe 2 types de kringle 4-T2 ( A et B ), dont la séquence d’acides aminés est identique mais qui diffèrent légèrement par leur séquence nucléotidique 136

   Figure 17 : Structure schématique du cDNA de l'apoprotéine (a)

                   La ligne supérieure représente les 38 kringles de l'apo(a) séquencée par McLean,
                   la ligne inférieure désigne les 10 types de kringle 4 différant par leur séquence d'acide aminés.

   Figure 17 : Structure schématique du cDNA de l'apoprotéine (a)

 

Il existe cependant d’importantes différences entre l'apo(a) et le plasminogène :

- la taille : le poids moléculaire du plasminogène est beaucoup plus faible (92 kDa) que celui de l’apo(a) (280 à 800 kDa),

- l’apo(a) est dépourvue des kringles 1, 2 et 3 du plasminogène,

- les kringles 4 de l’apo(a) possèdent des sites de N-glycosylation absents du kringle 4 du plasminogène,

- l’apo(a) contient 30 p.cent de sucre, le plasminogène 2 à 4 p.cent,

- l’apo(a) est dépourvue du site d’activation qui permet au plasminogène d’être activé en plasmine.

2.3.2.2. Structure secondaire

C'est l'organisation dans l'espace du squelette constitué par l'enchaînement des liaisons peptidiques --CO-NH-CO-NH--. Les relations stériques des acides aminés voisins les uns des autres d'après la structure primaire, peuvent être régulières (hélice a, feuillet plissé β) ou irrégulières.

Les études de dichroïsme circulaire après réduction permettent d’évaluer les proportions des divers types de conformation secondaire des protéines : hélice a, feuillet plissé β et structure "désordonnée".

Les résultats obtenus par Fless figurent dans le tableau XIV.

                              122

LDL

Apo(a)

Lp(a)

Hélice a

55

8

38

Feuillet plissé b

8

21

12

Structure

"désordonnée"

37

71

50

Tableau XIV : Structures secondaires comparées des LDL, de l'apo(a) et de la Lp(a), déterminée par dichroïsme circulaire

 

Fless explique l'importante viscosité intrinsèque de l'apo(a) par son fort pourcentage de structure désordonnée, alors que la viscosité de la Lp(a) est beaucoup plus faible. La valeur trouvée pour l'apo(a) isolée correspond plus à une protéine de conformation fibrillaire qu'à une protéine de conformation globulaire.

L'auteur fait d'ailleurs remarquer que la viscosité de l'apo(a) a été déterminée en milieu fortement réducteur ce qui, par rupture des liaison S-S, pourrait avoir augmenté la viscosité apparente par rapport à la viscosité réelle à l'état natif au sein de la Lp(a) 122.

En effet, la validité des comparaisons de structure dépend du présupposé que les structures secondaires des apoprotéines sont similaires dans la forme native (au sein de la lipoprotéine) et dans la forme purifiée délipidée. Or ceci n'est pas le cas pour de nombreuses autres apoprotéines qui sont riches en structures désordonnées sous forme délipidées et plus riches en hélices a sous forme lipoprotéique.

Les valeurs initialement trouvées pour le pourcentage de structure désordonnée et pour la viscosité se sont révélées inexactes après le séquencage de l'apo(a) et la découverte de l'homologie avec le plasminogène et la présence des nombreux kringles 116 .

En effet, lors des traitements réducteurs tous les ponts disulfures intra-kringle sont rompus entraînant une forte modification de structure secondaire caractérisée notamment par une augmentation artéfactuelle des structures "désordonnées" et de la viscosité apparente.

2.3.2.3. Structure tertiaire

La chaîne d'acides aminés de l'apo(a) possède des structures en boucle, voisines de celles du plasminogène. La chaîne d'acides aminés du plasminogène est repliée sur elle même, sous forme de 5 structures en boucles, numérotées de 1 à 5 et suivies par un domaine protéase et une séquence d'activation.

Ces structures appelées kringles sont des domaines polypeptidiques non catalytiques caractérisés par une certaine homologie de séquence et par un repliement particulier en triple boucle maintenu par 3 liaisons disulfures intra-caténaires (Figure 13).

Les domaines kringles, décrits pour la première fois en 1975 à propos de la prothrombine existent dans d’autres protéines : les protéases de la coagulation et de la fibrinolyse, les protéines du Complément et la fibronectine [141] .

Les kringles sont considérés comme le support de la spécificité de liaison des protéines qui les contiennent.

2.3.3 Propriétés de l’apoprotéine (a)

2.3.3.1. Hydrophilie

Le contenu important en sucre et en acide sialique de l’apo(a) en fait une protéine hydrophile à la différence de la plupart des apoprotéines structurales et confère à la Lp(a) un caractère plus hydrophilie que les LDL.

Cette propriété permet d’expliquer :

     - la mobilité électrophorétique plus importante de la Lp(a) par rapport aux LDL,

     - le corollaire de son fort caractère hydrophile est évidemment une faible affinité pour les lipides et, dans la Lp(a) c'est l'apoB qui stabilise les lipides alors que l’apo(a) se trouve en surface de la molécule où elle interagit principalement avec l'apo B et avec l'environnement aqueux.

Des expériences avaient d’ailleurs suggéré le masquage de certains épitopes de l’apoB par l’apo(a) [142].

     - les interactions de la Lp(a) avec les protéoglycannes des parois vasculaires.

2.3.3.2. Propriétés liées à la présence des kringles

La parenté de structure de l'apo(a) avec le plasminogène a permis de montrer le rôle de l'apo(a) dans la coagulation.

Le plasminogène fait partie de la famille des protéases de la coagulation et de la fibrinolyse. Ces protéines : plasminogène, prothrombine, urokinase, t-PA, facteurs XII, VII, IX, X et protéine C ont des domaines homologues et les 5 premières possèdent des domaines en kringle (Figure 14).

Les domaines protéases de ces protéines ont tous une homologie avec la trypsine qui est l'archétype des sérine protéases.

En général, les domaines non catalytiques de ces protéines ont pour rôle de médier leur liaison à d’autres macromolécules : substrats (comme la fibrine et ses produits de dégradation), récepteurs cellulaires, activateurs, cofacteurs, inhibiteurs et ainsi de réguler les cascades de la coagulation et de la fibrinolyse.

L'apo(a) peut ainsi se lier à la fibrine (lysine), aux récepteurs cellulaires du plasminogène, aux structures du tissu conjonctif telles que glycosaminoglycanes 156, fibronectine [143], collagène, élastine, et à l’apoprotéine B dans la Lp(a).

Guevara compare les propriétés des différents kringles de l’apo(a) avec ceux de protéines impliquées dans la coagulation et la fibrinolyse dans le but d’identifier les modifications (délétions, insertions, substitutions) susceptibles d’influencer les interactions intra-kringle et la liaison aux ligands.

Les kringles 1 et 4 du plasminogène se lient à la lysine (des molécules de fibrine) avec une assez forte affinité et 19 acides aminés de ces kringles sont essentiels à la liaison.

La conservation de ces acides aminés a été utilisée comme critère pour évaluer le potentiel de liaison des divers kringles de l'apoprotéine(a).

Parmi les 11 types de kringles présents dans l’apoprotéine(a) clonée par Guevara,

            le K4-10 a la plus forte probabilité de se lier à la lysine / fibrine,

            le K5-11 a une probabilité beaucoup plus faible, proche de celle du K5 du plasminogène,

            les K4-8, 6, 7 et 5 ont des probabilités faibles et décroissantes de liaison, comparables à celles des K2 et K3 du plasminogène et,

            les K4-1, 2, 3, 4 et 9 ne montrent pas de potentiel de liaison 136.

Ainsi les kringles répétés de l’apo(a) (K4-2) qui sont les plus abondants ne semblent pas avoir de propriété de liaison aux restes lysine. C'est le kringle 4 de type 10 ( ou K-37) qui porte cette propriété, l'apo(a) peut donc se lier à la lysine.

De plus, ni le K4 type 2, ni le K4 type 9 (K-36) ne sont impliqués dans la liaison à la lysine, et le polymorphisme de longueur (lié à la répétition des K4 type 2) est sans relation avec les propriétés de liaison à la lysine.

La capacité de liaison avec la lysine des kringles est due à la présence de 7 acides aminés particuliers formant une poche appelée lysine binding pocket.

Chez le singe Rhésus, le remplacement d’un Trp par une Arg dans le K4 type 10 rend la poche liant la lysine beaucoup plus hydrophobe et l’apo(a) inapte à se lier à la lysine-Sépharose.

Chez l'Homme, 2 mutations peuvent se produire dans le kringle 4-T10 dont l'une, la mutation (Trp ® Arg) inhibe, chez l'homozygote, les propriétés de l'apo(a) de lier la lysine mais semble très rare. L'autre mutation : (Met ® Thr) respecte la propriété normale de liaison à la lysine et paraît très fréquente.

Scanu étudie la capacité de liaison à la lysine des Lp(a) de sujets à risque vasculaire et trouve 3 p.cent de sujets ayant une capacité de liaison égale à 50 p.cent de celle des témoins supposés sains suggérant un phénotype hétérozygote pour cette propriété [144].

Ceci peut avoir des implications cliniques si on considère que la plupart des études montrent un potentiel athéro-thrombogène des concentrations de Lp(a) supérieures à 0,20 - 0,30 g/l, mais pas toutes [145].

Si la capacité de liaison à la lysine est liée à la pathogénicité cardiovasculaire, (en permettant la liaison à la fibrine), les espèces d'apo(a) mutées ayant perdu cette propriété pourraient être relativement bénignes.

De même, les capacités de liaison à la lysine / fibrine pourraient varier entre les Lp(a) légères et denses selon le phénotype d'apo(a).

La Lp(a) aurait ainsi un niveau supplémentaire d’hétérogénéité structurale et fonctionnelle [146] .

2.3.3.3. Propriétés des régions inter-kringles

A part celles situées entre K4-6 et K4-7 et entre K4-10 et K4-11, qui ont 28 et 26 acides aminés, les autres régions inter-kringles en ont 36.

Riches en sérine, thréonine et proline, elles ont 6 sites de O-glycosylation et des similitudes avec des domaines trouvés dans d’autres protéines comme la zone charnière des IgA, ou la chaîne a de la glycoprotéine Ib plaquettaire. Plusieurs séquences plus courtes sont retrouvées dans les molécules d’adhésion inter-cellulaire, ou le kininogène de haut poids moléculaire 135.

2.3.3.4. Propriétés du domaine protéase

Le domaine sérine protéase de l’apo(a) (His 4371, Asp 4414, Ser 4500) est semblable à celui de la plasmine (His 602, Asp 645, Ser 740) et d’autres sérine protéases.

Jurgens 123 et Salonen [147] mettent en évidence une activité protéolytique de la Lp(a) et de l’apo(a) purifiée sur des substrats synthétiques utilisés pour mesurer l'activité des sérine protéases mais n’obtiennent pas d'activation par le t-PA, ou l’urokinase.

La Lp(a) et l'apo(a) isolées, ou en présence d'activateurs comme le t-PA, l’urokinase ou la streptokinase, ne montrent pas d'activité protéolytique dans les tests mesurant l'activité de la plasmine (temps de lyse des euglobulines). Le plasminogène est activé par clivage au niveau de l'Arg 560, qui dans l'apo(a) est remplacée par une Ser. Toutefois le séquençage de l'apo(a) n'a été réalisé que chez 2 sujets et les auteurs n'excluent pas que certains individus puissent avoir une apo(a) activable 126.

En effet, les similitudes de structure des domaines protéases de l’apo(a) et du plasminogène suggèrent des fonctions communes ou au moins apparentées.

Une interaction entre streptokinase et Lp(a) avec inhibition de l’activation du plasminogène a été montrée mais uniquement in vitro [148].

L’addition de Lp(a) en concentrations physiologiques à un plasma Lp(a-) a peu d’effet sur la fibrinolyse. Par contre si la streptokinase est incubée avec la Lp(a) puis ajoutée au milieu réactionnel, une nette diminution de l’activation du plasminogène est constatée [149] .

D'après ces résultats, la Lp(a) possède un pouvoir inhibiteur de l'activation du plasminogène. Mais d'autres résultats ne confirment pas ceci.

In vivo, la présence d’une Lp(a) en concentration élevée n’est pas corrélée avec une hypofibrinolyse chez des patients à risque d’infarctus du myocarde [150].

Il a même été suggéré que la lyse du caillot in vitro pouvait être augmentée par addition de Lp(a) [151].

2.3.3.5. Propriétés immunologiques

Avant même que le séquençage de l'apo(a) ne démontre l'homologie avec le plasminogène, une parenté structurale entre les 2 molécules était démontrée par des études immunochimiques.

Lors de Western-blotting destinés à mettre en évidence des isoformes d'apo(a), l'équipe de Kostner montre la présence d'une bande de PM 92 000 qui réagit avec les divers antisérums polyclonaux et avec des anticorps monoclonaux considérés comme spécifiques de la Lp(a). Cette bande correspond à une protéine présente dans tous les plasmas et se trouve dans la fraction de densité supérieure à 1,23 quand on isole la Lp(a) par ultracentrifugation. L'immunoélectrophorèse montre qu'il s'agit du plasminogène. De plus l'emploi de fragments de plasminogène (kringles 1+2+3, kringle 4 seul) montre que le ou les épitopes communs à l'apo(a) et au plasminogène sont situés dans le kringle 4, ce qui est confirmé peu après par le séquençage 149 .

Fless étudie les propriétés immunochimiques du complexe apoB-apo(a) obtenu par délipidation de la Lp(a). L'immunoréactivité de l'apo(a) dans ce complexe est 2 fois plus forte que dans la Lp(a) suggérant que la délipidation démasque des épitopes inaccessibles dans la Lp(a). L'imunoréactivité de l'apoB dans ce complexe est au contraire fortement diminuée (comme pour l'apoB obtenue par délipidation de LDL) suggérant des modifications de conformation par délipidation. Tout ceci corrobore que l'apoB est responsable de la liaison aux lipides alors que l'apo(a) interagit surtout avec l'apoB et avec l'environnement aqueux [152].

2.3.4. Génétique de l’apoprotéine(a)

2.3.4.1. Le gène de l'apoprotéine(a)

Le gène de l'apoprotéine(a) est situé sur le bras long (q 26-27) du chromosome 6, à

proximité du gène du plasminogène (Figure 18)  [153].

La structure du gène de l'apo(a) et son homologie avec le plasminogène sont illustrées par la figure 12.

Le gène de l’apo(a) résulte d’une duplication du gène du plasminogène, suivie de la délétion des régions codant pour les kringles 1, 2 et 3 et d’une mutation dans le domaine protéase.

Après une séquence non traduite en 5', vient une séquence codant pour un peptide signal hydrophobe (rôle dans la sécrétion), un grand nombre de répétition en tandem d'une séquence de 342 paires de bases codant pour le K4, les séquences du K5 et du domaine protéase et, enfin, une séquence non traduite en 3' 126.

Les séquences des K4 de l'apo(a) ne sont pas identiques. Le K4-1 et les 8 derniers K4 ( k4-3 à k4-10) diffèrent des K4 répétés (k4-2, types A et B) par 11 à 71 nucléotides. Les types A et B du K4-2 diffèrent entre eux par des substitutions nucléotidiques silencieuses. Deux nomenclatures sont utilisées pour désigner les K4 non identiques.(Figure 17)

Chaque domaine kringle est codé par 2 exons comme dans les autres gènes codant pour des structures en kringle (urokinase, t-PA, fact. XII...).

 

Figure 18 : Localisation chromosomique des gènes de l'apo(a) et du plasminogène

Figure 18 : Localisation chromosomique des gènes de l'apo(a) et du plasminogène

 

L'important degré de répétition intra-génique du même domaine constitue un phénomène unique. D'autres gènes contiennent des séquences répétées en tandem (l'haptoglobine, de 1 à 6 pseudogènes répétés en tandem), mais dans l'apo(a) leur nombre et leur degré d'homologie sont sans précédent et en faveur d'une origine relativement récente du gène [154].

2.3.4.2. Un locus polyallélique

Les variations qualitatives de l'apo(a) dans les populations humaines sont déterminées par un seul locus, celui du gène de l'apo(a).

Le polymorphisme de longueur du gène de l’apo(a) est tout à fait inhabituel pour 2 raisons. Premièrement dans la plupart des gènes humains, les unités répétées comprennent entre 2 et 64 paires de bases alors que l’unité répétée dans l’apo(a) est beaucoup plus longue, 5,5 kilobases. Et deuxièmement, à la différence des autres polymorphismes de longueur, celui de l’apo(a) comprend des séquences codantes et des séquences non codantes 140.

L'hétérogénéité de taille des différents phénotypes d'apo(a) résulte de variants alléliques du gène. Dés 1987, Mc Lean avait postulé que l'hétérogénéité de taille de l'apo(a) résultait de variations du nombre de séquences codant pour le K4 dans les différents allèles d'apo(a). L'analyse directe de la région du gène codant pour les K4 a confirmé cette hypothèse. L'enzyme de restriction KpnI permet d'isoler des fragments contenant les séquences codant pour les K4. La taille des fragments obtenus varie par des multiples de la longueur codant pour un K4 [155].

La même équipe clone les fragments de restriction polymorphiques et compare leur séquence avec celle d'apo(a) déjà caractérisées. Ceci a permis de montrer que seul le k4-2 varie en nombre de copies. Le polymorphisme au niveau allélique est reflété par un polymorphisme comparable de la longueur de la glycoprotéine(a).

La présence au sein de ce gène, de domaines répétés ayant pratiquement 100 p.cent d'homologie entre eux, suggère de fréquentes expansions et contractions du locus. Il est probable que des recombinaisons homologues ajoutant ou éliminant des répétitions du K4, sont encore en train de se produire.

Les résultats d'études chez le babouin vont dans ce sens. Comme l'homme, le babouin possède l'apo(a) sous différents isoformes génétiquement déterminées. Les ARN hépatiques de babouins, d'isoforme connue ont été analysées par northern-blotting ce qui a permis de montrer que la taille des transcrits d'apo(a) varie entre 5,2 et 11,2 kb. Il y a une corrélation très significative entre la taille des transcrits et la taille des isoformes d'apo(a) 134.

Des recombinaisons homologues faisant varier le nombre des répétitions en tandem du domaine codant pour le kringle 4-2 sont la cause la plus probable des variations interindividuelles de l'apo(a).

2.3.4.3. Evolution du gène de l'apoprotéine (a)

Les protéases de la coagulation et de la fibrinolyse possèdent d'importants domaines non catalytiques liés au côté N-terminal du domaine protéase ce qui les distingue des simples protéases. Le rôle de ces domaines est de permettre la liaison des protéases à leur substrat, l'activation en enzyme, l'interaction avec les cofacteurs et inhibiteurs, et à travers ces interactions, de réguler les cascades de la coagulation et de la fibrinolyse. Ces régions sont essentielles à la spécificité de ces enzymes. On en distingue 4 principaux types : les kringles, les domaines vitamino K dépendants liant l'ion Calcium, les domaines en doigts, et les domaines du type facteurs de croissance. Ces 4 types de domaines correspondent à des unités génétiquement autonomes qui auraient fusionné avec les domaines protéases à différentes époques de l'évolution ( Figure 14)

L'importante similitude de séquence des 5 kringles du plasminogène suggère qu'ils sont apparus par duplication intra-génique. Le même phénomène est évoqué pour les 2 kringles du t-PA. D'ailleurs, le plasminogène et ses 2 activateurs sont plus étroitement apparentés entre eux qu'avec aucune autre protéine de la coagulation 141.

Les études de comparaison de séquence et les prédictions de structure secondaires ont montré que pendant l'évolution, les kringles ont conservé leur architecture générale et ont divergé vers la liaison à diverses protéines à partir d'un module ancestral commun, (probablement représenté par le matériel génétique codant pour le K4 du plasminogène) spécialisé dans la liaison aux protéines. Leurs différences de spécificité fonctionnelle sont dues à des modifications de conformation à la suite substitutions d'acides aminés [156].

Les gènes de l’apo(a) et du plasminogène sont étroitement apparentés et proviennent probablement d’une duplication récente du gène du plasminogène suivie de la délétion des exons codant pour les kringles 1 à 3, et de la multiplication des kringles 4 126. L’apoprotéine(a) apparaît comme un membre récent de la "super-famille" des protéases de la coagulation et de la fibrinolyse. Au cours de l’évolution, l’émergence de nouvelles protéines se fait souvent par duplication de gènes puis modification de séquence pour donner une nouvelle fonction.

Par des calculs basés sur le taux des substitutions de nucléotides dans les régions non traduites des gènes b de la globine des primates, l’émergence de l’apo(a) serait survenue il y a 40 millions d’années, au moment d'une divergence phylogénique chez les primates. D’ailleurs la Lp(a) a été mise en évidence chez certains primates non humains (où elle se révèle polymorphe comme chez l’homme) et pas chez d'autres, ni dans plusieurs autres espèces où on l’a cherché (lapin, rat, bovins).

La comparaison des cDNA de l’apo(a) humaine et du singe rhésus entre eux et avec ceux du plasminogène révèle que les 2 apo(a) sont très proches et possèdent la même homologie avec le plasminogène. Les différences observées concernent le kringle 5 qui est absent de l’apo(a) du singe, et le nombre de kringles 4 qui est plus important chez l’homme [157].

La découverte de la Lp(a) chez le hérisson (d’Europe puis d’Afrique) [158], confirmée récemment par le clonage du gène [159] a suscité plusieurs réflexions :

            - l’apo(a) serait peut être apparue avant la divergence des principaux ordres de mammifères et n’aurait été conservée que chez certains primates et dans de rares espèces.

            - l'apo(a) serait apparue plus d’une fois au cours de l’évolution des mammifères. Ceci a été récemment confirmé par comparaison des séquences d'ADN et par analyses phylogéniques. L'apo(a) humaine est apparue par duplication du gène du plasminogène pendant l'évolution récente des primates, il y a environ 40 millions d'années. Par contre l'apo(a) de type "multi kringles 3", qu'on retrouve chez le hérisson, a évolué par duplication indépendante du même gène il y a 80 millions d'années. Le gène du plasminogène a donc subi pendant l'évolution, 2 duplications indépendantes ayant produit 2 formes d'apo(a) dans 2 groupes d'espèces très éloignées phylogéniquement [160].

            - certaines espèces pourraient sécréter de la Lp(a), d’autres non 153 .

Le clonage du gène de l’apo(a) du hérisson montre que l’apo(a) du hérisson est différente de l’apo(a) humaine. Les gènes sont apparus indépendamment par multiplication de domaines différents du gène du plasminogène. L’apo(a) humaine résulte de la multiplication du kringle 4 du plasminogène qui contient 6 cystéines, et l’avant dernier dernier kringle 4 possède une 7ème cystéine permettant la liaison à l’apoB. Par contre l’apo(a) du hérisson provient d’une duplication du gène du plasminogène avec délétion de tous les domaines structuraux sauf le kringle 3 suivie d’une multiplication de ce domaine, lui conférant ainsi une certaine ressemblance avec l’apo(a) humaine. Chez le hérisson le kringle 3 du plasminogène possède 7 cystéines, alors que tous les kringles 3 sauf le dernier, ont perdu la 7ème cystéine. Chez l’homme c’est l’avant dernier kringle 4 (antépénultième kringle) qui possède une 7ème cystéine (Figure 19).

 

Figure 19 : Séquences comparées des cDNA du plasminogène et des apo(a) humaine et du hérisson

Figure 19 : Séquences comparées des cDNA du plasminogène et des apo(a) humaine
et du hérisson

 

Dans la structure du plasminogène, la 7ème cystéine du kringle 3 forme une pont disulfure avec une cystéine du kringle 2.

La conservation d'une 7ème cystéine (libre) dans l'un des kringles des apo(a) humaine et du hérisson, suggère qu'elle est utile à la liaison avec une protéine cible.

Bien qu'ayant perdu l'activité protéolytique, par substitution (homme) ou par délétion (hérisson), les 2 apo(a) forment une liaison disulfure avec l'apoB100 pour constituer une lipoprotéine, et sont capables de se lier à la lysine, à la fibrine et inhiber la liaison et l’activation du plasminogène .

Comme l'apo(a) humaine, l'apo(a) du hérisson comporte de multiples copies de kringles. La signification adaptative des multiples kringles de l’apo(a) est inconnue.

2.3.4.4. Ségrégation des différents allèles d'apo(a)

Utermann étudie la fréquence des isoformes F, B, S1 à S4, dans un groupe de 441 donneurs de sang non apparentés. Parmi ces sujets, 44 p. cent n'ont pas d'apo(a) détectable en western-blotting du fait de concentrations inférieures à la limite de sensibilité de la méthode et sont considérés comme ayant un allèle "nul". Ce concept d'allèle nul est opérationnel au sens où il inclut la limite de sensibilité de la méthode. Les 56 p. cent restant ont soit un phénotype simple bande pour 89 p.cent d'entre eux, soit un phénotype double bande pour 11 p. cent.

La constance des phénotypes d'apo(a) chez les sujets étudiés et le fait qu'aucun individu n'a plus de 2 isoformes d'apo(a) suggère que le polymorphisme de l'apo(a) est contrôlé par une série d'allèles codominants et par un hypothétique allèle nul.

L'auteur évalue la fréquence des différents allèles et compare avec la fréquence attendue d'après l'hypothèse génétique. Les différences sont non significatives, la ségrégation est en accord avec l'équilibre de Hardy-Weinberg  [a].

La même équipe étudie la transmission des allèles d'apo(a) chez 15 couples ayant un total de 44 enfants et fait les observations suivantes :

       - aucun individu n'a plus de 2 bandes d'apo(a),

       - aucun enfant n'a d'apo(a) qui ne soit pas également présente chez l'un de ses          parents,

       - les enfants de parents ayant 2 apo(a) ont l'une ou l'autre de ces apo(a),

       - les isoformes rares dans la population (F, B) sont régulièrement retrouvées   chez les enfants des sujets présentant ces phénotypes rares.

L'hypothèse de l'allèle nul opérationnel permet d'expliquer qu'un phénotype simple bande puisse être homozygote ou hétérozygote donc la possibilité d'un phénotype nul chez des enfants dont chacun des parents est simple bande.

2.3.4.5. Expression du gène de l'apo(a)

Voir  Régulation de la concentration

Dr GUIMONT Marie-Christine - Thèse de Docteur en Pharmacie    page 94

La lipoprotéine Lp(a) : son intérêt dans l'interprétation du bilan lipidique - Lipoprotein(a) Lp(a): its interest in the interpretation of the lipid profile

 

2.4. Structure de la Lp(a)

La Lp(a) possède une structure sphérique en conformité avec le modèle général des lipoprotéines. L'apoB seule suffit à stabiliser le coeur de lipides hydrophobes de la Lp(a). Comme dans les LDL, l'apoB est solidement fixée à la lipoprotéine et ne s'en dissocie pas au cours de l’ultracentrifugation après traitement par les agents réducteurs, à la différence de l'apo(a). Dans la Lp(a), l'apo(a) est liée à l'apoB-100 par un pont disulfure qui s’établit entre la cystéine libre de l'avant dernier kringle 4 de l'apo(a) et la région de l'apoB située entre les acides aminés 3345 et 3381, région portant le domaine de fixation au récepteur des LDL. Cette liaison n'a pas été directement mise en évidence mais l'avant dernier kringle4 N-terminal possède une cystéine supplémentaire qui pourrait se lier avec une cystéine de la région C-terminale de l'apoB. Ceci est cohérent avec l'absence d'apo(a) dans les lipoprotéines contenant l'apoB48, dépourvue de la moitié C-terminale de l'apoB100.

Ceci a des implications importantes pour le métabolisme et la pathogénie de la Lp(a). Il semble que l'apo(a) interagisse davantage avec l'apoB et avec l'environnement aqueux qu'avec les lipides (Figure 20) 110 118.

Les auteurs ayant montré que l'apo(a) libre présentait une tendance à l'autoassociation en solution aqueuse supposent que les domaines favorisant cette autoassociation pourraient correspondre aux domaines impliqués dans l'interaction de l'apo(a) avec la surface de la lipoprotéine Lp(a).

Il est également possible que les ponts S-S intracaténaires de l'apo(a) la rendent capable d'enlacer ou de s'imbriquer en surface sans liaisons covalentes directes supplémentaires 124.

Le comportement à la chaleur de la Lp(a) comparé à celui des LDL apporte des renseignements sur la structure : dans la couche périphérique, les interactions entre les lipides polaires et les apoprotéines sont plus fortes en présence d’apo(a).

Cette apo(a) a la même structure secondaire et les mêmes propriétés thermodynamiques dans la Lp(a) et sous forme isolée.

L’apo(a) s’enroule autour de la lipoparticule sans former de protrusions notables dans l’environnement aqueux, ce qui suggère qu’en plus du pont disulfure, l’apo(a) et l’apoB font l’objet d’interactions non covalentes qui induiraient une moindre mobilité des lipides polaires de la couche périphérique. L’apo(a) est liée en surface et n’influe pas sur la taille du coeur de lipides, ni sur l’arrangement des molécules lipidiques constitutives.

Prassl compare LDL et Lp(a) du point de vue composition chimique, calorimétrie et diffraction aux rayons X. La composition chimique montre un coeur plus riche en triglycérides dans la Lp(a) : le rapport cholestérol estérifié / triglycérides est égal à 10 ± 0,1 pour les LDL et à 6,8 ± 1,1 pour la Lp(a) confirmant les résultats plus anciens. Or ce rapport est important pour l’arrangement des lipides du coeur et leur stabilité à la température. Les différences de température de fusion observées sont liées à la composition du coeur et non à la présence d’apo(a). L’arrangement ordonné des lipides du coeur est moins stable dans la Lp(a) que dans les LDL, du fait de la plus grande richesse en triglycérides [161].

Les kringles 4 du plasminogène et de l'apo(a) ont la propriété de se lier à la lysine-sépharose. La séquence de l'apoB100 contient des régions riches en Lys et en Arg, ainsi l'apo(a) pourrait interagir avec ces régions à la surface de la Lp(a).

Griess obtient des résultats qui vont dans ce sens en montrant un masquage partiel de certains épitopes de l'apoB de la Lp(a) par l'apo(a), alors que la Lp(a-) se comporte comme les LDL [162].

 

Figure 20 : Structure schématique des LDL et de la lipoprotéine(a)

Figure 20 : Structure schématique des LDL et de la lipoprotéine(a)

2.5. Métabolisme

Malgré l'intérêt croissant que suscite la Lp(a), et la connaissance plus précise de sa structure, son rôle dans l’organisme et son métabolisme restent assez mal connus.

2.5.1. Concentration plasmatique

2.5.1.1. Constance intra-individuelle

A la naissance, la concentration de Lp(a) est environ 5 fois plus faible qu'à l'âge adulte. Dans les premiers jours de la vie, la concentration de l'apo B double alors que celle de la Lp(a) n'est pas significativement modifiée [163]. Il se produit ensuite une augmentation linéaire des concentrations de Lp(a) qui atteignent les valeurs de l'adulte entre 1 et 2 ans [164] [165]. Après 2 ans, l’âge influe peu sur la concentration de Lp(a) qui est relativement stable tout au long de la vie chez un individu donné, en particulier chez l’homme [166].

Il n’y a pas non plus d’association statistiquement significative entre la concentration de Lp(a) et l’indice de masse corporelle, le cholestérol total, le cholestérol des HDL ou des LDL [167] [168].

Cette constance est liée au contrôle génétique étroit de la concentration de Lp(a) comme l'ont montré les études familiales [169] .

2.5.1.2. Variabilité inter-individuelle

Par contre la concentration plasmatique de Lp(a) varie beaucoup entre individus avec une fourchette de valeurs s'étalant de 1 mg/l à plus de 2 g/l.

De plus la distribution des concentrations de Lp(a) ne suit pas une courbe gaussienne standard mais oblique vers les concentrations les plus basses de façon telle que plus des deux tiers des individus des populations caucasiennes ont une concentration inférieure à 0,3 g/l, alors que certains ont des taux supérieurs à 2 g/l par litre (Figure 21).

Utermann le premier met en évidence une forte corrélation inverse entre les concentrations sériques de la Lp(a) et le poids moléculaire des isoformes d'apo(a) : les individus ayant les plus petites isoformes ont les concentrations les plus fortes de Lp(a) et inversement 131.

Chez les sujets qui ont 2 isoformes d’apo(a), la concentration de Lp(a) est en accord avec la codominance des allèles : elle correspond à la somme plutôt qu’à la moyenne des concentrations déterminées par chacun des allèles [170].

D’ailleurs, chez les hétérozygotes, les 2 isoformes d’apo(a) se trouvent dans des particules Lp(a) séparables par ultracentrifugation [171]

Figure 21 : Distribution des concentrations sériques de Lp(a) chez les Caucasiens.

Figure 21 : Distribution des concentrations sériques de Lp(a) chez les Caucasiens.

          Selon le sexe

Il n’y a pas de différence notable de concentration entre hommes et femmes dans plusieurs populations [172] [173].

Cependant certains auteurs rapportent des concentrations légèrement plus élevées chez les hommes que chez les femmes dans certains groupes ethniques 168 [174].

Chez la femme, plusieurs études font état d’une légère augmentation avec l’âge, surtout après la ménopause [175] [176] .

          Selon l’ethnie

Chez les sujets d'origine africaine, la concentration moyenne de Lp(a) est environ le double de celle des Caucasiens, et de plus, la distribution des concentrations est quasiment gaussienne 172. Les Japonais ont des concentrations proches de celles des Caucasiens, les Chinois ont des taux très faibles, et certaines population Asiatiques ont des taux et distributions intermédiaires entre celles des Caucasiens et celles des Africains (Figure 22) 154 [177].

La signification serait génétique : le même gène est impliqué dans la détermination du phénotype de l’apo(a) et de la concentration plasmatique de Lp(a).

Les différences de distribution des concentrations sont en partie expliquées par des différences dans la fréquence des divers allèles d'apo(a). Le polymorphisme de l'apo(a) influe sur les concentrations de Lp(a) dans tous les groupes ethniques étudiés mais la part de variabilité des concentrations expliquée par le phénotype d'apo(a) est différent selon les populations. Chez les Caucasiens 40 à 70 p.cent des variations de concentration de la Lp(a) résultent des différences dans le nombre de répétitions du kringle 4 dans le locus d'apo(a) alors que dans les populations Africaines seulement de 20 p.cent de ces variations sont expliquées par le nombre de répétitions du kringle 4 177 [178].

Ainsi les différences dans les moyennes des concentrations ne sont pas totalement expliquées par les différences de fréquence des allèles puisque les concentrations moyennes associées à un même phénotype sont nettement différentes d'une ethnie à l'autre. Il y a d'autres facteurs génétiques et environnementaux qui influent sur les concentrations de Lp(a) (voir 4.4.1.).

 

Figure 22 : Distribution des concentrations de Lp(a) dans 7 groupes ethniques

Figure 22 : Distribution des concentrations de Lp(a) dans 7 groupes ethniques

          Selon le phénotype d’apo(a)

Un facteur important de la détermination du taux de Lp(a) est le phénotype de l'apo (a). Ainsi Utermann a montré qu'il existe une relation inverse entre la taille de l'apo (a) et la concentration de Lp(a) : les phénotypes B, S1, S2 sont associés aux concentrations élevées et les phénotypes S3 et S4 à des concentrations faibles (Figure 23) 131 139 169.

Avec les 6 isoformes d’Utermann, la taille de l’apo(a) rend compte de 40 p.cent des variations interindividuelles des concentrations de Lp(a).

Mais la technique d’immunoblotting utilisée par Utermann ne permettait pas de détecter les allèles associés aux faibles concentrations de Lp(a).

 

Figure 23 : Relations négatives entre phénotype / poids moléculaire des isoformes d'apo(a) et concentrations de Lp(a)

Figure 23 : Relations négatives entre phénotype / poids moléculaire des isoformes d'apo(a) et concentrations de Lp(a)

Des améliorations techniques, notamment l'électrophorèse  sur gel d'agarose SDS ont permis de séparer plus de 30 isoformes d'apo(a) et de diminuer à moins de 5 p.cent la proportion de sujets sans apo(a) détectable 138 . Avec cette technique, plus de 70 p.cent des individus sont hétérozygotes. Les techniques de Southern-blotting quantitatif après électrophorèse en champ pulsé de fragments de DNA génomique obtenus par action de l'enzyme de restriction KpnI ont montré que le polymorphisme de taille de l'apo(a) est lié au nombre variable de répétitions des séquences codant pour le kringle 4 dans le gène de l'apo(a). Le nombre de kringles 4 va de 11 à plus de 50 et environ 95 p.cent des individus sont hétérozygotes 155 169 .

Cette relation inverse taille de l'apo(a) - concentration de Lp(a) a été confirmée dans toutes les populations étudiées 177 [179] [180].

Des études de jumeaux et de fratries ont montré que les concentrations de Lp(a) étaient héréditaires et déterminées à plus de 90 p.cent par le gène de l'apo(a) .

Dans les populations caucasiennes, entre 45 et 70 p.cent de la variabilité des concentrations de Lp(a) est expliquée par le polymorphisme de longueur de l'apo(a). Entre 25 et 50 p.cent de cette variabilité serait liée à des variations de séquence dans ou à proximité du gène de l'apo(a) (de telles variations ont été mises en évidence dans la région 5' du gène). Les 10 p.cent restant sont attribués à l'influence d'autres gènes ou à des facteurs environnementaux 177 [181].

Par ailleurs, des variations de concentration de Lp(a) entre individus ayant le même génotype d’apo(a) ont été mises en évidence ce qui indique que des facteurs autres que le phénotype de l'apo (a) affectent le taux de Lp(a).

2.5.2 Paramètres métaboliques

Du fait des nombreuses similitudes avec les LDL, le métabolisme de la Lp(a) a surtout été étudié par comparaison avec celui des LDL.

Chez les sujets normaux à jeun, plus de 95 p.cent de l'apo(a) est trouvée dans les lipoprotéines de densité 1,055-1,120, sous forme complexée à l'apo B100. Le reste de l'apo (a) circule librement et est quantitativement négligeable.

L'apo(a) libre, du fait de son caractère hydrophile (à la différence de l'apo B) circule non associée à des lipides et est retrouvée dans la zone de densité supérieure à 1,20 g/ml 162. Pour certains cette fraction serait un artefact consécutif à la séparation des lipoprotéines.

Par contre plusieurs équipes ont montré qu'en situation postprandiale, une proportion non négligeable de l'apo (a) plasmatique est associée à des lipoprotéines riches en triglycérides de densité inférieure à 1,006 91 [182] .

Les paramètres métaboliques de la Lp(a) ont été déterminés par Krempler [183] [184] en étudiant 9 individus ayant des concentrations de Lp(a) allant de 0,01 à 0,71 g/l (Tableau XV).

 

 

Lp(a)

LDL

Demi-vie (jours)

3,9 ± 0,8

3,0 ± 0,6

Taux de catabolisme fractionnel (j -1)

0,26 ± 0,06

0,38 ± 0,07

Taux de synthèse (mg . kg . j -1)

4,6 ± 3,6

56 ± 10

Proportion dans le pool intravasculaire (p.cent)

76 ± 5

64 ± 9

Tableau XV : Paramètres métaboliques comparés de la Lp(a) et des LDL

Il apparaît que les similitudes entre Lp(a) et LDL ne sont pas seulement immunologiques et chimiques mais concernent également leurs paramètres cinétiques avec cependant des différences :

       - une demi-vie moyenne de la Lp(a) légèrement supérieure à celle des LDL,

       - un taux de catabolisme fractionnel moyen environ 20 à 30 p.cent plus faible que celui des LDL,

       - un taux de synthèse très variable (de 0,16 à 10,75 mg/kg/j) pour des concentrations de Lp(a) allant de 0,01 à 0,71 g/l,

       - une proportion circulante moyenne de 15 à 20 p.cent plus élevée que celle des LDL.

Une caractéristique du métabolisme de la Lp(a) est son indépendance vis à vis de celui des autres lipoprotéines, en particulier des lipoprotéines à apo B100.

Elle est synthétisée par le foie indépendamment des autres lipoprotéines et elle circule dans le plasma comme une particule intacte, sans se transformer en une autre lipoprotéine, ni échanger ses apoprotéines 183.

En dépit de son indépendance métabolique vis à vis des lipoprotéines à apo B, la capacité de synthèse de l'apoB100 est une condition préalable indispensable à celle de la Lp(a).

Les résultats de l'étude cinétique de Krempler font apparaître une corrélation étroite et positive entre la concentration de Lp(a) et son taux de synthèse 184. Les concentrations sériques des sujets étudiés ont été constantes pendant la durée de l'étude et sont considérées refléter un état stable du turnover de la Lp(a). Les concentrations de Lp(a) résultant de l'équilibre entre les taux de synthèse et de catabolisme, la stabilité de la concentration démontre un taux de synthèse égal au taux de catabolisme.

Des études cinétiques sur des sujets ayant le même phénotype d'apo(a) mais des concentrations très différentes de Lp(a) ont montré que les taux de catabolisme de la Lp(a) étaient semblables et que le déterminant essentiel de ces différences de concentration serait le taux de synthèse de la Lp(a) [185].

2.5.3 Synthèse

2.5.3.1. Nécessité de la présence d'apo B100

Depuis qu'on dispose de techniques de dosage sensibles de la Lp(a) on sait que cette lipoprotéine est présente dans le sérum de tous les individus possédant l'apo B100 113. En effet, Albers remarque que sur 1000 sujets étudiés, le seul individu présentant une concentration nulle de Lp(a), est par ailleurs atteint d'abêtalipoprotéinémie. La capacité de synthétiser l'apo B100 apparaît donc comme une condition nécessaire à la synthèse de Lp(a), ce que confirme Menzel en étudiant des sujets atteints d'abêtalipoprotéinémie 186.

L’abêtalipoprotéinémie est une maladie autosomique récessive caractérisée sur le plan biochimique par une absence quasi complète de lipoprotéines à apo B dans le plasma. L'anomalie biochimique précise est inconnue mais semble due à un défaut d'assemblage ou de sécrétion des lipoprotéines à apoB. En effet le gène de l'apo B est normal et on trouve dans le foie des ARNm d'apo B de taille normale et en concentration plusieurs fois supérieure à celle de sujets normaux.

On ne trouve pas de Lp(a) dans le plasma des patients atteints mais ils sont capables de synthétiser l'apo(a) ainsi que l'apo B d'ailleurs. Les concentrations plasmatiques d'apo (a) sont en moyenne 5 fois plus faibles (4,9 mg/l) que celles des sujets sains de même phénotype (14,5 mg/l), alors que les concentrations plasmatiques de l'apo B sont environ 100 fois plus faibles (6,8 mg/l) que celle des sujets sains (920 mg/l). De plus les 2 protéines sont trouvées principalement sous forme de complexe apo (a)- apo B100 dans une zone de densité supérieure à 1,21 g/ml donc pauvre en lipides [186].

2.5.3.2. Indépendance des autres lipoprotéines à apo B

Malgré ses nombreuses similitudes avec les LDL, la Lp(a) n'est pas le produit du catabolisme des autres lipoprotéines contenant de l'apo B100 (CM, VLDL ou LDL).

Krempler injecte à 3 sujets Lp(a+), des VLDL autologues radiomarquées à l'Iode 125 et un autre sujet reçoit les VLDL radiomarquées provenant d'un sujet Lp(a-). L'activité spécifique de l'apo B100 est mesurée pendant 5 jours, dans les VLDL, les LDL et la Lp(a). Les VLDL sont catabolisées en LDL tout en fournissant des apolipoprotéines aux HDL mais aucune radioactivité n'est retrouvée au sein de la Lp(a). L'absence de radioactivité dans les fractions Lp(a) montre qu'il n'y a pas de relation précurseur-produit entre l'apoB des VLDL ou des LDL et l'apo B de la Lp(a).

Chez un autre sujet Lp(a+), un régime sans graisse pendant 4 jours afin d'empêcher la formation de chylomicrons n'a pas entraîné de modification de la concentration sérique de la Lp(a). Connaissant les demi-vies des chylomicrons, des intermédiaires riches en triglycérides et de la Lp(a), si la Lp(a) était un produit de catabolisme des chylomicrons, on devrait observer une diminution de la concentration de la Lp(a). Les chylomicrons ne jouent donc pas de rôle significatif dans la formation de la Lp(a) 183 .

De plus après injection intraveineuse de Lp(a) radiomarquée à des volontaires plus de 96 p.cent de la radioactivité totale du sérum reste dans la fraction Lp(a).

Ceci semble indiquer que la Lp(a) sérique ne se transforme pas en une autre(s) lipoprotéine(s), et qu'elle n'échange pas ses apoprotéines avec d'autres lipoprotéines. Les auteurs concluent que la Lp(a) est sécrétée telle quelle.

Son métabolisme est indépendant de celui des autres lipoprotéines et notamment de celui des VLDL 183 184.

Cependant Bersot 91 montre la présence d’apo (a) dans les lipoprotéines postprandiales induites par un repas gras. Une régime alimentaire enrichi en graisses saturées et en cholestérol entraîne la formation de lipoprotéines de densité inférieure à 1,006 qui sont 3,5 fois plus activement captées par les macrophages que les VLDL trouvées à jeun. Il sépare 2 fractions dans ces lipoprotéines et celle qui se lie le plus activement aux macrophages est enrichie en apo(a). Il montre la présence d’apo(a) dans les remnants de chylomicrons et son absence dans les remnants de VLDL et les VLDL.

Ceci suggère que l'apo (a) peut être incorporée dans des lipoprotéines riches en triglycérides et est à rapprocher d’une étude ultérieure qui montre que, in vitro, la partie protéique de la Lp(a) possède une affinité pour les lipoprotéines riches en triglycérides 152.

Cohn étudie la distribution de l’apo(a) dans les lipoprotéines plasmatiques de 20 sujets, à jeun et après un repas riche en graisses. La concentration totale d’apo(a) n’est pas modifiée par le repas mais le pourcentage moyen trouvé dans les lipoprotéines riches en triglycérides passe de 2 p.cent (extrêmes 0 à 17) à jeun à 16 p.cent (extrêmes 0 à 83) après le repas. Le pourcentage d’apo(a) trouvé dans les lipoprotéines postprandiales est très variable selon les individus : corrélé positivement avec l’augmentation de la triglycéridémie et non avec les concentrations des lipides à jeun. Ces résultats pourraient avoir des implications dans la pathogénie de la Lp(a) puisque l’homme est plus souvent en état postprandial qu’à jeun. Chez certains individus les lipoprotéines postprandiales riches en triglycérides et contenant de l’apo(a) pourraient être impliquées dans l’athérogenèse et la thrombogenèse 182.

2.5.3.3. Lieu de synthèse

Le foie est considéré comme le principal organe responsable de la synthèse de la Lp(a). Les arguments en faveur de cette hypothèse proviennent des études suivantes :

     - Dans la particule Lp(a), l'apo(a) est toujours associée à l'apoprotéine B100 ce qui suggère que la liaison entre les deux protéines ne se fait pas dans l'intestin, tout au moins chez l'homme dont cet organe ne produit ni ne secrète d'apoprotéine B100. De plus des quantités notables de mRNA d'apo(a) ont été mises en évidence dans les cellules hépatiques humaines normales [187].

     - L'insuffisance hépatocellulaire est associée à des taux de Lp(a) diminués [188] [189] [190] .

     - En utilisant la transplantation hépatique comme modèle de synthèse in vivo, Kraft montre que les patients ayant eu une transplantation hépatique expriment le phénotype d'apo (a) du donneur. Il sépare les isoformes de l'apo (a) par SDS-PAGE suivie d'un westernblotting et détermine les concentrations de Lp(a) chez 18 patients avant et après transplantation.

Chez 14 des 18 patients on constate un changement significatif (d’un facteur supérieur à 2) de la concentration sérique de Lp(a). Les changements se produisent dans les deux sens : des fortes vers les faibles concentrations pour 6 patients, des faibles vers les fortes concentrations pour les 8 autres patients.

Les phénotypes d'apo(a) sont également modifiés avec passage :

              - d’un phénotype nul (apo(a) non détectable) vers un phénotype simple ou double bande,

              - d’un phénotype simple bande vers un phénotype nul,

              - d’un phénotype simple ou double bande vers un autre phénotype.

Etant donnée la constance intra-individuelle de la concentration de Lp(a) et la détermination génétique du phénotype de l'apo(a), ces résultats démontrent le rôle quasi-exclusif du foie dans la synthèse de la Lp(a) plasmatique.

Chez les sujets pour lesquels le sérum du donneur était disponible, il a pu être montré que le phénotype observé chez le receveur après transplantation est celui du donneur [191].

     - D'autre études ont confirmé que le foie est bien le site principal de synthèse de l'apo(a).

Tomlinson a étudié l'expression des mARN de l'apo(a), de l'apo B et du plasminogène dans les tissus du singe rhésus et a montré que le mARN d'apo(a) est abondant dans le foie, présent en beaucoup plus faibles quantités dans les testicules (3 p.cent de la concentration hépatique) et le cerveau (1 p.cent de la concentration hépatique), et absent dans le coeur, l’intestin, le poumon, la surrénale et le pancréas.

Ainsi, l'apo(a) peut être synthétisée indépendamment de l'apoB100 et n'est pas co-transcrite avec le gène du plasminogène.

Il est également intéressant de noter que les testicules et le cerveau sont des organes isolés de nombreuses molécules plasmatiques par des barrières spécifiques mais que certaines de ces molécules sont synthétisées in-situ (plasminogène, céruléoplasmine, transferrine, apo E pour le testicule, apo E pour le cerveau). Il est donc possible que l'apo(a) ait des fonctions localement importantes et indépendantes de celles de la particule Lp(a) circulante.

Ceci confirme le rôle majeur du foie dans la synthèse de l'apo(a), même si on peut trouver occasionnellement cette glycoprotéine dans des lipoprotéines d'origine non hépatique [192].

2.5.3.4. Mécanisme

White étudie la synthèse de l’apo(a) et l’assemblage de la Lp(a) dans les hépatocytes de babouins en culture et suggère que l’apo(a) est sécrétée sous forme libre dans le milieu de culture où elle se lie ensuite à l’apoB par un pont disulfure [193].

Pour Franck aussi, l’assemblage de la Lp(a) se fait en dehors des cellules ou à leur surface, et s'effectue en 2 étapes :

            - un ou plusieurs restes lysine de l’apoprotéine B s’associent aux sites liant la lysine du kringle 4 de type 6 de l’apo(a), formant un complexe lâche. Les kringles 4 de type 5, 7 et 8 , qui possèdent des sites liant faiblement la lysine contribuent mais de façon moindre à l'interaction initiale non covalente entre apo(a) et apo B.

Cette étape est analogue au mécanisme d’interaction du plasminogène avec les restes lysine de la fibrine.

            - puis une liaison disulfure se produit entre la cystéine 78 du kringle 4 de type 9 et la cystéine située en 3734 de l’apoprotéine B. L’intervention d’une enzyme est probable mais n’a pas été démontrée [194].

Ce mode de formation de la Lp(a) est en accord avec les études effectuées chez la souris transgénique. Chez les souris transgéniques pour l’apo(a) humaine, l’apo(a) circule sous forme libre et ne se lie pas aux LDL des animaux. Après perfusion de LDL humaines (et pas avec les VLDL), il se forme de la Lp(a) semblable à celle trouvée chez l’homme. Les animaux doublement transgéniques, pour l’apo(a) et l’apoB100 humaines, synthétisent directement de la Lp(a) "humaine" [195] [196].

De plus les concentrations plasmatiques d’apo(a) sont plus élevées chez les souris doublement transgéniques que chez celles exprimant seulement l’apo(a), suggérant un catabolisme plus rapide de l’apo(a) non complexée sous forme de lipoprotéine.

Ces résultats sont également en accord avec l’absence de Lp(a) chez les sujets abêtalipoprotéinémiques qui sont pourtant capables de synthétiser l’apo(a) 186.

Il faut de plus que les LDL aient une structure normale pour que la Lp(a) puisse se former. Ceci a été montré dans 2 maladies métaboliques :

            - La dysbêtalipoprotéinémie.

Certaines mutations de l’apoB (arginine 3500 remplacée par la glutamine) rendent les LDL incapables de se fixer à leur récepteur. Les LDL des homozygotes ont une capacité à former la Lp(a) diminuée de 50 p.cent par rapport à celle de sujets normaux, lorsqu’on les met en présence d’apo(a) recombinante. Ceci laisse penser que les restes cystéines et lysines responsables de la liaison avec l’apo(a) sont situés au voisinage du domaine de liaison au récepteur LDL [197].

            - Le déficit génétique en LCAT

Responsable d’une absence presque totale de cholestérol estérifié, son impact sur la composition des lipoprotéines plasmatiques est important.

Steyer décrit dans 2 familles, 5 homozygotes présentant une absence complète de Lp(a) et d’apo(a) dans le plasma. Les LDL de ces sujets ont au microscope électronique une morphologie et une composition chimique anormales, qui sont corrigées par administration de LCAT ce qui les rend capables de combinaison avec de l’apo(a) recombinante [198].

De même, le fait que les souris transgéniques pour l’apo(a) ne forment pas de Lp(a) avec leurs propres LDL suggère des différences de structure avec les LDL humaines.

2.5.4 Catabolisme

Selon Krempler, le taux de catabolisme fractionnel de la Lp(a) circulante est en moyenne de 0,24 à 0,39 /j pour des concentrations de Lp(a) allant de 0,01 à 0,76 g/l sans qu'il apparaisse de corrélation entre ces deux variables 184 [199].

Le mécanisme de ce catabolisme n'est pas complètement élucidé.

2.5.4.1. Place du récepteur des LDL

Utermann montre que les sujets atteints d'hypercholestérolémie familiale hétérozygote (nombre de récepteurs des LDL diminué de 50 p.cent environ) ont des concentrations de Lp(a) 3 fois supérieures à celles des témoins normaux, et ceci n'est pas lié à une plus grande fréquence de phénotypes associés à des concentrations élevées [200].

Perombelon étudiant la Lp(a) dans 2 familles présentant une anomalie congénitale de l'apoB100 empêchant la liaison aux récepteurs des LDL (R-LDL), met également en évidence des concentrations de Lp(a) plus élevées chez les sujets atteints que chez les sujets indemnes [201].

Les résultats de ces 2 études ajoutés au fait que LDL et Lp(a) ont d'importantes similitudes structurales et partagent l'apo B100 (ligand permettant la liaison aux R-LDL) ont suggéré que le récepteur des LDL pouvait jouer un rôle important dans le catabolisme de la Lp(a). Suite aux travaux de Goldstein et Brown sur le récepteur des LDL 13, de nombreuses études sur l'interaction de la Lp(a) et du R-LDL ont été publiées mais ont abouti à des résultats contradictoires.

          Etudes montrant un rôle du R-LDL dans le catabolisme de la Lp(a)

Plusieurs études in vitro montrent que la Lp(a) est capable de se fixer aux récepteurs B/E puis d'être dégradée dans les cellules en culture.

                   - En utilisant le modèle des souris transgéniques, Hoffmann montre que la Lp(a) se lie avec une forte affinité aux R-LDL et qu'elle peut entrer en compétition avec les LDL pour la liaison aux récepteurs. La Lp(a) subit ensuite le catabolisme intracellulaire avec, comme pour les LDL, une augmentation de l'estérification intracellulaire du cholestérol. Il montre que la Lp(a) (ainsi que les LDL) est catabolisée plus rapidement par les animaux génétiquement modifiés exprimant le gène du récepteur des LDL humain que par les animaux témoins [202].

                   - Krempler montre que la Lp(a) se lie avec une forte affinité aux mêmes récepteurs cellulaires que les LDL mais avec une capacité maximale de liaison de 30 à 40 p.cent plus faible que celle des LDL. Il observe de plus une corrélation positive entre le taux de catabolisme fractionnel de la Lp(a) et celui des LDL. Ceci va dans le sens d'un rôle du R-LDL dans le catabolisme de la Lp(a), tout au moins chez les sujets normolipidémiques 199.

                   - Armstrong montre que la Lp(a) est capable de se fixer au R-LDL des fibroblastes humains. Elle est internalisée puis dégradée avec une affinité bien moindre que celle des LDL. Le maximum de la capacité de dégradation à saturation du récepteur n'est que de 25 p.cent par rapport aux LDL et à la Lp(a-) 115 [203].

La Lp(a) se révèle moins efficace que les LDL pour :

       - diminuer l'activité des R-LDL (rétro-contrôle négatif),

       - supprimer la synthèse intracellulaire de cholestérol,

       - stimuler la réestérification du cholestérol dans les cellules.

Comme l'interaction se fait par l'intermédiaire de l'apo B de la lipoprotéine et que la Lp(a-) présente des interactions très similaires à celles des LDL, la présence d'apo(a) pourrait diminuer l'interaction particule-récepteur par un phénomène d'encombrement stérique avec masquage de la région de l’apoB liant le récepteur.

                   - Steyer et Kostner étudient la capacité de Lp(a) purifiées et présentant des phénotypes d'apo(a) différents à entrer en compétition avec les LDL radiomarquées pour la fixation aux R-LDL de cellules surrénaliennes bovines et de fibroblastes humains. La Lp(a) native est capable de déplacer les LDL radiomarquées de leur liaison aux récepteurs mais de façon moins efficace que les LDL froides ou la Lp(a-) : pour obtenir un déplacement de 50 p.cent il faut un excès de Lp(a) 7,5 fois plus important qu'avec la Lp(a-). Les Lp(a) avec les six différents phénotypes d'apo(a) selon Utermann se comportent de façon similaire ce qui laisse supposer que l'interaction est indépendante du PM de l'isoforme d'apo(a) [204].

Les résultats de ces études semblent apporter une explication simple aux concentrations élevées de Lp(a) observées chez les sujets atteints d'hypercholestérolémie familiale hétérozygote. En effet, si le catabolisme de la Lp(a) dépend des R-LDL, une diminution de leur nombre devrait entraîner une augmentation de la concentration de Lp(a) par défaut de catabolisme.

Toutefois, plusieurs observations vont à l'encontre d'une explication aussi simple :

                   - Si une anomalie de structure des récepteurs-LDL entraîne bien une augmentation des concentrations de Lp(a), il a par contre été observé qu'une mutation de l'apoB100 inhibant la liaison aux récepteurs n'augmentait pas les concentrations de Lp(a) 154.

                   - Les médicaments hypolipidémiants qui agissent en augmentant l'activité des R-LDL (résines, inhibiteurs de l' HMG Co-A réductase) ne semblent pas capables d'abaisser les concentrations de Lp(a) [205] [206].

                   - Krempler a montré chez un sujet atteint d’hypercholestérolémie familiale homozygote, que le taux de catabolisme fractionnel de la Lp(a) est nettement moins diminué (81 p.cent de celui des sujets normaux) que celui des LDL (54 p.cent de celui des sujets normaux). Ces lipoprotéines dont le catabolisme reste notable sont donc dégradées par une voie ne faisant pas intervenir les récepteurs-LDL. Il existe donc, au moins chez les sujets dépourvus de récepteur-LDL, une voie de catabolisme relativement efficace de la Lp(a) 199.

                   - Les différences de concentration interindividuelles sont liées à des différences de taux de synthèse plutôt qu'à des différences de taux de catabolisme 185.

Ces études ont été faites avant que l'on connaisse les liens entre le taux de synthèse (concentration circulante) et les allèles d'apo (a). Ainsi il faudrait connaître les cinétiques des Lp(a) de sujets ayant des génotypes différents au niveau des loci apo(a) et R-LDL, ainsi que les caractéristiques de liaison au R-LDL, de Lp(a) produites par les différents allèles d'apo(a).

          Etudes montrant que le R-LDL joue un rôle mineur voire inexistant

                   - Maartman-Moe et Berg, comparent l'interaction de la Lp(a) et de LDL radiomarquées avec des fibroblastes en culture provenant de sujets normaux, de sujets atteints d'hypercholestérolémie familiale hétérozygotes et homozygotes.

Alors que la captation et la dégradation des LDL sont nettement diminuées dans les fibroblastes pathologiques, les trois types de fibroblastes lient et dégradent la Lp(a) en quantité pratiquement équivalente. De plus la présence de Lp(a) en concentrations croissantes dans le milieu extra-cellulaire n'influe pas la liaison des LDL aux fibroblastes mais entraîne une diminution de leur dégradation. Il n'y a pas de compétition pour la liaison aux récepteurs.

La Lp(a) est donc captée et dégradée par les fibroblastes en culture comme les autres lipoprotéines, mais par un voie autre que celle du R-LDL. En effet :

       - il n'y a pas de phénomène de saturation caractéristique de la liaison à un récepteur,

       - il n'y a pas de compétition entre Lp(a) et LDL pour le R-LDL,

       - captation et dégradation de la Lp(a) sont comparables dans les fibroblastes normaux ou provenant de sujets atteints d'hypercholestérolémie familiale hétérozygote ou homozygote.

Les auteurs concluent que la Lp(a) n'est pas un ligand pour le R-LDL et qu'elle est principalement catabolisée par la voie indépendante des récepteurs et qui est plus athérogène [207].

                   - Les résultats de Armstrong, s'ils confirment que la Lp(a) peut se fixer sur les R-LDL des fibroblastes, mettent en évidence une capacité d'internalisation et de dégradation de la Lp(a) inférieure à celle des LDL. Ainsi, la dégradation de la Lp(a) par cette voie entraîne bien une diminution de l'activité de l'HMG-CoA réductase mais la capacité maximale de dégradation de la Lp(a), à saturation du récepteur n'est que de 25 p.cent par rapport aux LDL et à la Lp(a-).

L'interaction entre Lp(a) et R-LDL se ferait par l'intermédiaire de l'apoB de la Lp(a), l'apo(a) étant responsable de la plus faible affinité par rapport aux LDL. En effet la Lp(a-) se comporte de façon très similaire aux LDL tant pour la liaison que pour l'internalisation et la dégradation 115.

                   - Soutar dans une étude familiale, ne montre pas de différence entre les concentrations de Lp(a) des sujets atteints d’hypercholestérolemie familiale et des sujets normaux ayant le même phénotype d'apo(a) [208].

                   - De même, l'étude de sujets hypercholestérolémiques par Harkes puis Vessby confirment que les R-LDL ne jouent pas un rôle important dans le catabolisme de la Lp(a) 206 [209].

En effet, la Lp(a) peut être prise en charge par le R-LDL mais :

       - d'une part, les concentrations plasmatiques de LDL sont de loin supérieures à celles de la Lp(a),

       - d'autre part, le taux de catabolisme journalier de la Lp(a) n'est que légèrement diminué dans l'hypercholestérolémie familiale homozygote,

       - l’administration de médicaments qui augmentent le nombre des récepteurs des LDL est sans effet sur les concentrations de Lp(a) [210].

Tout ceci suggère que cette voie ne joue pas un rôle important.

2.5.4.2. Place des macrophages

Les Lp(a) fraîchement isolées du plasma et incubées avec des macrophages de souris, n'entraînent pas d'accumulation de cholestérol intracellulaire, tout comme les LDL "fraîches". Par contre l'incubation de Lp(a) préalablement complexée avec du sulfate de dextran ou avec des Ac anti Lp(a) avec ces mêmes cellules aboutit à une augmentation massive de cholestérol estérifié intracellulaire comme avec des LDL complexées [211] [212]. Les auteurs concluent que la Lp(a) native interagit peu avec les macrophages, comme les LDL natives, et que l'athérogénicité in vivo de la Lp(a) pourrait être le fait de Lp(a) modifiées.

La Lp(a) est en effet oxydable comme le sont les LDL. Elle est capable de se fixer avec une forte affinité sur les récepteurs de lipoprotéines modifiées des macrophages, mais les capacités d’internalisation et de dégradation sont plus faibles qu’avec les acétyl-LDL.

La Lp(a), une fois fixée pourrait rester à la surface des macrophages, ce qui favoriserait les modifications oxydatives suivies de l’internalisation et de la formation de cellules spumeuses [213].

Ces résultats ont été confirmés par Snyder lors d'une étude similaire sur des macrophages en culture. Le récepteur scavenger est peu efficace pour cataboliser la Lp(a) native alors que la Lp(a) modifiée est préférentiellement dégradée par cette voie [214].

2.5.4.3. Interaction avec les protéines de la matrice extra-cellulaire

Kostner montre que la préincubation de la Lp(a) ou de l’apo(a) avec des fibroblastes déficients en récepteurs des LDL dans un milieu sans lipoprotéines, entraîne une augmentation de liaison des LDL à ces cellules. Ce phénomène est indépendant des récepteurs LDL et des récepteurs du plasminogène et serait lié à la fixation de la Lp(a) ou de l'apo(a) aux protéines de la matrice intercellulaire (fibronectine, protéoglycannes). Une fois fixée, la Lp(a) ou l'apo(a) peut fixer des lipoprotéines à apoB sur ses kringles [215].

L'importance de ce phénomène dans le catabolisme in vivo est à démontrer mais ces interactions ont un rôle probable dans la pathogénie de cette lipoprotéine.

Il a aussi été montré que la Lp(a) s’accumule dans la matrice sous-endothéliale des lésions artérielles ou des greffons de pontages, en quantité proportionnelle à la concentration plasmatique de Lp(a). Ceci reflète une avidité de la Lp(a) pour les constituants trouvés dans les plaques (fibrine, fibronectine, protéoglycannes) la mettant ainsi dans un environnement propice à la peroxydation lipidique. Il s'en suit un catabolisme par la voie scavenger qui favorise la formation des cellules spumeuses.

L’accumulation d’apo(a) dans les plaques se révèle supérieure à celle de l’apoB, en tenant compte des différences de concentrations plasmatiques, ce qui suggère une contribution de la Lp(a) à l’athérosclérose indépendante de celle des LDL [216] [217].

2.5.5. Régulation de la concentration de Lp(a)

De nombreux facteurs physiologiques, pharmacologiques et environnementaux sont sans effet sur les concentrations de Lp(a), ce qui suggère qu’elles sont en grande partie génétiquement déterminées. Le contrôle génétique de la concentration est en effet plus important (40 à 90 p.cent) pour la Lp(a) que pour aucune autre lipoprotéine. L'importante agrégation du caractère dans les familles et sa ségrégation dans la descendance montrent l'effet d'un gène majeur et l'influence moindre d'autres gènes 169 [218].

2.5.5.1. Par des facteurs génétiques

          Le gène de l'apoprotéine (a)

Si on considère les 6 isoformes mises en évidence par Utermann, les concentrations de Lp(a) sont croissantes de l'isoforme la plus grande (S4 : poids moléculaire supérieur à 700 kDa) m = 0,09 ± 0,06 g/l à l'isoforme la plus petite (B : poids moléculaire supérieur à  460 kDa) m = 0,42 ± 0,21 g/l, pour les individus simple bande en western-blotting 139.

Chez les hétérozygotes (phénotype double bande), la concentration correspond à la somme plutôt qu'à la moyenne des concentrations déterminées par chacun des allèles. Chaque allèle semble agir indépendamment, en accord avec la codominance de la transmission génétique 170.

Les allèles d'apo(a) déterminent la densité et la concentration des Lp(a) correspondantes dans le plasma. Ainsi, les isoformes de différentes taille se retrouvent dans des particules Lp(a) distinctes, de concentrations différentes, et que l'on peut séparer par ultracentrifugation. Les Lp(a) les plus denses contiennent les isoformes d'apo(a) les plus grandes et sont régulièrement moins abondantes que les Lp(a) plus légères 171. Ceci a été conforté par des études au niveau du mRNA de l'apo(a) : chez les individus* ayant 2 isoformes d'apo(a), les mRNA de la plus petite sont les plus abondants (northern-blotting plus intense) 134.  (* babouins)

Les premières études où les techniques de western-blotting étaient insuffisamment sensibles pour détecter toutes les isoformes, concluent que les variations de taille de l'apo(a) rendent compte de 40 p.cent des variations interindividuelles de concentration de Lp(a).

Les techniques d'électrophorèse en champ pulsé, de fragments de DNA génomiques obtenus par action d'enzyme de restriction coupant l'ADN à un endroit précis du domaine codant pour le kringle 4, ont permis de mettre en évidence un plus grand nombre d'allèles, d'analyser la ségrégation du gène dans les familles et de confirmer la relation inverse tout en confirmant également que des individus de même génotype appartenant à des familles différentes peuvent avoir des concentrations de Lp(a) assez différentes 155.

Le déterminant majeur de la concentration de Lp(a) est le nombre de répétitions du kringle 4 dans le gène de l'apo(a). Toutefois les différences de taille des apo(a) n'expliquent pas entièrement la variabilité des concentrations de Lp(a) et la relation inverse taille-concentration peut différer d'un groupe ethnique à l'autre 177.

Les concentrations de Lp(a) associées à différents allèles d'apo(a) de même longueur peuvent varier d'un facteur 100 dans un même groupe ethnique. En effet des allèles de même longueur n'ont pas forcément la même séquence. Des séquences en 5' du gène régulent l'expression (taux de transcription, transport et métabolisme) [219].

Les études métaboliques ayant montré que les variations de concentration sont principalement liées à des variations du taux de synthèse et que ce taux de synthèse n'est pas uniquement lié au génotype de l'apo(a), l'attention des chercheurs est actuellement focalisée sur les mécanismes qui contrôlent l'expression du gène de l'apo(a) et la liaison de l'apo(a) aux lipoprotéines 185 [220] .

          Facteurs génétiques autres que l’apo(a)

                   - l’hypercholestérolémie familiale

Les sujets atteints ont en moyenne une concentration de Lp(a) 2 à 3 fois plus élevée que celle des sujets indemnes appariés sur le phénotype d’apo(a) [221] [222] .Utermann suggère que l’augmentation de concentration de la Lp(a) chez ces patients ne résulte pas seulement d’une diminution du nombre des récepteurs fonctionnels mais aussi d’une interaction forte (effet multiplicatif) entre le gène de l’apo(a) et celui du récepteur des LDL 200.

Néanmoins des résultats différents ont été obtenus. Dans une famille de 66 personnes dont 22 hétérozygotes pour une mutation du gène du R-LDL entraînant un dysfonctionnement du récepteur, les concentrations de Lp(a) des individus porteurs de la mutation ne diffèrent pas significativement (bien que toujours plus élevées) de celles des sujets indemnes appariés sur le phénotype d'apo(a) 208.

De même Ghiselli comparant les concentrations de Lp(a) de sujets atteints d'hypercholestérolémie familiale hétérozygote à celles de sujets sains appartenant à 7 familles, ne montre pas de différences de moyenne et de distribution [223].

Ces résultats ne confirment pas l'hypothèse d'Utermann d'une interaction entre les 2 gènes, et sont en accord avec les études montrant un rôle mineur du R-LDL dans le catabolisme de la Lp(a) [224].

                   - Polymorphisme de l’apoE

Apolipoprotéine structurale principalement localisée au niveau des VLDL et des HDL, l'apo E participe à la régulation du métabolisme des lipoprotéines par sa capacité de liaison aux récepteurs des LDL et des remnants de chylomicrons et de VLDL. Le gène de l'apoE possède 3 allèles codant pour les apo E2, E3 et E4.

Le phénotype E3 est le plus fréquent et les sujets à bilan lipidique normal sont le plus souvent E3/E3. Les sujets ayant une apo E2 ont un catabolisme des remnants diminué et une surexpression des R-LDL avec un catabolisme accéléré des LDL. Les homozygotes E2 ont une augmentation de concentration des remnants de lipoprotéines riches en triglycérides et un taux diminué de LDL. S'il existe une cause supplémentaire de dyslipidémie, l'homozygotie E2 se traduit par une hyperlipoprotéinémie de type III. Chez les hétérozygotes E2, l'atteinte métabolique est moins sévère.

Les sujets ayant un allèle E4 ont des effets opposés : catabolisme hépatique des remnants de chylomicrons et de VLDL accéléré, avec augmentation de la quantité de LDL formées. Les R-LDL voient leur expression diminuée, associé à une diminution du catabolisme des LDL 60.

Certaines études ont mis en évidence un effet du gène de l'apo E sur les concentrations de Lp(a).

Sur une population de 303 Caucasiens sains, Knijff montre que l'apo E2 est associée à une diminution de concentration de la Lp(a) de 24,8 p.cent en moyenne et que l'apo E4 augmente cette concentration de 25,7 p.cent en moyenne. Les effets sont parallèles à ceux constatés sur les concentrations des LDL [225].

Une étude Japonaise montre aussi une concentration moyenne de Lp(a) plus faible en présence d'apo E2 que dans le groupe E3/E3 et E3/E4. L'effet du polymorphisme de l'apo E sur les concentrations de Lp(a) est, ici aussi, parallèle à celui observé sur le cholestérol des LDL [226].

Dans ces 2 études le phénotype d'apo(a) n'est pas pris en compte (analyse univariée) et une étude récente portant sur 1562 sujets montre que l’effet de l’apoE disparaît lorsqu'on tient compte du phénotype de l'apo(a) (analyse multivariée). L'influence du polymorphisme de l'apo E sur les concentrations de Lp(a) est indirecte et liée à son impact sur les concentrations du cholestérol LDL et des triglycérides [227].

                   De rares anomalies génétique peuvent aussi influencer l'expression de l'apo(a) donc les concentrations de Lp(a) :

       - l'abêtalipoprotéinémie est associée à des concentrations de Lp(a) 5 fois plus faibles que les témoins ou les sujets sains de même famille 186,

       - le déficit en lipoprotéine-lipase est associé à une forte diminution des concentrations de Lp(a), qui sont environ 10 fois plus faibles que chez les  témoins normaux [228],

       - dans le déficit en LCAT, l'état homozygote est associé à l'absence de Lp(a).et d'apo(a) dans le plasma 198.

 

2.5.5.2. Influence des facteurs d’environnement

Les différences de concentration constatées entre et au sein des différents ethnies ne s’expliquent pas totalement par les différences de fréquence des allèles d’apo(a).

Les populations et les individus vivent aussi dans des environnements très différents.

          Exercice physique

La sédentarité constitue un facteur de risque bien connu de maladies cardio-vasculaires. Inversement l'activité physique régulière, (sports d'endurance plus que sports de puissance), a un effet favorable sur le métabolisme lipidique (concentration moindre de cholestérol LDL et augmentation du cholestérol des HDL). Par contre les concentrations de Lp(a) ne semblent pas influencée par l'exercice physique : des concentrations similaires sont trouvées chez 87 sédentaires, 105 sportifs d'endurance et 57 pratiquants d'un sport de puissance [229].

Lobo étudie longitudinalement pendant 6 mois, 69 femmes ménopausées réparties en 4 groupes de traitement : témoins, groupe soumis à un exercice physique, groupe recevant une oestrogénothérapie, groupe soumis à l'exercice physique et recevant une oestrogénothérapie. Les trois traitements entraînent une diminution non significative des concentrations de Lp(a). L'exercice physique seul diminue les concentrations de Lp(a) de 2,5 p.cent. Les plus fortes diminutions concernent les patientes à taux de base faibles alors que celles dont le taux est supérieur à 0,10 g/l n'ont qu'une très faible diminution [230].

A l'inverse l'entraînement physique progressif et intensif (course 3 à 4 fois par semaine jusqu'à courir un demi marathon au bout de 9 mois) de sujets préalablement sédentaires est associé à un quasi doublement des concentrations de Lp(a) [231]. Un résultat similaire est observé dans une autre étude impliquant 219 sujets d'âge moyen, sédentaires et présentant un risque vasculaire modéré [232].

Dans les études montrant une augmentation de concentration par l'effort physique, l'entraînement est nettement plus intensif que dans les études négatives. Une hypothèse pour expliquer cet effet est un "stress" musculaire avec des lésions tissulaires apparentées à l'inflammation, or la Lp(a) a des caractéristiques de protéine de l'inflammation. Un rôle dans la cicatrisation des lésions tissulaires a été évoqué pour la Lp(a) qui pourrait stabiliser la fibrine in situ et favoriser la synthèse des membranes cellulaires grâce à un apport de cholestérol.

Il y a toutefois une contradiction entre l'hypothèse de l'action antifibrinolytique de la Lp(a), et l'augmentation de l'activité fibrinolytique (temps de lyse des euglobulines) constatée après exercice physique intense 232.

          Consommation d'alcool

Les résultats des études sont assez contradictoires.

Marth montre une diminution des concentrations de Lp(a) chez les gros buveurs (plus de 200 g d'alcool par jour) que les fonctions hépatiques soient ou non altérées 188.

Parra compare 90 buveurs excessifs (160 g/j) à 90 buveurs modérés (20 g/j) et ne montre pas de différence significative [233]. Dans un groupe de 723 sujets sains où les 2 sexes sont également représentés, la consommation régulière de plus de 44 g. d'alcool par jour chez les hommes et de plus de 22 g. par jour chez les femmes, est accompagnée d'une diminution non significative de la Lp(a) [234].

La Framingham Offspring Study ne montre pas davantage d'influence de l'alcool sur la concentration de Lp(a) dans une population de 1284 hommes et 1394 femmes [235].

Delarue montre une augmentation de 40 p.cent des concentrations de Lp(a) de 24 alcooliques chroniques indemnes de cirrhose, dès le 8ème jour de sevrage et cette augmentation persiste 3 semaines [236].

          Tabagisme

Sickmeier trouve des concentrations plus faibles de Lp(a) chez les fumeurs que chez les non fumeurs mais il n'y a pas d'appariement sur le phénotype d'apo(a) et le nombre de sujets étudiés est faible (68 au total) [237]. Rodriguez, dans une population de 423 hommes, montre aussi une concentration plus faible chez les fumeurs [238].

Dans la population étudiée par Steinmetz, il n'y a pas de différence significative entre fumeurs et non fumeurs, bien que 14,3 p.cent des femmes fumant régulièrement aient une Lp(a) supérieure à 0,30 g/l, contre 20,5 p.cent des témoins 234. De même l'effet du tabac n'est pas retrouvé dans la Framingham Offspring Study 235.

          Régime alimentaire et variations de poids

Albers soumet 2 individus à un régime fortement enrichi en cholestérol (5g par jour = 20 jaunes d'oeufs par jour pendant 28 jours) et mesure avant, pendant et après
(2 fois par semaine pendant une durée totale de 8 semaines), les concentrations d'apoB et de Lp(a). Les concentrations d'apoB augmentent nettement (+ 75 p.cent) alors que celles de la Lp(a) restent constantes
113.

L'effet du régime végétarien comparé au régime omnivore est également sans influence sur les concentrations de Lp(a) alors qu'il entraîne une diminution du contenu en cholestérol des LDL [239].

Certaines études épidémiologiques ont montré que la consommation régulière de poisson est associée à un moindre risque de maladie coronarienne. Le bénéfice a été attribué aux acides gras polyinsaturés de la série w3, principalement aux acides docosa-hexaénoïque et eicosa-pentaénoïque qui, en plus de leur effet sur le métabolisme lipidique (diminution de la synthèse hépatique des VLDL), semblent exercer des effets bénéfiques sur la pression artérielle, les fonctions plaquettaires et la viscosité sanguine. Dans une étude incluant des volontaires sains la supplémentation en huiles de poisson (4 g par jour d'acides gras w3) a été sans effet sur les concentrations de Lp(a) au bout de 6 semaines. Par contre après 9 mois de supplémentation, 7 sujets sains ayant un taux de base supérieur à 0,20 g/l voient leurs concentrations diminuer de 15 p.cent. Ceci suggère un possible effet en cas d'apport au long cours [240].

Dans la population de Steinmetz, il n'apparaît pas de différence statistique de la distribution des concentrations de Lp(a) entre les sujets ayant une surcharge pondérale supérieure à 20 p.cent et ceux qui ont un poids normal 234.

L'amaigrissement n'est pas associé à une modification significative des concentrations de Lp(a) surtout quand la concentration de base est inférieure à 0,30 g/l.

Lorsque les concentrations sont supérieures à 0,30 g/l une perte de poids de 10 kg est associée à une diminution de la Lp(a) [241].

L'absence d'effet net et reproductible des facteurs alimentaires sur la Lp(a) rend actuellement impossible toute recommandation diététique spécifique.

2.5.5.3. Influence de certains états physiopathologiques

          Influence des hormones sexuelles

                   - Lp(a) pendant la grossesse

Les concentrations de Lp(a) augmentent régulièrement jusqu'à la 19ème semaine où elles sont multipliée par un facteur de 2,8 par rapport au taux du début de grossesse. Puis elles diminuent et retournent au taux de base au moment de la délivrance. L'augmentation de la Lp(a) n'est pas corrélée aux taux des hormones, hCG, hormone placentaire lactogène, progestérone, estradiol, insuline, mesurées durant la même période. Elle est également indépendante des variations du cholestérol total, de l'apoB et des triglycérides qui augmentent progressivement jusqu'à la 35ème semaine puis diminuent légèrement à mesure que le terme approche [242].

L'équipe de Berg rapporte des cas d'éclampsie chez des femmes ayant des taux élevés de Lp(a). Les enfants étaient de faible poids à la naissance et les placentas présentaient des signes d'ischémie et des dépôts anormaux de fibrine ce qui suggère aux auteurs que les taux élevés de Lp(a) pourraient favoriser les accidents ischémiques placentaires qui entraînent une insuffisance fonctionnelle et par suite  un retard de croissance foetal [243] [244]. Toutefois, Leerink compare 39 femmes ayant des antécédents d'éclampsie avec 47 témoins sans antécédents et appariées sur l'âge, et ne trouve pas de différences significative des concentrations de Lp(a) et de distribution des phénotypes d'apo(a) [245].

                   Lp(a) et ménopause

La Framingham Offspring Study a montré que les concentrations de Lp(a) sont supérieures de 19 p.cent chez les femmes ménopausées par rapport aux femmes non ménopausées 235. Or on sait qu'après la ménopause, le risque vasculaire des femmes rejoint celui des hommes.

                   Lp(a) et administration d'estroprogestatifs

L'estrogénothérapie instituée après la ménopause diminue le risque vasculaire probablement par un effet bénéfique sur le profil lipoprotéique (augmentation des HDL et diminution des LDL). On constate une diminution des concentrations de Lp(a) entre 25 et 50 p.cent selon la posologie et la durée des études, en plus d'une amélioration du profil lipidique 175 [246]. Les concentrations de Lp(a) diminuent d'autant plus que le taux de base est élevé.

Lorsqu'un progestatif est ajouté, la concentration de Lp(a) diminue également mais l'effet favorable sur les HDL n'est plus retrouvé [247].

Les concentrations de Lp(a) augmentent de 20 p.cent chez 16 hommes castrés pour cancer de la prostate et diminuent de 50 p.cent chez 15 autres patients traités par oestrogénothérapie [248].

                   Lp(a) et administration d'androgènes

L'effet de l'administration de testostérone chez 19 hommes sains varie selon les sujets et dépend de la concentration initiale de Lp(a). Lorsque celle-ci est faible, l'administration de testostérone est sans effet alors que pour 9 sujets ayant des taux élevés, il est constaté une diminution (25 à 69 p.cent) d'importance proportionnelle au taux de départ [249]. Le stanazolol est un stéroïde anabolisant qui diminue fortement les concentrations de Lp(a) (65 p.cent chez 10 femmes ménopausées) mais avec une diminution défavorable des HDL2 [250].

Ainsi toutes les hormones gonadiques influent de façon similaire sur les concentrations de Lp(a) ce qui est cohérent avec l'absence de différence de concentration entre les sexes, en particulier avant la ménopause.

          Influence de l'inflammation

Maeda ayant mis en évidence des augmentations transitoires des concentrations de Lp(a) à la suite d'une intervention chirurgicale ou d'un infarctus du myocarde chez 32 patients, il a été suggéré que la Lp(a) pourrait faire partie des protéines de l'inflammation [251]. Les concentrations de Lp(a) atteignent un maximum entre le 5ème et le 10ème jour et retournent au niveau basal après plus d'un mois, suivant ainsi la même cinétique que l'orosomucoïde et l'a-1 antitrypsine. L'augmentation de la Lp(a) est moins rapide que celle de la CRP mais plus précoce que celle de la céruléoplasmine. Pour Maeda, la Lp(a) pourrait constituer un meilleur indicateur de l'inflammation que les paramètres classiques en cas de traumatisme chirurgical ou d'infarctus du myocarde.

Min compare les concentrations de Lp(a) et le phénotype d'apo(a) de 100 témoins normaux à ceux d'un échantillon tiré au sort de 100 patients ayant un syndrome inflammatoire. La concentration moyenne est plus élevée chez les patients (0,30 ± 0,28 g/l que chez les témoins (0,12 ± 0,19 g/l). Pour les phénotypes d'apo(a) les plus représentés (S5, S4S5, S4 et S5S5), les concentrations de Lp(a) sont significativement plus élevées chez les patients que chez les témoins [252].

Après la mise en évidence de l'influence de l'inflammation sur les concentrations de la Lp(a), des auteurs ont suggéré que ceci pourrait avoir constitué un biais important lors de certaines études cliniques et ils ont émis des réserves quant à la validité des résultats de ces études.

 

Dr GUIMONT Marie-Christine - Thèse de Docteur en Pharmacie    page 119

La lipoprotéine Lp(a) : son intérêt dans l'interprétation du bilan lipidique - Lipoprotein(a) Lp(a): its interest in the interpretation of the lipid profile

2.6. Rôle physiologique et mécanisme pathogénique

La Lp(a) est constituée d'une apo(a) et d'une LDL, éléments qui appartiennent à 2 systèmes macromoléculaires distincts. Ceci a suggéré que cette lipoprotéine pourrait constituer un lien fonctionnel entre ces systèmes.

La Lp(a) possède des propriétés de liaison aux constituants du tissu conjonctif de la paroi artérielle (dont les glycoaminoglycanes [253] et la fibronectine 147), à la fibrine et aux récepteurs cellulaires du plasminogène [254].

Ces propriétés sont à l’origine des principales hypothèses pouvant expliquer un rôle physiologique et le mécanisme pathogénique de la Lp(a).

La conservation de la Lp(a) chez les Primates supérieurs au cours de l’évolution et les modifications récentes de son gène suggèrent un possible rôle physiologique. Cependant, les populations et les individus où les concentrations de Lp(a) sont faibles (Caucasiens, Asiatiques notamment) ne semblent pas présenter de déficit particulier.

2.6.1. Rôle physiologique

L'endothélium vasculaire sain constitue une surface non thrombogène grâce à sa composition membranaire, à son activité de transformation métabolique de substances thrombogènes telles que l'ADP ou la thombine, à la formation d'inhibiteurs puissants des fonctions plaquettaires et d'activateurs du système fibrinolytique. La cellule endothéliale est par ailleurs le siège d'une intense activité de synthèse et de sécrétion. Elle synthétise les constituants de la matrice extra-cellulaire sur laquelle elle repose (collagène de type IV, fibronectine et glycosaminoglycanes) et qui sont éminemment thrombogènes. Elle synthétise également la thromboplastine tissulaire (activation de la voie extrinsèque de la coagulation) ainsi que le t-PA, l'antithrombine III et la prostacycline qui ont un rôle local dans le caractère non thrombogène de sa surface.

La fonction physiologique de la Lp(a) demeure obscure mais plusieurs hypothèses ont été émises.

2.6.1.1. Régulation de la fibrinolyse physiologique

L'équilibre entre fibrinolyse et coagulation dépend de l'activation du plasminogène en plasmine par le t-PA, (au niveau des dépôts de fibrine), et de l'inhibition, de la plasmine par l'a2-antiplasmine et du t-PA par le PAI-1, (dans le plasma).

L'inhibition de la fibrinolyse peut ainsi résulter d'un défaut d'activation, d'un excès d'inhibition ou des deux à la fois.

L'homologie de structure entre l'apoprotéine(a) et le plasminogène suggère que lors de la fibrinolyse, la Lp(a) pourrait interférer avec le plasminogène par un phénomène de compétition pour ses sites de liaison cellulaires et moléculaires 116.

          Etudes in vitro

                   - Effet de la Lp(a) sur la liaison du plasminogène à ses récepteurs cellulaires

Les récepteurs du plasminogène sont présents sur les cellules sanguines et, en très forte densité sur les cellules endothéliales. Il existe aussi, sur les cellules endothéliales notamment, des récepteurs membranaires pour le t-PA. Ces récepteurs, en concentrant le plasminogène et ses activateurs à la surface des vaisseaux sont critiques pour l’initiation de la fibrinolyse. Ils accélèrent l’activation du plasminogène, et protègent la plasmine formée des ses puissants inhibiteurs circulants. Ainsi, l’activation du plasminogène en plasmine est induite et contrôlée in situ. Ceci peut être inhibé par la Lp(a) avec comme conséquence, une perturbation des fonctions physiologiques de l’endothélium.

Le plasminogène se fixe à ses récepteurs grâce à ses kringles 1 et 4, et la Lp(a) peut entrer en compétition avec le plasminogène pour la liaison sur les monocytes, les macrophages et les cellules endothéliales [255] [256].

Miles montre que la Lp(a) inhibe la liaison du plasminogène à ses récepteurs cellulaires en se fixant sur ces derniers avec une affinité comparable à celle du plasminogène. Il calcule que lorsque la concentration plasmatique de Lp(a) est supérieure à 0,25 - 0,40 g/l, 16 à 24 p.cent des récepteurs cellulaires du plasminogène sont occupés par la Lp(a) avec une diminution de 13 à 20 p.cent des possibilités de fixation du plasminogène 256. Le déplacement du plasminogène de ses récepteurs cellulaires peut l’empêcher d’interagir avec ses activateurs, diminuant localement la fibrinolyse.

Par son potentiel inhibiteur de la fixation du plasminogène aux cellules endothéliales et aux monocytes, la Lp(a) aurait un rôle de sentinelle dans la fibrinolyse. Elle s'opposerait à une production trop importante de plasmine au niveau des lésions endothéliales, empêchant une lyse excessive du thrombus.

De nombreux travaux ont été effectués pour tester cette hypothèse in vitro et in vivo.

Hajjar montre que la Lp(a) inhibe de façon compétitive, la liaison du plasminogène aux récepteurs des cellules endothéliales de la veine ombilicale humaine. Les concentrations d'apo(a) circulantes sont, chez certains individus, aussi élevées voire supérieures à celles du plasminogène, ce qui rend plausible une telle compétition.

Le taux d’occupation des récepteurs du plasminogène par la Lp(a) dépend principalement de la concentration de Lp(a) qui varie de moins de 0,01 µM/l à plus de 1µM/l; presque total à la concentration de 1µM/l, ce taux d'occupation est minime aux faibles concentrations en Lp(a).

De plus il a été observé que l'activation du plasminogène lié aux surfaces cellulaires, par du t-PA en concentration suffisante, est inhibée par la Lp(a) 255.

Les cellules endothéliales en culture synthétisent et sécrètent du t-PA qui se fixe à la surface de ces mêmes cellules, le protégeant de son inhibiteur physiologique, le PAI-1. La Lp(a) interfère avec la fibrinolyse endothéliale, en inhibant la liaison du plasminogène et donc la génération de la plasmine.

                   - Effet de la Lp(a) sur la liaison du plasminogène à la fibrine et aux produits de dégradation du fibrinogène

Lorsque la plasmine attaque la fibrine et le fibrinogène, il se forme simultanément de nouveaux sites de fixation pour le plasminogène et pour le t-PA, ce qui entraîne une amplification locale de la formation de plasmine.

Les 5 kringles du plasminogène présentent des variations de structure qui influent sur leurs capacités respectives de liaison aux résidus lysine de la fibrine : ce sont les K1 et K4 qui se fixent le plus activement.

La Lp(a) pourrait inhiber la fibrinolyse in vivo par compétition avec le plasminogène pour ses sites de liaison à la fibrine et aux fragments de fibrinogène. Sur les nombreux K4 de l'apo(a), seul le K37 (ou k4-10) semble avoir une activité de liaison à la lysine 144.

Loscalzo démontre la liaison de la Lp(a) à la fibrine et postule qu'une diminution de l'activité fibrinolytique pourrait aboutir à l'occlusion vasculaire chez les patients ayant des concentrations élevées de Lp(a) [257].

Par ailleurs la Lp(a) montre des variations dans sa capacité de liaison à la fibrine. Or

l'hétérogénéité de taille de l'apo(a) est liée au nombre de répétition du K4-2 qui est dépourvu de propriétés de liaison à la lysine. Ceci suggère que la capacité de lier la lysine n'est pas directement liée à la taille de l'isoforme.

Hervio isole des Lp(a) mono-isoformes et montre que l'isoforme avec la plus forte affinité pour la fibrine est la plus efficace pour inhiber l'activation du plasminogène.

Chapman apporte des résultats qui vont dans le même sens en montrant que les Lp(a) avec petites isoformes d'apo(a) (PM inférieur à 500 kDa) sont des inhibiteurs efficaces de l'activation du plasminogène et se lient avec une haute affinité à la fibrine. Réciproquement, les Lp(a) avec isoformes d'apo(a) de grande taille ont peu ou pas d'effet [258].

Les apo(a) de grandes taille, avec de nombreux K pourraient (par une augmentation des possibilités d'interactions K-K au sein de la molécule) réduire l'accessibilité à la fibrine des sites liant la lysine [259].

La Lp(a) inhibe de façon compétitive l’activation du plasminogène par le t-PA, en présence de fragments de fibrinogène et de fibrine. Elle n’inhibe pas l’activité amidolytique du t-PA mais se fixe sur des sites adjacents du t-PA, à la place du plasminogène, inhibant son activation 257 [260].

La Lp(a) inhibe aussi l’activation du plasminogène favorisée par l’héparine. L’héparine augmente la vitesse de formation de la plasmine en augmentant l’activité catalytique du t-PA et de l’urokinase. La Lp(a) inhibe cette action par compétition avec le plasminogène pour l'accès à l’activateur lié à l’héparine.

                   - Effet de la Lp(a) sur la synthèse de PAI-1

La Lp(a) semble capable de stimuler la synthèse de PAI-1, principal inhibiteur physiologique du t-PA et de l’UK [261].

 

Il y a donc des sites potentiels d'inhibition de l'activation du plasminogène, à la fois sur les surfaces cellulaires et sur le caillot de fibrine.

Prises ensemble les données des études in vitro montrent que l'apo(a) entre en compétition avec le plasminogène pour la liaison à la fibrine, au fibrinogène et aux récepteurs cellulaires du plasminogène avec une inhibition de la fibrinolyse endogène par la Lp(a), mais la question de son influence réelle sur la lyse du caillot in vivo est actuellement sans réponse définitive.

D'autant plus que d’autres études ne confirment pas l’influence négative de la Lp(a) sur la fibrinolyse. Il est possible que le rôle de la Lp(a) soit de stabiliser le caillot.

La Lp(a) peut avoir une activité profibrinolytique en protégeant le t-PA de son inhibition enzymatique irréversible par le PAI-1 en présence de fibrinogène ou d'héparine. La Lp(a) est en compétition avec le PAI-1 pour l'accès au t-PA fixé sur le fibrinogène ou l'héparine, de la même manière que pour l'activation du plasminogène [262].

De plus la Lp(a) n’inhibe pas la liaison du plasminogène (quand sa concentration est de 2µM/l soit physiologique) à la fibrine. Ces résultats sont en accord avec ceux de Mao 151 qui observe une augmentation de la lyse du caillot par le t-PA en présence de Lp(a) [263].

Halvorsen ne montre pas d’influence de la Lp(a) dans le processus fibrinolytique :

des concentrations croissantes de Lp(a) de 0 à 0,32 g/l, n’inhibent pas l’activation du plasminogène en plasmine par le t-PA, en présence de fibrine soluble (fibrinogène partiellement attaqué par la thrombine). L’addition de Lp(a) purifiée au sang total prélevé après épreuve de compression veineuse (qui libère le t-PA), ne diminue pas et peut même augmenter le taux de D-dimères formés dans le sérum après coagulation standardisée du sang.

Enfin les paramètres fibrinolytiques (taux de D-dimères après 4 h de coagulation) comparés de 10 sujets à Lp(a) élevée (supérieure à 0,17 g/l) et 10 à Lp(a) basse (inférieure à 0,17 g/l), ne diffèrent pas que ce soit avant ou après test de compression veineuse. L’ensemble de ses expériences suggère que la Lp(a) n’inhibe pas la fibrinolyse [264].

Liu trouve qu’à concentrations physiologiques de plasminogène (2µM/l) la Lp(a) favorise la fixation du plasminogène et la génération de plasmine par le t-PA. Il semble que la liaison de la Lp(a) à la fibrine révèle sur la Lp(a), des sites de fixation pour le plasminogène. La plasmine formée sur la Lp(a) serait moins active pour la fibrinolyse par défaut d’accès à son substrat [265].

Terres étudie l’effet de la Lp(a) sur la lyse in vitro du caillot obtenu par recalcification du sang total, chez 120 volontaires sains dont 21 ont une Lp(a) supérieure à 0,25 g/l.

La lyse du caillot par addition de t-PA exogène n’est pas affectée par la concentration de Lp(a) ex vivo. Chez les individus à fortes concentration de Lp(a), les taux de t-PA sont supérieurs à ceux des sujets à faibles concentration de Lp(a), mais l’activité et la concentration du PAI-1 sont également plus élevées.

L’addition de Lp(a) in vitro à du sang pauvre en Lp(a) entraîne une diminution de la lyse quand des concentrations faibles de t-PA sont utilisées et est sans effet avec des concentrations plus importantes (1,6 mg/l) [266].

Dans le but d’éclaircir ces contradictions, d’autres études ont été effectuées en faisant varier les conditions expérimentales. Elles ont montré que les effets inhibiteurs de la Lp(a) sur la liaison et l’activation du plasminogène étaient limités aux faibles concentrations des différents réactants. Aux concentrations physiologiques de plasminogène, la Lp(a) favoriserait l’activation du plasminogène par le t-PA 151. On a donc une inhibition ou une promotion de la génération de plasmine selon les conditions expérimentales.

La Lp(a) semble donc intervenir dans la régulation de la plupart des réactions impliquées dans la formation de plasmine active et dans son inhibition. L'effet global dépendrait surtout des concentrations respectives de Lp(a), de PAI-1 et de t-PA in vivo.

          Etudes in vivo

Les études cliniques montrent également des résultats contradictoires.

La formation d’un thrombus intra-coronarien est impliquée dans la genèse de l’angor instable et de l’infarctus du myocarde. La fibrinolyse est un mécanisme physiologique important pour l’élimination des dépôts vasculaires de fibrine et le prévention des thromboses. La fibrinolyse est initiée par le relargage de t-PA par l’endothélium vasculaire. Le t-PA et son substrat, le plasminogène, ont une affinité de liaison sélective à la fibrine et l'activation du plasminogène en plasmine par le t-PA se produit préférentiellement sur la fibrine des thrombus.

Le déficit de fibrinolyse endothéliale est associé à un risque accru de thrombose. Ceci est une caractéristique des sujets atteints de maladie coronarienne. Or la Lp(a) est en compétition avec le plasminogène et le t-PA pour la liaison à la fibrine.

Oshima et al. étudie l'effet de la Lp(a) sur la fibrinolyse in vivo chez 18 patients atteints d'angor instable et 18 patients atteints d'angor d'effort stable. Il compare les concentrations de Lp(a) et les concentrations de complexe "plasmine-a2-antiplasmine" (indicateur de l'activation du plasminogène donc d'une fibrinolyse récente ou en cours) et de complexe "thrombine-antithrombine III" (marqueur de la génération de thrombine. Les concentrations de Lp(a) des malades lors de leur admission sont plus élevées dans le groupe angor instable (0,32 ± 0,19 g/l) que dans le groupe angor stable (0,19 ± 0,14 g/l). Les concentrations des complexes "plasmine-a2-antiplasmine" et "thrombine-antithrombine III" sont également plus élevées dans le groupe angor instable que dans le groupe angor stable (p<0,001). Les concentrations de Lp(a) augmentent significativement à 7 jours et 14 jours après l'admission dans le groupe angor instable, puis diminuent tout en restant supérieures au taux de base, à 21 jours. Dans le groupe angor d'effort stable, les concentrations de Lp(a) restent stables pendant toute l'étude de même que le taux des complexes "plasmine-a2-antiplasmine". Par contre le taux des complexes "thrombine-antithrombine III" augmente dans le groupe angor instable. L'auteur suggère que l'angor peut être instable lorsque coagulation et fibrinolyse sont activées et que ceci serait la cause de l'augmentation des concentrations de Lp(a) chez ces patients [267].

Garcia compare les paramètres fibrinolytiques (complexe "t-PA - PAI-1", D-dimères) et lipidiques d'un groupe de coronariens à ceux de témoins appariés sur l'âge. Les principales différences entre les 2 groupes sont une plus forte concentration de Lp(a), une hypofibrinolyse et une diminution de libération de t-PA après test de compression veineuse chez les patients. Toutefois il n'apparaît pas de relation entre les concentrations de Lp(a) et les paramètres fibrinolytiques [268].

De même, Marz ne montre pas d'association entre concentration élevée de Lp(a) et thrombose veineuse profonde chez 203 patients comparés à 115 témoins sains : les 2 groupes présentent une distribution des concentrations similaire. Mais ils n'excluent pas une possible influence de la Lp(a) sur la fibrinolyse locale au niveau des cellules endothéliales [269].

Heinrich ne montre pas de corrélation entre les concentrations de Lp(a) et le temps de lyse des euglobulines 176 .

L'ensemble de ces études suggère qu'à concentrations "physiologiques" la Lp(a) pourrait réguler l'activité fibrinolytique et qu'à concentrations élevées, elle inhiberait la fibrinolyse par compétition avec le plasminogène pour la liaison à ses récepteurs cellulaires de surface.

2.6.1.2. Cicatrisation des lésions vasculaires

          Par apport de cholestérol in situ

Selon l’hypothèse de Brown et Goldstein, les capacités de la Lp(a) à se lier à la fibrine et aux protéines de la matrice conjonctive favoriseraient sa concentration au niveau des lésions récentes et en cours de cicatrisation de l'endothélium ce qui contribuerait à un apport de cholestérol (indispensable à la synthèse des membranes des cellules en prolifération) 167.

Les macrophages activés sécrètent des réducteurs (cystéine, glutathion) qui pourraient réduire le pont S-S entre l'apo(a) et l'apoB de la Lp(a) libérant la LDL susceptible de se lier aux récepteurs des fibroblastes proliférants et constituer ainsi un apport de cholestérol.

Il se peut que dans certaines circonstances, la possession d'une forme de LDL qui se lie à la fibrine soit un avantage pour la cicatrisation des lésions tissulaires.

                   - Par stimulation de la prolifération des cellules musculaires lisses

La Lp(a) pourrait agir par un mécanisme différent de celui initialement proposé : la prolifération des cellules musculaires lisses en culture est favorisée par la Lp(a) et l'apo(a). Les travaux de Grainger montrant que le Transforming Growth Factor - b  (TGF-b, qui est un inhibiteur de la croissance des cellules musculaires lisses) doit être activé par la plasmine et que cette activation est inhibée par la Lp(a)), vont dans le sens d'un rôle de la Lp(a) dans la réparation tissulaire par une prolifération des cellules musculaires lisses. Grainger étudie ce mécanisme chez la souris transgénique et montre une augmentation du nombre de cellules musculaires lisses activées au niveau de l’aorte, plus particulièrement aux endroits où s’est déposée l’apo(a). La présence d’apo(a) dans une lésion vasculaire ou tissulaire pourrait ainsi promouvoir la prolifération cellulaire et la formation de collagène. La capacité de l’apo(a) à se lier à la fibrine et aux protéines de la matrice conjonctive favoriserait son accumulation au niveau des sites de lésions tissulaires [270].

 

Une difficulté importante pour l’étude du rôle physiologique de la Lp(a) est que la simple comparaison de sujets avec faibles et fortes concentrations n’est probablement pas adéquate. Les concentrations élevées de Lp(a) chez les Caucasiens, correspondent le plus souvent à des isoformes d’apo(a) de petite taille. Il est possible que ce type de Lp(a) ait une activité physiologique relativement faible (et qu’à l’inverse son action pathogène soit importante) et que les Lp(a) à isoformes de grande taille, produites à faibles taux seraient plus actives physiologiquement.

De plus la synthèse de la Lp(a) peut être stimulée par divers états pathologiques, et il serait intéressant de focaliser l’attention sur les sujets dont les concentrations de Lp(a) sont plus élevées que celles attendues au vu de leur génotype.

Par ailleurs il a été constaté au sein des populations de race noire, que les individus avec apo(a) de grande taille ont plus souvent que les Blancs, des concentrations élevées de Lp(a). Il a été émis l'hypothèse que la Lp(a) pourrait avoir conservé un rôle physiologique plus actif chez les Africains et que ceci constitue (ou constituait récemment) un avantage sélectif qui n’aurait pas persisté chez les Blancs.

La perte de cet avantage sélectif expliquerait la plus grande fréquence des faibles concentrations chez les Blancs, la distribution relativement gaussiennne chez les Noirs, les Indiens pouvant représenter une situation intermédiaire 177.

Il est possible que la Lp(a) n’ait pas de rôle physiologique lorsque les concentrations de LDL sont élevées comme chez les Caucasiens, alors que dans les populations africaines où elles sont typiquement basses, un système supplémentaire apportant du cholestérol au niveau des lésions cellulaires pourrait être important.

Une autre possibilité est que l’exposition chronique à des effets délétères de l’environnement (infections, parasitoses...) contre lesquels la Lp(a) aurait un rôle protecteur, est plus fréquente en Afrique que dans les régions tempérées.

Il se peut que les fortes concentrations soient un avantage dans certaines circonstances et que les faibles concentrations améliorent la survie dans d’autres situations. L’étude des populations où les concentrations élevées sont plus fréquentes pourrait être fructueuse dans la recherche d’un rôle bénéfique (avantage sélectif) de la Lp(a) [271].

2.6.2. Mécanismes pathogéniques

La Lp(a) pourrait promouvoir l’athérosclérose en empêchant l’élimination des micro-caillots créant des lésions propices au développement des plaques ou en favorisant la croissance des plaques fibreuses.

2.6.2.1. Action proathérogène

          Arguments cliniques

Les études visant à élucider le mécanisme athérogène de la Lp(a) ont abouti à des résultats contradictoires.

L’implication de la Lp(a) dans l’athérogenèse a été fortement suggérée par la mise en évidence de l’apo(a) dans les parois artérielles pathologiques, les greffons de pontage coronariens et les plaques d’athérome où elle se trouve en quantité proportionnelle à sa concentration plasmatique, alors qu’on ne la trouve pas sur les artères intactes du même patient 255 [272].

De plus l’apo(a) est co-fixée avec l’apoB et avec la fibrine. Ceci suggère que l’apo(a) pourrait interagir avec le cholestérol des LDL et avec la fibrine pour la progression de l’athérosclérose. La liaison de la Lp(a) riche en cholestérol, à des sites de lésions vasculaires via la fibrine, pourrait contribuer au développement de l'athérosclérose par un apport direct de cholestérol dans les lésions et en favorisant la croissance des cellules musculaires lisses [273].

          Arguments expérimentaux

La Lp(a) peut traverser l’endothélium. Une fois dans la paroi artérielle, elle interagit avec les protéines de la matrice extra-cellulaire, subit des modification chimiques qui la rendent capable d’être dégradée dans les macrophages. D’ailleurs elle se lie avidement aux macrophages et après des modifications oxydatives, elle est internalisée par les cellules aboutissant à une accumulation de lipides oxydés dans l’artère 213. En présence de concentrations élevées de Lp(a), la susceptibilité des LDL à l’oxydation serait augmentée par sa capacité à induire la formation de radicaux libres oxygénés dans les monocytes.

Enfin, ses propriétés de stimuler la croissance des cellules musculaires lisses contribuent à la croissance des plaques athéromateuses 270.

2.6.2.2. Action prothrombogène

En inhibant la fibrinolyse physiologique, elle pourrait favoriser le risque de thrombose et, en se liant aux dépôts de fibrine des lésions vasculaires elle pourrait par sa richesse en cholestérol, contribuer à la croissance des plaques.

La répétition d’événements thrombotiques sub-cliniques pourrait favoriser les lésions artérielles dans les zones où l’athérome débute.

Une diminution de l'activité fibrinolytique normale peut être responsable de l'association entre concentrations élevées d'apo(a) et risque d'athérothrombose, parce qu'il existe une relation inverse entre activité fibrinolytique et maladies cardio-vasculaires.

A concentration physiologique, la Lp(a) régulerait la production de plasmine en protégeant les activateurs du plasminogène de l’inactivation par le PAI-1.

La Lp(a) à des concentrations plus élevées, diminuerait l’accès ou déplacerait le plasminogène de sa liaison aux cellules endothéliales et aux amas de fibrine. L’action pathogénique résulterait d’une diminution chronique de la fibrinolyse endogène qui à son tour entraînerait la stabilité des thrombus et favoriserait l’athérosclérose et la thrombose 272.

De nombreux individus ayant une concentration élevée de Lp(a) n'ont pas de maladie coronarienne au cours de leur vie. Ceci suggère que la Lp(a) agit plus comme promoteur que comme initiateur de l'athérosclérose.

En effet, comme la maladie coronarienne est une cause majeure de létalité, il devrait y avoir une faible proportion d'individus ayant les déterminants génétiques des maladies cardiovasculaires, dans les groupes de sujets très âgés et en bonne santé physique et mentale. Berg étudie une population de 102 sujets âgés de plus de 83 ans et montre que les concentrations en Lp(a) de ces sujets sont réparties majoritairement entre le 26ème et le 50ème percentile (c'est à dire des concentrations "moyennes") et que par rapport à la population générale, peu de sujets ont des concentrations supérieures au 75ème percentile. Il suggère qu’une concentration modérée de Lp(a) serait plutôt favorable et que les gènes déterminant ces concentrations pourraient être des gènes de longévité [274].

La relation entre concentration de Lp(a) et existence d’une maladie coronarienne est bien documentée mais, malgré de nombreux travaux, la question de savoir si la Lp(a) est un facteur causal ou un simple marqueur de l’athérosclérose n’a pas reçu de réponse claire. Des questions demeurent notamment sur l’effet pathologique des différents allèles et sur les voies qui modulent leur expression chez l’homme.

 

Dr GUIMONT Marie-Christine - Thèse de Docteur en Pharmacie    page 129

La lipoprotéine Lp(a) : son intérêt dans l'interprétation du bilan lipidique - Lipoprotein(a) Lp(a): its interest in the interpretation of the lipid profile

2.7. Détection et dosage de la Lp(a)

Pendant les années qui ont suivi sa découverte, la Lp(a) n'a suscité que peu d'intérêt par rapport aux autres lipoprotéines.

L'accumulation d'arguments cliniques l'associant à la maladie athéroscléreuse d’une part, et la découverte en 1987 de l'homologie de structure de l'apo(a) et du plasminogène d'autre part, ont permis son entrée dans les principaux facteurs de risque d'athérosclérose. Ce regain d'intérêt a suscité le développement de techniques de recherche et de dosage plus performantes.

2.7.1 Méthodes d'analyse qualitative

2.7.1.1. Appliquées à la détection de la Lp(a) plasmatique

Etant donné que 80 p.cent des individus des populations caucasiennes ont des taux de Lp(a) inférieurs au seuil pathologique actuellement admis de 0,30 g/l et que les méthodes de dosage ont un coût relativement élevé, il apparaît raisonnable de procéder en première intention à une recherche de la Lp(a) avant de pratiquer un dosage.

          Méthodes immunologiques

                   Immunodiffusion double selon Ouchterlony

La méthode consiste à faire diffuser les antigènes et les anticorps simultanément à partir de puits creusés dans une couche de gélose. Selon les buts cherchés, il est possible d'étudier les lignes de précipitation obtenues entre un antisérum placé dans un réservoir central et plusieurs antigènes ou mélanges d'antigènes placés dans des réservoirs disposés autour de lui (ou inversement : un mélange d'antigènes et plusieurs antisérums). Cette méthode permet de mettre en évidence une communauté antigénique entre deux mélanges d'antigènes :

       - si un seul et même antigène est présent dans deux puits, on obtient une seule et même ligne de précipitation vis à vis du même antisérum,

       - pour des antigènes différents les lignes s'entrecroisent,

       - s'il existe une communauté antigénique sans identité totale des deux antigènes, il se forme un éperon.

 

Application à la recherche de Lp(a) :

Dans une étude de 1974, Walton utilise deux antisérums d'origine animale différente (mouton et lapin) pour tester une population de 1000 donneurs de sang. Les deux antisérums détectent le même antigène mais l'antisérum de lapin détecte 22,4 p.cent de sujets Lp(a) + alors que l'antisérum de mouton en détecte 44,3 p.cent. Cette différence est liée au "pouvoir anticorps" et à l'avidité différentes des antisérums animaux vis à vis des antigènes humains. (Les antisérums de mouton ont en général une meilleure affinité et avidité pour les antigènes humains que ceux de lapin).

Ainsi, la fréquence des sujets Lp(a) + dans une même population dépend des qualités de l'antisérum utilisé. Les auteurs ont de plus constaté qu'avec un même antisérum, l'intensité des arcs de précipitation variait nettement entre les différents sujets Lp(a) +. Ces deux constatations suggèrent le caractère quantitatif du "trait" Lp(a) [275].

                   Electro immunodiffusion de Laurell

Principe : un antisérum monospécifique est incorporé dans une plaque de gel. Les antigènes à tester sont répartis dans des puits alignés. L’application d’un courant électrique perpendiculairement à la ligne des puits accélère la précipitation des complexes antigènes-anticorps dans le gel. Un halo en forme de fusée se forme et progresse, tant que l'antigène est en excès.

En adaptant cette méthode à la recherche de la Lp(a), Walton constate que la hauteur des pics varie nettement entre individus positifs.

De plus, en comparant, l'immunodiffusion double et l'électroimmunodiffusion avec le même antisérum de mouton pour les 1000 donneurs de sang, l'immunodiffusion double révèle 44,3 p.cent de sujets positifs alors que l'électroimmunodiffusion en révèle 75 p.cent. La sensibilité de cette technique est de 0,01 g/l de Lp(a) masse 275.

L'électroimmunodiffusion, beaucoup plus rapide que l'immunodiffusion double, est donc également beaucoup plus sensible.

                   Contre-immunoélectrophorèse (électrosynérèse)

Principe : l'électrosynérèse est une application de la méthode d'électro-immunodiffusion simple. Elle permet de rechercher, par diffusion en milieu gélosé, la présence d'un antigène au moyen d'un anticorps de spécificité connue, la diffusion étant accélérée par un champ électrique.

L'antigène et l'anticorps sont placés l'un en face de l'autre dans les puits de la gélose qui est ensuite reliée aux électrodes. L'antigène est placé du côté de la cathode, l'anticorps du côté de l'anode. Ils migrent l'un vers l'autre, et à leur point de rencontre, il apparaît une ligne de précipitation.

La limite de détection est évaluée à 0,285 g/l, cette méthode est moins sensible que l'électroimmunodiffusion [276].

Rapide et peu chère, elle permet de dépister les sérums ayant une Lp(a)

supérieure à 0,30 g/l de façon fiable et spécifique. Elle est reproductible d'un prélèvement à l'autre chez un même patient et ne donne pas de faux positif.

Une hypercholestérolémie jusqu'à 16,8 mmol/l n'a pas d'incidence sur les résultats, par contre les sérums dont la triglycéridémie est supérieure à 14 mmol/l peuvent être l'objet de précipitations atypiques.

                   Dépistage par ELISA sur goutte de sang séché

Cette méthode a été développée par Van Biervliet pour le dépistage des concentrations élevées chez les nouveaux nés des familles ayant un risque vasculaire connu. Le seuil pathologique choisi est égal à 0,1 g/l d’après la distribution des concentrations chez les nourrissons normaux.

Une goutte de sang est déposée puis séchée sur un papier filtre et un disque de 6 mm de diamètre (5 ml de plasma) est élué, dilué et mesuré par ELISA.

La sensibilité est égale à 0,01 g/l [277].

Dés 1974 Walton constate une importante disparité dans les résultats de la fréquence observée du caractère Lp(a) + entre les laboratoires étudiant différentes populations et souligne dès cette époque la nécessité de standardiser les méthodes et les réactifs utilisés 275.

          Méthodes électrophorétiques non immunologiques

Les lipoprotéines du fait de leur hétérogénéité de composition relative en protéines et lipides ont des charges électriques variables, ce qui permet leur séparation par électrophorèse.

La classification des hyperlipoprotéinémies de Fredrickson est basée sur la comparaison des tracés des sérums des patients avec celui d'un sérum normal.

Divers supports sont utilisables pour séparer les lipoprotéines mais leur capacité à mettre en évidence la Lp(a) est variable.

                   Gel d'agarose

Sur ce support, la Lp(a) migre entre les bêta-lipoprotéines et les prébêtalipoprotéines, sous forme d'une fraction appelée prébeta-1-lipoprotéine et visible à l'oeil. Bruckert a évalue les performances de ce support pour le dépistage des taux élevés de Lp(a), en étudiant 843 patients adultes et en excluant les sujets présentant une hyperlipoprotéinémie de type III, une hypertriglycéridémie supérieure à 10 g/l et les patients traités par l'héparine. Les concentrations de Lp(a) sont mesurées indépendamment par néphélémétrie. En prenant comme seuil une concentration supérieure à 0,30 g/l, la spécificité se révèle excellente (97 p.cent), par contre la sensibilité est médiocre (63 p.cent) ce qu'il explique par les arguments suivants:

       - les patients faux négatifs à l’électrophorèse ont en moyenne une triglycéridémie plus élevée. En effet l'augmentation des prébêta lipoprotéines peut gêner la détection de la Lp(a) sur ce support,

       - la concentration moyenne en Lp(a) des faux négatifs est proche du seuil de détection de 0,30 g/l,

       - du fait de l'hétérogénéité de taille de l'apo(a) et de sa forte glycosylation, sa migration électrophorétique peut être hétérogène.

De plus si l'électrophorèse n'est pas effectuée sur sérum fraîchement prélevé, les prébêtalipoprotéines voient leur mobilité diminuer, tendant à se confondre avec la zone prébêta-1-lipoprotéines empêchant ainsi la visualisation de la Lp(a).

En pratique la migration en prébêta de la Lp(a) rend son repérage difficile voire impossible sur sérum conservé [278].

                   Gel d'agarose modifié

L'addition d'ions Mg++ au gel d'agarose permet de diminuer la mobilité des toutes les fractions lipoprotéiques sauf celle de la Lp(a). Cette procédure améliore nettement la mise en évidence de la Lp(a) et surtout évite toute confusion avec les prébêtalipoprotéines, même si l'échantillon a été conservé quelques jours à +4°C (la mobilité de la Lp(a) n'est pas affectée par la conservation à 4°C). Il existe néanmoins une variabilité de mobilité des fractions Lp(a) d'un individu à l'autre selon les phénotypes d'apo(a), mais dans une zone étroite du lipoprotéinogramme. Dans le cas de sérums très hypertriglycéridémiques, la Lp(a) peut se trouver au sein des prébêtalipoprotéines, il est alors conseillé de refaire l'électrophorèse après quelques  jours de conservation à 4°C [279].

La sensibilité annoncée par le fabricant est de l'ordre de 0,15 à 0,20 g/l de Lp(a) dosée en électroimmunodiffusion. Ce support permet par ailleurs un typage fiable des profils lipoprotéiques des patients. (cf. 3. Résultats personnels)

                   Gel de polyacrylamide en gradient discontinu d'acrylamide

Ce support adapté en tubes ou en plaques permet une séparation fine des différentes classes de lipoprotéines en fonction de la charge électrique et de la taille moléculaire.

Dans l'adaptation en tubes, le sérum, précoloré au nitrobleu de tetrazolium ou au noir Soudan, est déposé à la partie supérieure d'un premier gel à 2 p.cent d'acrylamide qui empêche la migration des chylomicrons (ils restent au dépôt). Un deuxième gel à 3 p.cent d'acrylamide retient les VLDL (qui restent à la jonction des 2 gels) et fractionnent les autres lipoprotéines : les éventuelles IDL s'immobilisent en premier, puis la Lp(a), les LDL et enfin les HDL.

Les séparations obtenues sur ce support permettent une identification aisée des différents types d'hyperlipoprotéinémies ainsi que la mise en évidence de la Lp(a) dans 12 à 15 p.cent des sérums.

La limite de détection de la Lp(a) a été déterminée par dilutions successives d'un sérum très riche et dosé par électroimmunodiffusion : elle est de 0,25 g/l pour l'adaptation en tube 121 [280].

Pour l'adaptation en plaque (Lipofilm Sebia), la Lp(a) est perceptible à 0,29 g/l et confirmée à 0,32 g/l [281].

2.7.1.2. Appliquées à la séparation des isoformes d'apo(a)

          L'immunotransfert ou western blotting.

Le principe de la technique est de permettre la visualisation d'antigènes, préalablement séparés par électrophorèse, par réaction avec les anticorps correspondants.

Pour son application au phénotypage de l'apo(a) on effectue préalablement un traitement du sérum par un agent réducteur de façon à libérer l’apo(a) de sa liaison à l'apoB. Puis les préparations sont soumises à une séparation en fonction de leur poids moléculaire par électrophorèse sur gel de polyacrylamide en présence d'un détergent, le dodécylsufate de sodium (SDS-PAGE). Les protéines ainsi séparées sont transférées sous l'action d'un champ électrique, sur un film de nitrocellulose qui reproduit fidèlement la migration des protéines et sur lequel elles se fixent.

L'incubation de ce film avec un antisérum spécifique puis la révélation des anticorps fixés par un antisérum anti-immunoglobuline marqué par une enzyme (peroxydase) aboutit à l'apparition de bandes colorées de façon plus ou moins intense, identifiées par leur position par rapport à des témoins de comportement connu dans le système utilisé [apoB ou diverses apo(a)].

Dés 1984, Fless utilise cette technique pour séparer les apo(a) isolées à partir des Lp(a) de 2 patients et met en évidence 3 espèces d'apo(a) de mobilités différentes (inférieure, égale ou supérieure à celle de l'apoB100) 118.

Dans les années 1987-88 Utermann affine la méthode de séparation et surtout l'utilise dans plusieurs études portant sur des populations importantes. Ceci lui permet d'établir le concept du polymorphisme de l'apo(a), en mettant en évidence 6 phénotypes définis par leur mobilité relative à celle de l'apoB100.

Il montre qu'aucun individu ne présente plus de 2 phénotypes d'apo(a) différents. Les apo(a) de type F ont une mobilité supérieure à celle de l'apoB100, le type B une mobilité égale et les types S1, S2, S3, S4 des mobilités inférieures et décroissantes.

La sensibilité de la technique d'Utermann est de 90 ng de Lp(a) dans un volume équivalent à 1,8 μl de sérum utilisé pour l’électrophorèse (soit 0,05 g/l de Lp(a) plasmatique).

Dans la population de 247 donneurs de plasma qu'il a étudié, seulement 51 p.cent des individus se révèlent positifs avec 1 ou 2 bandes (90 p.cent sont "simple bande", 10 p.cent sont "double bande") alors que 77 p.cent ont des concentrations mesurables en électroimmunodiffusion 131 139 [282].

La fréquence de l’hypothétique allèle nul va diminuer avec l’augmentation de sensibilité des techniques.

Gaubatz utilise également la méthode du westernblotting pour séparer les apo(a) mais à la différence d'Utermann (qui dépose l'équivalent d'un même volume de sérum pour tous les sujets), il dépose une quantité équivalente d'apoprotéines de Lp(a) quelle que soit la concentration de Lp(a) plasmatique. Cette procédure lui permet de révéler la présence d'1 ou 2 bandes d'apo(a) chez 99,1 p.cent des 692 individus de la population qu'il étudie et de mettre en évidence 11 isoformes différentes d'apo(a) (numérotées de 1 à 11 des poids moléculaires les plus faibles (419 kDa), aux poids moléculaires les plus élevés, (838 kDa)). Cette application de la technique du westernblotting se révèle donc plus sensible et plus résolutive.

Les 11 isoformes mis en évidence par Gaubatz aboutissent à 66 phénotypes possibles numérotés de 1 à 66 dans l'ordre des poids moléculaires croissants. Les 11 phénotypes "simple bande" sont tous trouvés mais seulement 32 des 55 phénotypes "double bande" possibles. Dans sa population 59,5 p.cent des individus sont "simple bande" et 39,6 p.cent "double bande". De plus la distribution des phénotypes n'est pas régulière puisque parmi les 8 plus fréquents, 7 sont simple bande 132.

Farrer applique cette méthode mais en variant le volume de sérum en fonction de la concentration de Lp(a) afin de déposer une quantité d'apo(a) comprise entre 0,06 et 2,00 μg d'apo(a). La limite de détection correspond à une concentration sérique de 7 mg/l.

Dans la population étudiée, constituée de patients atteints de maladie coronarienne, tous les sujets sont positifs ce qui peut s'expliquer par des concentrations de Lp(a) plus élevées chez ces patients que dans une population de sujets sains.

Il sépare 10 isoformes classées par leur mobilité relative à celle de l'apoB100

(2 isoformes sont plus rapides, 1 est égale et 7 sont plus lentes). Cent p.cent des patients étudiés sont positifs dont 62 p.cent simple bande et 38 p.cent double bande.
 

 

Rf

Poids moléculaires

kDa

Relation avec les isoformes
d’Utermann et de Gaubatz

1,1

1,15

~ 403

~ 457

Comparables à F d’Utermann

et 1 et 2 de Gaubatz

1,0

~ 501

B selon Uterman

0,9

...

0,35

~ 550

  ...

~ 1050

Comparables à S1, S2, S3 et S4 d’Utermann

et à 4 à 10 de Gaubatz

 

Une classification dont la nomenclature est basée sur la mobilité électrophorétique ou plus précisément sur la mobilité relative Rf, (rapport de la mobilité de la protéine à celle d’une molécule de référence) a plusieurs avantages :

     - pas d’ambiguïté dans les comparaisons des résultats de différentes études,

     - ouverture à l'isolement de nouvelles isoformes et,

     - application à l'études des apo(a) non humaines [283].

Abe étudie les phénotypes d’apo(a) de 500 donneurs de sang japonais. Il utilise la classification d’Utermann et mesure la mobilité vraie et relative à l’apoB des différentes isoformes.

 

Isoforme

Mobilité vraie

Rf

S4

<0,057

0,28

S3

0,058 - 0,087

0,47

S2

0,088 - 1,190

0,65

S1

0,120 - 1,148

0,88

B

0,149 - 1,185

1,03

F

>0,186

1,32

 

Sur 500 sujets non apparentés 66,6 p.cent sont simple bande, 25,4 p.cent double bande et 8 p.cent n’ont pas d’apo(a) détectable. La concentration moyenne de Lp(a) sérique est 0,150 g/l et la médiane 0,110 g/l. La concentration des Lp(a) simple bande se révèle significativement plus faible que celle des double bande.

La fréquence des allèles est en accord avec l'équilibre de Hardy-Weinberg.

Dosés par une technique ELISA dont la sensibilité est de 0,023 g/l, 98 p.cent des sujets ont des concentrations mesurables [284].

Huang modifie la technique d’Utermann et montre que les facteurs qui influent la détection de la Lp(a) par westernblotting sont :

     - la concentration sérique de Lp(a)

     - la quantité de sérum appliqué à l'électrophorèse

     - le titre et l'affinité du premier anticorps-anti-Lp(a)

     - les temps d'incubation avec le 1er et le 2ème anticorps

     - la sensibilité du système de détection enzymatique.

La différence majeure qu'il propose par rapport à Uterman 139 est un système de détection plus sensible [285].

Sur 145 volontaires donneurs de sang, 11,7 p.cent sont négatifs, 49,7 p.cent simple bande et 38,6 p.cent double bande.

L’électrophorèse à haute résolution en gel d’agarose-SDS, permet à Kamboch de mettre en évidence, 23 isoformes. En effet, les pores du gel d’agarose, de plus grande taille que ceux du gel de polyacrylamide, favorisent un effet de tamisage moléculaire permettant la séparation des isoformes de grande taille.

Les isoformes sont numérotées de 1 à 23, par poids moléculaires décroissants.

L’auteur montre aussi qu’en général, les isoformes de faible poids moléculaire sont plus intensément colorées que celles de plus fort poids moléculaire et que cette différence est conservée au sein des familles 137.

La méthode utilisée ne lui permet pas d’établir de correspondance entre ses isoformes et ceux d’Utermann et Gaubatz, mais en analysant les distances de migration obtenues, il prévoit l’existence de 14 isoformes supplémentaires. Cette étude, réalisée sur 130 enfants issus de 54 familles, permet à Kamboch de confirmer le caractère héréditaire des isoformes de l'apo(a).

Marcovina améliore la méthode de Kamboch et sépare 34 isoformes d’apo(a) avec une résolution au kringle près 138.

2.7.2 Méthode d'analyse quantitative

2.7.2.1. Remarques

La mise en évidence de réactions croisées de la plupart des anticorps-anti-Lp(a) avec le plasminogène, ainsi qu'une meilleure connaissance de l'hétérogénéité de la Lp(a) ont rendu primordial le développement de méthodes de dosage immunologiques plus spécifiques.

Néanmoins, pour certains auteurs, les résultats des études cliniques antérieures ne semblent pas devoir être remis en cause : d'une part parce que les concentrations plasmatiques de plasminogène sont le plus souvent stables, d'autre part du fait des différences de taille entre la Lp(a) et le plasminogène qui limitent les interférences susceptibles d'intervenir dans le dosage [286].

Différentes techniques ont été développées pour doser la Lp(a) plasmatique et, comme pour le dosage des autres apoprotéines, chaque méthode présente des avantages et des inconvénients sans que l'une d'elles puisse être actuellement considérée comme idéale. Le choix de la méthode la plus appropriée sera fonction des données disponibles sur la sensibilité, l'exactitude, la précision et la reproductibilité ainsi que des besoins spécifiques du laboratoire en terme de charge de travail, d'appareillage disponible, de techniciens entraînés, de temps de dosage et de coût par analyse.

2.7.2.2. Méthodes immunologiques

          Les différentes méthodes

                   Immunodiffusion radiale

C'est une technique de dosage immunologique par précipitation en milieu solide développée par Mancini (1965).

L'immunodiffusion radiale a été une des premières méthodes de dosage de la Lp(a) [287]. Simple à utiliser, cette méthode ne nécessite pas de dilution des échantillons ni d'équipement particulier. Elle peut être utilisée avec des anticorps polyclonaux ou un mélange d'anticorps monoclonaux.

Néanmoins elle présente de sérieux inconvénients dont certains sont spécifiques de la Lp(a). Elle se prête mal aux grandes séries et manque de sensibilité.

Elle donne des résultats sous estimés par rapport à une méthode gravimétrique.

Le problème majeur de cette méthode est sa sensibilité aux différences de taille de l'analyte mesuré : les isoformes de grande taille de la Lp(a) semblent sous estimées par rapport aux isoformes de petite taille 286.

Cette méthode plutôt semi-quantitative, peut être utile pour dépister la présence d'une Lp(a) avant de la doser [288]

                   Electro-immunodiffusion de Laurell

Plus rapide que l’immunodiffusion radiale, la méthode de Laurell associe la spécificité de l'immunochimie à la rapidité de l'électrophorèse [289].

Cette méthode a été utilisée par de nombreuses équipes et se révèle sensible, spécifique et précise. L'emploi d'un gel à faible électroendosmose permet une meilleure migration des grosses molécules telles que la Lp(a). Elle peut être considérée comme une méthode de choix car la réaction est objectivée par une fusée de précipitation et la nature lipoprotéique de l'antigène dosé est confirmée par l'emploi d'un colorant des lipides. En cas de réaction croisée entre l’antisérum et un autre constituant sérique, il apparaît un arc de précipitation distinct de l'arc principal.

Un autre avantage de cette méthode, pour le dosage de la Lp(a), est d'être insensible aux interférences affectant l'immunoprécipitation en milieu liquide.

Néanmoins, les échantillons de patients donnent parfois des fusées moins nettes et dans ce cas la hauteur exacte n'est pas toujours facile à apprécier, ce qui diminue la précision 286.

                   Immunoprécipitation en milieu liquide

La mise en présence d'un anticorps et d'un antigène entraîne, dans certaines conditions, la formation de complexes insolubles. Pour une concentration donnée en anticorps, la quantité de complexe formé est fonction de la concentration en antigène. L'estimation du précipité formé permet le dosage de l'antigène. Cette estimation peut être faite de manière simple et quantitative par turbidimétrie (mesure de la lumière transmise) ou par néphélémétrie (mesure de la lumière diffusée).

Pour le dosage de la Lp(a), l'addition de polyéthylène glycol accélère la formation des complexes antigène-anticorps mais pourrait être à l'origine de résultats élevés par rapport à d'autres techniques. Les avantages sont l'automatisation et la rapidité. Les résultats sont bien corrélés avec ceux des autres méthodes.

Les principaux inconvénients sont la consommation importante d'anticorps et l'impossibilité de doser des échantillons troubles. De plus il est déconseillé de doser des échantillons congelés [290] [291].

Ces méthodes sont également sensibles aux différences de taille de l'analyte entraînant des variations de dispersion de la lumière par le complexe antigène-anticorps 286.

Ceci est un réel problème étant donné le polymorphisme de taille de la Lp(a).

Un mode de lecture couramment utilisé pour les dosages par immunoprécipitation en milieu liquide est la mesure néphélémétrique en temps fixé. Ce type de technique est destiné à tenir compte des réactions non spécifiques susceptibles de se produire dans certaines conditions opératoires et/ou pour certains échantillons, et permet de minimiser le risque de réaction non spécifique.

Les techniques néphélémétriques sont moins soumises aux interférences que les techniques turbidimétriques.

Dans le cas de la Lp(a), l'effet des différences de taille doit être soigneusement évalué. En effet l’immunoréactivité de l’antisérum vis à vis des différents phénotypes peut être très différente selon que l’antisérum utilisé, réagit contre tel ou tel épitope.

L’anticorps doit reconnaître les différents phénotypes avec une affinité comparable et devrait donc être testé à l'aide de sérums frais phénotypés en apo(a).

Théoriquement, on pourrait minimiser le problème en utilisant un calibrant contenant toutes les isoformes majeures d'apo(a), l’idéal étant de calibrer avec les isoformes du patient ce qui est impossible à réaliser en pratique.

                   Radio immunologie

Le principe général de la radio-immunologie repose sur la compétition entre l'antigène marqué par un isotope et le même antigène non marqué vis à vis d’un anticorps spécifique, la concentration du complexe antigène marqué-anticorps étant inversement proportionnelle à celle du complexe antigène froid-anticorps.

Appliquée au dosage de la Lp(a), cette méthode est très sensible, spécifique et précise, mais elle nécessite une évaluation préalable des fortes et faibles concentrations de Lp(a) par immunodiffusion radiale. Elle est facilement automatisable.

Toutefois il faut utiliser des anticorps-anti-Lp(a) hautement purifiés et un antigène également très pur ce qui est un inconvénient puisque la Lp(a) sous forme pure est instable. Enfin l'emploi des radio isotopes rend cette technique peu accessible en pratique 113.

                   Immunolatex

Ce dosage est basé sur l'agglutination par l’antigène de particules de latex sur lesquelles sont fixés des anticorps spécifiques. L'intensité de l'agglutination est mesurée par turbidimétrie à 360 nm.

Pour le dosage de la Lp(a), cette méthode se révèle sensible et rapide, et ne présente pas les inconvénients de l'immunonéphélémétrie. La limite de sensibilité de la méthode est de 0,03 g/l et la gamme de linéarité va de 0,05 à 1,15 g/l. Les sérums sont dilués au 1000ème pour les dosages. La méthode est répétable: 2,6 p.cent et 3 p.cent à respectivement 0,12 et 0,54 g/l de Lp(a), et reproductible: 5,6 p.cent et 7,8 p.cent aux mêmes concentrations. La sensibilité et la précision sont comparables à celles des méthodes radio-immunologiques et permettent le dosage de faibles concentrations [292].

                   Immuno-enzymologie (ELISA)

Les enzymes capables de se fixer sur une immunoglobuline sans la dénaturer peuvent être utilisées comme marqueurs de réaction "antigène-anticorps". La peroxydase du raifort, la phosphatase alcaline peuvent ainsi être utilisées comme marqueurs grâce à leur activité catalytique. Si l'addition du substrat de l'enzyme donne une réaction colorée, la mesure de l'intensité de cette coloration permet le dosage de la substance marquée.

La technique ELISA (Enzyme Linked Immuno Sorbent Assay) est voisine dans son principe des techniques radio-immunologiques en tubes :

 

- Applications à la Lp(a) :

     - 1. Méthodes par compétition

Le problème majeur de cette technique est qu’il faut disposer de l'antigène pur. Or, la Lp(a) est difficile à purifier et instable sous forme pure [293].

C'est pour pallier à ces inconvénients que des méthodes "sandwich" avec deux anticorps différents ont été développées.

     - 2. Méthode non compétitive dite "sandwich"

L'anticorps immobilisé sur un support solide est mis en présence de l'antigène à doser qu'il fixe par un site spécifique de l'apo(a). Après lavage, un second anticorps marqué avec une enzyme (peroxydase) et reconnaissant un autre site spécifique de l'apo(a) ou mieux un site de l'apoB100, est ajouté. On révèle la fixation du 2ème anticorps par mesure de l'activité enzymatique après addition du substrat.

Cette technique dite "bi-site" présente de nombreux avantages. Elle ne nécessite pas d'antigène pur. L'utilisation d'anticorps monoclonaux de capture anti-apo(a) pour l'immobilisation et d'anticorps monoclonaux anti-apoB, pour la révélation permet un dosage spécifique, minimisant l'interférence du plasminogène.

Elle est relativement simple à mette en oeuvre, sensible, standardisée et automatisable. Cette approche résout le problème de la spécificité et permet l'expression des résultats en molarité.

Mais si on considère le problème de la standardisation des dosages de Lp(a), les résultats obtenus par mesure de l'apoB de la Lp(a) sont susceptibles d'être différents de ceux obtenus par mesure de l'apo(a).

Le problème de la spécificité peut être résolu par la sélection d'anticorps monoclonaux spécifiques de l'apo(a) et dépourvus de réactivité croisée avec le plasminogène.

Ce point a déjà fait l'objet de recommandations pour la préparation et la sélection des meilleurs anticorps monoclonaux pour le dosage des apo A1 et B ainsi que pour la caractérisation des anticorps sélectionnés.

La plupart de ces recommandations sont applicables aux anticorps monoclonaux anti-Lp(a) mais dans ce cas il faut en plus montrer que les anticorps monoclonaux sélectionnés réagissent avec toutes les particules Lp(a) indépendamment des diverses isoformes d'apo(a). Pour éviter toute différence d'immunoréactivité liée au fait que le nombre d'un épitope donné par molécule d'apo(a) peut varier en nombre avec le nombre de K4, il serait préférable de sélectionner les anticorps monoclonaux spécifiques d'épitopes du K5 ou du domaine protéase.

Du fait des caractère particuliers de l'apo(a), il est souhaitable de connaître les caractéristiques immuno-chimiques des anticorps monoclonaux sélectionnés pour l'immuno-dosage [294].

          Les problèmes spécifiques des dosages immunologiques de la Lp(a)

La qualité des immuno-dosages dépend principalement de la qualité des anticorps utilisés et de l'étalonnage. Le dosage immunologique de la Lp(a) pose des problèmes particuliers, liés aux faits suivants:

     - complexité structurale et hétérogénéité de la Lp(a)

     - homologie entre l'apo(a) et le plasminogène

     - absence de standardisation des méthodes

     - absence d'un mode commun d'expression des résultats.

                   Les anticorps utilisés

Un bon anticorps anti-apo(a) ne doit pas donner de réaction croisée avec le plasminogène et doit se lier avec la même affinité à tous les phénotypes de Lp(a).  L'idéal serait de sélectionner des anticorps dirigés contre un épitope unique, par exemple situé sur le kringle 5 ou sur le domaine protéase de l'apo(a). De ce point de vue, les méthodes ELISA, où l'anticorps de capture est un mélange d'anticorps anti-apo(a), et l'anticorps de révélation, un mélange d'anticorps anti-apoB, sont plutôt avantageuses.

Le dosage de la Lp(a) est souvent réalisé avec des méthodes utilisant des anticorps anti-kringles 4 qui sont en nombre variable selon les isoformes. Or, dans de nombreuses populations, 80 à 90 p.cent des individus sont hétérozygotes avec des combinaisons variables d'apo(a) de grande et petite tailles. La réactivité antigénique varie probablement entre individus alors qu’il est très important qu’un antisérum de dosage ait la même immunoréactivité vis à vis des différents formes de l’analyte.

L'inconvénient des anticorps monoclonaux-anti-K4 sera de surestimer les concentrations des Lp(a) de grande taille et de sous estimer les plus petites selon l'isoforme ou le mélange d'isoformes du standard.

Les antisérums sont préparés avec différentes espèces animales (chèvre, cheval, lapin principalement). La Lp(a) utilisée pour l'immunisation (ou comme standard pour les dosages) est généralement isolée du plasma humain par ultracentrifugation puis purifiée par filtration sur gel. L'isolement et la purification de la Lp(a) sont longs, de faible rendement et de plus la Lp(a) se conserve mal sous forme purifiée.

Les antisérum obtenus sont ensuite rendus monospécifiques de la Lp(a) par absorption avec des LDL isolées.

Certains suggèrent d'utiliser l'apo(a) isolée ou obtenue par génie génétique pour l'immunisation mais il n'est pas certain que les anticorps ainsi obtenus aient la même réactivité vis à vis de l'apo(a) dans la lipoparticule.

Les caractéristiques des anticorps choisis (polyclonaux, monoclonaux, ou mélanges d'anticorps monoclonaux) doivent donc être soigneusement évaluées avant de les employer dans une méthode de dosage.

                   Calibration, standardisation

La comparaison des résultats de dosage obtenus par des méthodes différentes a montré une bonne corrélation des résultats mais des différences absolues parfois considérables qui semblent en grande partie liées à des différences de calibration.

Néanmoins on considère que les résultats des études publiées qui incluaient des groupes témoins adéquats restent valides.

L'exactitude et la standardisation des méthodes de dosages immunologiques des apoprotéines dépendent principalement de la disponibilité d'un étalon primaire convenable comme l'ont montré les récents travaux de standardisation des dosages d'apoA1 et B [295]. Pour standardiser les dosages de Lp(a), il faudra suivre les mêmes étapes que ce qui a été fait pour les apo A-1 et B, mais avec une approche plus approfondie du fait des problèmes spécifiques que pose son dosage.

Ceci permettrait de comparer les résultats des différentes méthodes de dosage.

L'étalon primaire doit être réalisé à partir d'une fraction extrêmement pure de Lp(a) dont on détermine le titre par gravimétrie ou par dosage des protéines selon Lowry, l'albumine bovine servant d'étalon.

La masse de Lp(a) est obtenue en multipliant le résultat obtenu par un coefficient de 2,59 qui tient compte de la proportion de protéines dans cette lipoprotéine (27 p.cent) et de la différence de réactivité entre l'albumine bovine et l'albumine humaine.

L'obtention d'un étalon primaire défini est l'étape clé de la standardisation. En effet il permet de déterminer le titre des étalons secondaires (élaborés à partir d'un mélange de plasmas riches en Lp(a) puis lyophilisés dans des conditions particulières pour éviter les dégradations) qui devra être transférable aux calibrants utilisés dans les différents kits commerciaux.

Malheureusement, la Lp(a) délipidée montre un forte tendance à l’auto-association évoluant vers l’agrégation irréversible. Actuellement il n'existe pas de protocole standardisé pour l'isolement de la Lp(a) et la préparation d'un étalon primaire.

La Lp(a) est le plus souvent isolée à partir des fractions d'ultracentrifugation comprises entre les densités de 1,050 et 1,120. Après ultracentrifugation, la Lp(a) est séparée des autres lipoprotéines par filtration sur gel. Le rendement de ce mode de préparation est faible (15-20 p.cent) et on ne connaît pas les causes des pertes de Lp(a). Certains auteurs ont préparé la Lp(a) en sélectionnant des zones de densité plus étroites (1,06-1,09) pour éviter les risques de contamination par d'autres apoprotéines mais les Lp(a) ainsi isolées pourraient n